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Liban - La situation

Le Liban, oasis de paix et fabricant de crises

Jamais peut-être auparavant l’expression « le feu est à nos portes » n’a été aussi réelle, aussi vivante qu’elle ne l’est aujourd’hui. Saïd Khatib / AFP

Un bref coup d'œil sur la région du Proche-Orient suffirait ces jours-ci à répertorier le Liban – ou du moins la plus grande partie de son territoire – dans la catégorie des havres de paix aussi insolents que privilégiés.
Jamais peut-être auparavant l'expression « le feu est à nos portes » n'a été aussi réelle, aussi vivante qu'elle ne l'est aujourd'hui. Le Liban est cerné par les guerres et les boucheries, dont certains épisodes débordent même ses frontières, tant au Nord et à l'Est qu'au Sud. Et pourtant, il existe un vrai miracle libanais qui empêche jusqu'ici le pays du Cèdre de s'enfoncer à son tour dans la terrible tourmente qui s'est emparée de la région.


Ce miracle est d'autant plus surprenant que tous les ingrédients explosifs de la région se retrouvent concentrés sur le sol du Liban et dans sa population, sans même parler de l'effet très fragilisant de l'arrivée massive et incontrôlée de populations déplacées sur son sol exigu.
Il ne fait pas de doute que les Libanais, en dépit de leurs profondes divisions, de leurs échecs, de leurs blocages et de leurs crises, sont en passe de réussir – peut-être – une mutation historique fondamentale : pendant des lustres, ce pays servait de caisse de résonance automatique aux conflits larvés ou déclarés de la région, et de théâtre de règlements de comptes et de luttes d'influence entre dictateurs du cru. Aujourd'hui, si certaines composantes politiques libanaises continuent d'être totalement ou partiellement tributaires d'agendas étrangers, il n'empêche qu'on a le sentiment – en fait depuis le fameux « si j'avais su » de Hassan Nasrallah après la guerre de l'été 2006 – que tout le monde y regarderait à plusieurs reprises avant de déclencher un conflit armé majeur qui emporterait une fois de plus le Liban.
Les nombreux commentaires hostiles, en provenance d'habitants du Liban-Sud et aussi de milieux politiques pourtant acquis à la cause de la « résistance », au sujet des tirs de roquettes pratiqués à la sauvette contre Israël à partir du territoire libanais, sont une illustration de ce qui précède.
Le métier de « tireur » à partir du Liban-Sud ne semble plus être en mesure, désormais, de nourrir son homme. Tout au plus manifeste-t-on, chez les plus endurcis, une « compréhension » plus ou moins condescendante à l'égard du pauvre hère qui se livrerait encore à ce genre de pratique, à présent ouvertement jugée nocive.


Cependant, cette évolution « pacifiste » a ses limites, incarnées essentiellement par la vocation et le programme jamais reniés jusqu'ici du Hezbollah. L'implication de ce dernier dans les combats syriens, qu'ils soient rapprochés ou non de la frontière du Liban, en fait un outil parfait de la volonté des pasdaran iraniens. On comprend qu'au moment où ses combattants meurent face aux rebelles syriens de tous poils, il n'ait aucune envie d'ouvrir un second front au Liban-Sud. Mais que se passerait-il si un jour Téhéran décidait, quand même, d'ordonner l'ouverture de ce front ? Serait-il tenu compte, ce jour-là, du sentiment de la population du Sud, pour ne pas parler du reste de la population ? La question demeure d'actualité.
D'autre part, si les Libanais, dans l'ensemble, donnent l'impression d'en avoir assez des guerres et de vouloir désormais vivre en paix, ils ne semblent pas près, en revanche, d'abandonner cette propension à donner en permanence à leur vie politique un aspect franchement « bord du gouffre ».
La crise de la présidentielle, toujours au point mort, notamment en raison de l'attitude d'un candidat non déclaré, est appelée à s'éterniser et à entraîner dans son sillage d'autres échecs dans les échéances constitutionnelles à suivre, notamment les législatives prévues à l'automne prochain.
Le Parlement reste, en gros, paralysé dans son action législative – du fait de la vacance de la présidence de la République – et ce n'est qu'à la condition d'avoir un ordre du jour à la fois très concis, très consensuel et très urgent que toutes ses composantes accepteraient d'y siéger ces jours-ci. C'est ainsi que le bloc du Futur s'est dit prêt à assurer le quorum de la séance prévue demain jeudi, principalement consacrée aux euro-obligations et au déblocage du paiement des salaires des fonctionnaires. Mais cette séance n'est guère à l'abri de tentatives de manipulation de l'ordre du jour.
Quant au gouvernement, plus que jamais régi par la règle – extraconstitutionnelle – de l'unanimisme, il fait ses premières armes dans la discipline du blocage, avec la querelle persistante, entre ses composantes chrétiennes notamment, sur les nominations à l'UL.


Havre de paix relatif, le Liban l'est aujourd'hui au regard de ce qui se passe dans la région, mais c'est aussi une usine à fabriquer des impasses politiques en série.

 

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Un bref coup d'œil sur la région du Proche-Orient suffirait ces jours-ci à répertorier le Liban – ou du moins la plus grande partie de son territoire – dans la catégorie des havres de paix aussi insolents que privilégiés.Jamais peut-être auparavant l'expression « le feu est à nos portes » n'a été aussi réelle, aussi vivante qu'elle ne l'est aujourd'hui. Le Liban est cerné par...

commentaires (3)

C'EST QUE L'ABRUTISSEMENT HABITE LES DEUX CAMPS... D'Où LES CRISES ! PAUVRE LIBAN, TON CALVAIRE EST LENT ET LONG !

LA LIBRE EXPRESSION

15 h 57, le 16 juillet 2014

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • C'EST QUE L'ABRUTISSEMENT HABITE LES DEUX CAMPS... D'Où LES CRISES ! PAUVRE LIBAN, TON CALVAIRE EST LENT ET LONG !

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 57, le 16 juillet 2014

  • Le Liban souffre de trois maux incurables qui en font un "fabricant de crises", en permanence au bord du gouffre : 1-loyauté de certaines parties à des forces étrangères et non à leur pays. Cela s'appelle "trahison". Il n'y a pas un autre mot. 2-Obsession très maladive de certains chefs et hommes politiques pour leur ambition et leur intérêt personnel, ce qui les fait imaginer que tout le pays doit se prosterner devant celles-ci. 3-Suivisme aveugle de partisans dans les deux cas ou par fanatisme sectaire ou par orgueil ou par entêtement bête.

    Halim Abou Chacra

    04 h 02, le 16 juillet 2014

  • "Cependant, cette évolution « pacifiste » a ses limites, incarnées par la vocation jamais reniée jusqu'ici du Hezbollah. Son implication de ce dernier dans les combats syriens, en fait un outil de la volonté des pasdarans iraniens. On comprend qu'au moment où ses miliciens meurent face aux Combattants syriens, il n'ait aucune envie d'ouvrir un second front au Liban. Mais que se passerait-il si un jour Téhéran décidait d'ordonner l'ouverture de ce front ?". La réponse est dans la question ; c'est évident, faut pas chercher midi à quatorze heure !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    02 h 44, le 16 juillet 2014

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