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À La Une - Un peu plus de...

L’année du serpent

Dites-moi, Madame Soleil, ce que nous réserve 2013 ? Que va-t-il arriver ? Rencontrerais-je le grand amour ? Aurais-je une promotion ? Plus d’argent, plus d’amis, une bonne santé, des enfants ? Déménagerais-je dans un grand appartement ?
On a beau être rationnel, cartésien, lecteur assidu de Roland Barthes, nourri à la parole de Lénine, imbibé de celle du Christ, il y a toujours un moment où l’on jette un coup d’œil à son horoscope. Surtout quand la nouvelle année se profile. On termine un chapitre pour en ouvrir un autre. Et au-delà des bonnes résolutions de reprise du sport, d’arrêt de la cigarette, d’un début d’une nouvelle hygiène de vie, il y a quelque chose de plus fort encore qui nous anime, une fois les douze coups de minuit passés. Abba a entonné sa pire chanson, les cotillons se sont écrasés sur le parquet ciré, les paillettes se sont coincées dans nos cheveux, on a embrassé tout un tas de gens qu’on ne connaît, ni n’aime, on s’est tapé un énième gueuleton, une énième cuite et on a pris de grandes décisions. Pas celles sur lesquelles on reviendra le jour de l’Épiphanie, les autres. Celles du changement de vie. Qu’on soit scorpion ascendant poissons, taureau avec la lune en vierge, balance, bélier, bœuf, rat, dragon, né le matin ou l’après-midi, on crève d’envie de savoir ce qui nous attend. L’année du serpent ou Vénus en capricorne, et nous voilà adeptes du supplément spécial astrologie 2013 de Femme Actuelle. Et quand c’est bien, on y croit. Tous. Il y aura du flouze et un nouvel homme, une embauche et une ébauche d’histoire d’amour, un mariage, une naissance. On y croit jusqu’à la moelle. C’est la méthode Couet astrologique. C’est écrit, tout ira bien. Je le veux, tout ira bien. Les astres ne trompent pas. Ni Maguy Farah, ni Michel Hayek, ni Françoise Hardy. Ils savent lire dans le ciel, alors on y croit. Mitterrand le faisait, alors pourquoi pas nous ?
Et puis il n’y a rien de mal à se faire tirer les tarots. À se demander si le Chariot, le Bateleur ou l’Érmite sont de bons présages. À se demander si 2013 sera plus sereine que les années précédentes. À se demander si enfin la roue va tourner. Il n’y a rien de mal à se rassurer. Rien de mal à vouloir que ça aille mieux. Rien de mal à se souhaiter du bien, à se vouloir du bien. Surtout par les temps qui courent. Numérologie, tarologie, voyance, on veut lire. Déchiffrer. On veut un signe. Un signe coincé dans les lignes de la main, dans l’interprétation d’un rêve, dans une roue astrale, dans les chiffres de sa date de naissance, dans la carte du Soleil, dans le marc d’une tasse de café retournée. On a rêvé qu’on allait avoir une petite fille, rez2a ! Il y a une colombe dans le téfel du café wassat, rez2a ! On a tiré la carte du monde, rez2a ! On a besoin de chance. On rêve que le vent tourne, que les choses bougent. On y tient tellement que même si on n’aime pas le café, on en avalera une tasse sans sucre, juste parce qu’au milieu de cet amas noir, où on fera tourner notre pouce, on crève d’envie de voir une petite lueur. Et on le redit, il n’y a rien de mal à vouloir croire. Depuis qu’on est tout petit on nous pousse à croire en un tas de choses. À la petite souris, au père Noël, aux fées, à l’Abominable homme des neiges, aux licornes, au monstre du Loch Ness, aux ogres, au loup-garou, au prince charmant, aux elfes, au marchand de sable, au père fouettard, aux sorcières, aux « il était une fois », aux « happily ever after ». On y a cru jusque dans nos trippes. Alors que ce soit dans une chaffé ou sur la ligne de vie, dans un jeu de cartes Fournier ou dans une boule de cristal, dans l’addition des lettres de notre prénom ou dans un pendule, dans la forme de notre visage ou dans notre façon d’écrire un M, dans les entrailles d’un coq ou dans les yeux de Laura Mars – peu importe le flacon – on voudra savoir ce que 2013 nous préserve. De quoi seront faits ces 365 jours, cette année non bissextile, cette année impaire sans JO ni Mondial, ni Coupe d’Europe, cette année d’élections mornes, cette année qui porte le nombre le plus redouté et le plus joué de tous les temps. En cette fin 2012 qui ôta et apporta tant, cette année composée de janvier et d’avril, d’août et de novembre, on va pronostiquer celle à venir en bousculant tous les karmas, en chamboulant les oracles, en déroutant et détournant les prévisions du monde.
Bonne année.
Dites-moi, Madame Soleil, ce que nous réserve 2013 ? Que va-t-il arriver ? Rencontrerais-je le grand amour ? Aurais-je une promotion ? Plus d’argent, plus d’amis, une bonne santé, des enfants ? Déménagerais-je dans un grand appartement ? On a beau être rationnel, cartésien, lecteur assidu de Roland Barthes, nourri à la parole de Lénine, imbibé de celle du Christ, il y a toujours un...
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