Même si les réunions se prolongent et même si un accord n'est pas encore officiellement conclu, les milieux politiques du 8 et du 14 Mars s'accordent à dire que la commission chargée de la rédaction de la déclaration ministérielle finira par s'entendre sur une formule acceptable pour tous.
Les milieux du 14 Mars précisent à cet égard que lorsqu'on accepte le plus dur, c'est-à-dire de participer à un gouvernement politique avec des représentants du Hezbollah, après avoir rejeté pendant des mois cette idée, on ne peut pas s'arrêter à des formules linguistiques, qui d'ailleurs ne changent en rien la réalité sur le terrain et n'ont, en fait, qu'une valeur symbolique.
Certes, il est important pour le courant du Futur et ses partisans de ne pas mentionner la fameuse formule « armée-peuple-résistance ». Bien que celle-ci avait été élaborée par l'ancien Premier ministre Fouad Siniora en 2006 et visait à affaiblir le Hezbollah en brisant son monopole sur la résistance contre Israël. À l'époque, c'était un point important dans la destruction de l'image du Hezbollah en tant que force de résistance. Aujourd'hui, c'est cette même formule qu'il faut modifier. D'abord parce que les temps ont changé et ensuite pour dissocier le Hezbollah de l'armée et du peuple, et pour l'isoler sur la scène interne. Le 14 Mars qui a fini par accepter un gouvernement politique, avec le Hezbollah et avec, d'une certaine manière, le tiers de blocage pour le 8 Mars et ses alliés, tout en renonçant à arracher le portefeuille de l'Énergie au bloc du Changement et de la Réforme, a besoin de marquer un point, même symbolique. Il est donc fort probable que la phrase qui sera adoptée mentionnera le droit à la résistance contre Israël sans reprendre la fameuse formule.
Bien que selon des ministres membres de la commission de rédaction de la déclaration ministérielle, le climat pendant les réunions est cordial, le ministre Machnouk intervenant rarement ainsi que le ministre Kataëb Sejaan Azzi. Le seul qui discute chaque détail et prolonge en quelque sorte les débats, c'est le ministre Boutros Harb. Mais, selon un ministre centriste, la surenchère politique est surtout destinée à la consommation populaire et, au fond, tous sont convaincus qu'un accord finira par être trouvé, dans le courant de la semaine. En effet, les pressions internationales sur le Liban ont pour objectif de pousser le pays à avoir un gouvernement en fonction, bénéficiant de la confiance du Parlement pour la réunion du comité de soutien au Liban prévue le 5 mars à Paris. La communauté internationale estime à cet égard qu'il est impératif que le Liban soit représenté à cette conférence par un gouvernement représentatif, soutenant le président de la République qui dirigera la délégation libanaise officielle.
En tenant compte de ces considérations, il semble donc que les ministres n'aient pas une grande marge de manœuvre ni beaucoup de temps. Tout comme le Parlement qui devrait voter au plus vite la confiance au gouvernement, une fois la déclaration ministérielle adoptée. Dans ce contexte, la formule qui sera finalement adoptée devrait satisfaire toutes les parties et permettre au 14 Mars de dire à ses partisans qu'il a remporté une victoire et au 8 Mars de dire aux siens : « J'ai résisté et tenu bon jusqu'au bout. » Même si dans les deux cas, il s'agit d'une victoire et d'une résistance linguistiques.
La réalité, estime un ministre du 8 Mars, c'est que la formule adoptée ne changera rien à la situation sur le terrain. Aujourd'hui plus que jamais, la résistance est une nécessité, d'abord à cause du fait que les fameux équipements attendus par l'armée, dans le cadre du don saoudien, tardent à arriver. Les deux parties ne sont pas encore d'accord sur la nature des armes à livrer à l'armée. Cette dernière réclame par exemple des hélicoptères Gazelle avec des missiles, mais la France est réticente, ainsi que des blindés. De plus, l'armée libanaise est habituée à manipuler des équipements de fabrication américaine. Ses soldats et officiers devront donc subir un entraînement spécial avant de pouvoir utiliser les armes et les équipements français. Tout cela devrait donc prendre du temps.
En attendant, comme l'a dit le secrétaire général du Hezbollah dans son dernier discours, il faut pouvoir défendre le Liban et surtout son indépendance, sa souveraineté et ses ressources pétrolières. Nasrallah s'était ainsi déclaré prêt à déposer les armes lorsque l'armée libanaise sera en mesure de protéger et de défendre le pays. Or, dans le contexte actuel confus et complexe, et avec en plus la menace takfiriste qui la vise désormais, l'armée ne peut pas remplir toutes les missions seule. C'est d'ailleurs la coopération étroite entre elle, le Hezbollah et des services de renseignements étrangers sur le terrain qui est en train de lui permettre d'opérer des coups de filets spectaculaires dans les rangs des takfiristes. Il est donc quasiment impossible, dans cette situation, de ne pas mentionner le droit à la résistance dans la déclaration ministérielle. Les débats actuels et les positions radicales ne sont donc qu'une des surenchères verbales dont la classe politique libanaise est la spécialiste. Elles ne changent rien dans le fond et n'ont aucun impact sur le cours des événements... qui reste tributaire des développements régionaux et en particulier en Syrie.
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commentaires (7)
J'apprends que c'etait siniora qui avait elabore la formule armee-peuple-resistance , heureusement vous etes la Scarlett , ca eloigne notre ignorance des dossiers importants du pays . Cette negociation pied a pied des forces de la resistance face a l'incompetence ne peut pas etre qu'un detail , les symboles sont importants et l'avenir du pays depends d'une virgule , le laisser aller des gouvernements precedents ne devraient plus etre la regle , il faut etre rigoureux dans les principes , parce qu'en face c'est pas des enfants de choeur , il leur faut plus que des declarations semantiques pour les eradiquer de notre pays , il faut un veritable engagement national et populaire , et on ne peut pas compter sur l'irresponsabilite des 14 evanescents pour ca . Y a qu'a regarder qui les dirige pour le comprendre , nous on a Scarlett et on est sauve .
FRIK-A-FRAK
13 h 28, le 26 février 2014