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Liban - Crise

Militaires otages : un silence qui prête à diverses interprétations place Riad el-Solh

Les parents n'ont pas été contactés par les responsables, ni même par les ravisseurs depuis longtemps. « Ce n'est pas une mauvaise chose », estime le père d'un soldat.

À Riad el-Solh, le calme plat. Photo Moustapha Jamaleddine

Les tentes dressées place Riad el-Solh, dans un enclos délimité par des fils de fer barbelés, dégagent une atmosphère d'abandon. La plupart d'entre elles sont vides, les parents des militaires pris en otage par Daëch et al-Nosra depuis plus de huit mois ont préféré vaquer à des occupations plus utiles dans la journée. Certains ont même regagné leurs villages pour quelques jours, sachant que leur présence à Beyrouth, du moins pour le moment, n'avancera en rien les choses. Cela fait bien longtemps qu'ils n'ont pas été contactés par les responsables, ni même par les ravisseurs terroristes qui semblent les avoir oubliés.


Dans la dernière des tentes, toutefois, trois hommes et deux femmes, chacun issu d'une famille différente, discutent autour d'un réchaud électrique. Leur tente bleue est un véritable fourre-tout comprenant ordinateurs, miniciterne d'eau, toutes sortes de boîtes de conserve, matelas et quelques chaises. Le tout illuminé au moyen d'une lampe alimentée par un câble branché sur un poteau du centre-ville. Bien que les proches des otages vivent un calvaire depuis huit mois, ils n'en sont pas pour autant moins chaleureux quand ils reçoivent une visite. Leur présence au centre-ville, en fait, a fait des habitués qui viennent souvent leur tenir compagnie et les distraire, voire leur faire oublier pour quelques minutes qu'ils n'ont pas reçu de nouvelles de Daëch et d'al-Nosra depuis assez longtemps.
« Ce n'est pas une mauvaise chose, raconte le père de l'otage Mohammad Taleb. Comme nous ne recevons pas de menaces, cela signifie que le gouvernement s'attelle au dossier et qu'il est toujours en contact avec les ravisseurs. Mais nous n'avons aucune information. "Ils" veulent garder les négociations secrètes, ce qui n'est pas faux. »


Dans son édition d'hier, le quotidien al-Joumhouriya rapportait de sources de sécurité que le dossier des militaires otages était sur la bonne voie et qu'un progrès considérable avait été enregistré à ce niveau, de sorte que les prochaines heures devraient apporter des développements positifs. Selon le quotidien, le directeur général de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, aurait rencontré à Doha le chef des services de renseignements qatari, Ghanem el-Kbeissy, afin d'esquisser une feuille de route concernant l'échange des otages contre des jihadistes. De sources proches du général Ibrahim au sein de la SG, on refuse toutefois de donner plus de détails concernant l'affaire qui doit rester « top secret », s'abstenant même de préciser si la rencontre entre les deux hommes a bien eu lieu ou non à Doha. « Les fuites médiatiques ne sont pas souhaitables, mais le silence de la SG ne signifie pas que Abbas Ibrahim a négligé cette affaire. Il s'agit d'une priorité pour lui. Il tente de régler le dossier. Nous ne pouvons cependant être jusque-là ni optimistes ni pessimistes », ajoute-t-on de mêmes sources.

 

(Lire aussi: « J'aurai préféré que mon frère meure au combat »)

 

Une affaire oubliée ?
Dans sa tente rudimentaire, le père de Mohammad Taleb déplore le fait que « les médias sont mieux informés que nous ». « Nous suivons les nouvelles comme tout le monde et aucun responsable ne prend la peine de nous rendre visite », confie-t-il. Pensif, le père réfléchit à haute voix. « Le ministre Bou Faour s'intéresse à notre cause, c'est le meilleur, mais il a des tas de choses à traiter et des centaines de personnes chaque jour dans son bureau », raconte-t-il, avant de poursuivre soudain dans un élan de colère : « C'est le dernier de leurs soucis. Ils devraient être les premiers à venir nous voir et se sentir embarrassés par ce qui se passe. »
Près du père de Mohammad Taleb, le frère du soldat Khaled Hassan raconte que plusieurs familles ont déjà été contactées par Daëch et al-Nosra les appelant à rendre visite à leurs fils enlevés. « Je n'irai jamais, même si on me demande d'aller ramener mon frère, assure-t-il. Certaines femmes acceptent d'y aller. » Et le père de Mohammad Taleb de rétorquer : « Une femme peut contrôler ses émotions. Toutes les fois où j'ai contacté mon fils, je n'ai pas pu m'empêcher d'insulter violemment les ravisseurs. » « Une femme, au pire, serait violée », ajoute le troisième occupant de la tente, hilare, avant de se ressaisir. « Nous sentons que notre affaire est un peu oubliée, il faut peut-être que nous bougions les choses une nouvelle fois », affirme-t-il.


Des propos repris par Nizam Mghayt, frère du policier enlevé Ibrahim. Contacté par L'Orient-Le Jour, le jeune homme assure qu'« une escalade pourrait être envisagée dès que nous sentirons un certain laxisme ». « Ce sont surtout les informations contradictoires venant de partout qui nous fatiguent aujourd'hui et nous découragent, dit-il encore. Certains responsables affirment que les développements sont positifs, surtout du côté d'al-Nosra. Mais depuis l'offensive de l'armée à Ras Baalbeck contre les jihadistes, les négociations avec l'État islamique sont bel et bien bloquées. »

 

Repère
Qui sont les militaires libanais otages des jihadistes?

Les tentes dressées place Riad el-Solh, dans un enclos délimité par des fils de fer barbelés, dégagent une atmosphère d'abandon. La plupart d'entre elles sont vides, les parents des militaires pris en otage par Daëch et al-Nosra depuis plus de huit mois ont préféré vaquer à des occupations plus utiles dans la journée. Certains ont même regagné leurs villages pour quelques jours,...

commentaires (2)

SACRIFIÉS PAR L'ABRUTISSEMENT ET L'HÉBÉTUDE !

LA LIBRE EXPRESSION

11 h 53, le 04 mars 2015

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Commentaires (2)

  • SACRIFIÉS PAR L'ABRUTISSEMENT ET L'HÉBÉTUDE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 53, le 04 mars 2015

  • Militaires otages ,un silence qui plonge petit à petit dans le monde de l'oubli .

    Sabbagha Antoine

    08 h 12, le 04 mars 2015

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