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Liban - Communautés

Raï : « Le Liban sera fait ensemble ou ne sera pas ! »

Le patriarche maronite publie un « mémoire » mettant en garde les Libanais contre l'affaiblissement de leur pacte de vie commune, en les invitant à remettre leurs priorités en ordre.

Le document publié par l’Assemblée des évêques fait référence explicitement à la déclaration de Baabda. Photo Émile Eid

C'est un très beau mémoire, très sincère, que le patriarche maronite, Béchara Raï, a adressé hier à l'issue de la réunion mensuelle de l'Assemblée des évêques maronites, aux composantes de la société politique libanaise, pour leur rappeler « qu'elles ont fait le Liban ensemble » – la proclamation du Grand Liban date de 1920 – et « qu'elles doivent en préserver l'existence ensemble ».
Les choses sont dites aussi gravement parce que, pense le patriarche, le Liban vit en ce moment une phase critique de son existence, « la plus critique » selon ses termes, et qu'il a besoin de toute sa mémoire historique pour y faire face avec succès.
« Le Liban sera fait ensemble ou il ne sera pas », dit-il en particulier.


Si ces paroles, somme toute évidentes, élémentaires, sont nécessaires aujourd'hui, c'est parce que les différentes communautés qui forment le Liban sont extrêmement polarisées par l'existence d'axes politiques régionaux auxquels elles doivent plus ou moins allégeance, fait valoir en substance le mémorandum.
De fait, écartelé entre l'axe syro-iranien et l'Arabie saoudite, le Liban vit en ce moment des heures cruciales et il est entraîné dans la crise syrienne, devenue le point de convergence de tous les axes régionaux et internationaux, le lieu où se joue une partie déterminante pour l'avenir du Moyen-Orient. Une partie qui s'est traduite, sur le plan local, par une implacable lutte d'influence qui a totalement faussé le jeu des institutions, « au point de les paralyser », comme le souligne le mémoire.

 

Le patriarcat maronite, gardien du Liban
Conscient du péril et du fait que l'histoire a fait des patriarches maronites les fondateurs et « les gardiens » du Liban, le patriarche Raï s'est donc fait un devoir de rappeler aux uns et aux autres ce qui empêchera le Liban d'être écartelé jusqu'à l'éclatement, et de vivre conformément à sa vocation historique : celle d'être « plus qu'un pays, un message, un modèle de liberté et de pluralisme pour l'Orient et l'Occident », selon l'heureuse formule de Jean-Paul II, par laquelle se clôt le mémorandum.
Pour se faire comprendre, Mgr Raï remonte aux origines de la création du Liban indépendant, fondé sur « un pacte national » oral qui est l'assentiment, l'adhésion à une « convivialité (islamo-chrétienne) qui lui est antérieure ».
Le mémoire déplore en fait la perte collective, dans des pans entiers de la sphère politique, du sens du « pacte », au bénéfice d'une lutte acharnée pour le pouvoir, et invite à le retrouver et à le raviver.

 

Formule et Constitution
Le pacte fondateur s'est incarné dans une « formule » et une Constitution, ajoute le patriarche. La formule s'exprima par « deux négations », « Ni Orient ni Occident » qui étaient un assentiment à une volonté de vivre en commun. À l'époque, soutient le patriarche, ce « ni...ni » signifiait non à l'union avec la Syrie et non à l'allégeance à la France. Aujourd'hui, c'est « l'essence de la formule », l'adhésion à une vie commune qui est le renoncement à des attachements externes qu'il faut retrouver, et non sa lettre.
Après « le pacte » et « la formule » vient « la Constitution », qui incarne la volonté de partenariat dans l'exercice du pouvoir et de l'édification des institutions, et qui a évolué vers le respect du principe de la parité islamo-chrétienne au Parlement, au sein du gouvernement et dans les hauts postes administratifs.

 

La neutralité positive
Le patriarche place au rang de constantes fondatrices le principe de « neutralité positive », sous-entendu par la formule. Il rappelle que cette neutralité s'exerce à l'égard des axes politiques vers lesquels sont polarisées les communautés libanaises, mais qu'elle n'exclut d'aucune façon l'engagement du Liban aux grandes causes du monde arabe, à commencer par la cause palestinienne.
Sur la neutralité, il assure que « loin d'isoler le Liban des règlements régionaux, comme certains le redoutent, elle est la meilleure façon de défendre le pluralisme dans des sociétés composites » comme celle du Liban.
Il va de soi que la plus grande entorse à la neutralité qui protège le Liban est, aux yeux de beaucoup de Libanais, l'engagement militaire du Hezbollah en Syrie, et les représailles que cela lui vaut sur le sol libanais, sous forme d'attentats-suicide.
Sans nommer le Hezbollah, le document patriarcal souligne l'importance pour le Liban « de s'interdire d'être un point de passage ou un point de départ à des actions de nature à impliquer le Liban dans les conflits (...) entre axes régionaux ou internationaux ».
Pour faire équilibre, le mémoire évoque la nécessité d'une « stratégie de défense nationale » qui permettrait au Liban « de récupérer ses terres spoliées et de protéger ses frontières ».

 

Les priorités
Pour finir, le patriarcat se fait un devoir de tirer les leçons des périls réels encourus par le Liban et de rappeler « les priorités » d'action qui lui semblent s'imposer. Ce sont :


- la poursuite de l'édification des institutions (après la préservation des acquis), dans un effort pour aider le pouvoir central à émerger et à s'imposer ;
- l'élection d'un nouveau chef de l'État et la promotion d'un dialogue interne ;
- l'élaboration d'une nouvelle loi électorale et l'organisation d'élections législatives ;
- la formation d'un gouvernement ;
- la décentralisation administrative ;
- la poursuite de l'application de l'accord de Taëf et la correction de ses défauts ;
- l'attention aux jeunes ;
- la promotion du rôle de la femme ;
- la réforme administrative et la lutte contre tout ce qui corrompt l'appareil d'État (corruption et clientélisme) ;
- l'ouverture sur le monde, en particulier sur le monde de l'émigration, et le vote d'une loi permettant aux ayants droit de retrouver la nationalité libanaise ;
- la participation du Liban à l'émergence d'un véritable renouveau arabe .

C'est un très beau mémoire, très sincère, que le patriarche maronite, Béchara Raï, a adressé hier à l'issue de la réunion mensuelle de l'Assemblée des évêques maronites, aux composantes de la société politique libanaise, pour leur rappeler « qu'elles ont fait le Liban ensemble » – la proclamation du Grand Liban date de 1920 – et « qu'elles doivent en préserver l'existence...

commentaires (7)

Et il se fera , Nshallah !!!

FRIK-A-FRAK

17 h 19, le 06 février 2014

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Commentaires (7)

  • Et il se fera , Nshallah !!!

    FRIK-A-FRAK

    17 h 19, le 06 février 2014

  • Quand ,j'ouvre la porte...je rentre dans la pièce...bien vu... c'est que çà phosphore dur au patriarcat...

    GEDEON Christian

    13 h 55, le 06 février 2014

  • CE N'EST PAS LE LIBAN QUI SERA FAIT OU NON FAIT. LE LIBAN EXISTE !!! C'EST LA PATRIE ( SI CERTAINS CONNAISSENT LE SENS DE CE MOT ) OU L'ETAT QUI SERA FAIT OU NON FAIT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 59, le 06 février 2014

  • ET... À QUATRE PAS D'ICI... JE T'EMBRASSERAI...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 18, le 06 février 2014

  • Ce Grand-Liban n’est plus le cœur battant de ces conTrées ! À présent c’est la Syrie. Et qui est si infatué et si résigné ? Un Syrien ou un Libanais ? Non, c’est ce Batrak, Râëéh 1er ! En plein de ce Printemps, Bchârah de Bkérkéh und Qannoûbîne, est non seulement fasciné par sœur-syrie l’aSSadique en soliloquant hardiment : "Ce croissant est composé de moult wilâïyâts tout autour de sœur-syrie" ; mais si amouraché au point de prétendre que "s’il y avait kekchose d’utile pour ce Lébnéne mais préjudiciable à sœur-syrie, il considérerait ceci comme un crime." ! Cette impulsion, cette exaltation brûlante émanent bien de la pensée d’un Râëé 1er ; bientôt dernier. C’est dire que nombreux furent ceux qui, avant lui, succombèrent aux charmes de cette Syrie en croissant, et devinrent otages de bääSSyriens et Pan grands-syriens métamorphosés "théoriciens" de pacotilles écumants, clones fascisants des sanguinaires en blouses brunes des années 30 du siècle dernier ! A ce jour, ce "fertilisé" est toujours d’utopie parfumé ; même s’il a pu donner l’impression qu’il allait finir par être inventé. Deviendra-t-il ce qu’il est en réalité, un bête lieu de passage, de bâtardise et de brassage ? Ou bien restera-t-il ce qu’il est fantasmé ; la partie imaginaire et merveilleuse de l’univers mental d’indigènes plats : La perle de cette sphère fermée, la cervelle d’un corps longtemps déjà atrophié ?

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    07 h 34, le 06 février 2014

  • Bkerké insiste vigoureusement sur les deux piliers sur lesquels est bâti le Liban et sans lesquels il n'existe point : "vie commune et neutralité vis-à-vis de tout axe et de tout conflit extérieurs". Tout le monde sait qui sape et annihile ces deux fondements par l'imposition de leurs contraires ? Ces contraires sont : 1- une vue et un mode de vie national unique se traduisant par une "résistance" super armée éternelle (donc des guerres sans fin), qui "est désormais incorporée de fait à la Constitution" (sic) selon certains caciques. 2-engagement dans un conflit extérieur qui est en train d'entraîner au Liban les pires fléaux et les plus grands malheurs, soit le terrorisme d'al-Qaeda et le conflit sectaire. Telle est l'impasse sans issue dans laquelle ce pays est enlisé par le Hezbollah.

    Halim Abou Chacra

    05 h 43, le 06 février 2014

  • Il a donc fallu tous ces longs mois depuis Aout 013, pour nous débiter banalement juste cela !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    04 h 15, le 06 février 2014

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