Rechercher
Rechercher

Liban - Liban

Entre Aridi et Safadi, le déballage sordide

Le ministre des TP accuse son collègue d'avoir fait obstruction à son travail, dans le but de faire pression sur lui pour obtenir des services illégaux et de faire des bénéfices illégitimes à Zeitouna Bay.

Ghazi Aridi au cours de sa conférence de presse : voilà les photos des travaux illégaux à Zeitouna Bay... Photo Dalati et Nohra

L'immunité politique du Liban est à son point le plus bas. C'est l'un des plus grands déballages de ces dernières années. Le ministre des Travaux publics du gouvernement démissionnaire, Ghazi Aridi, a accusé hier son collègue des Finances, Mohammad Safadi, d'avoir privé son département des crédits qui lui reviennent, au titre de l'expédition des affaires courantes, pour avoir refusé d'approuver deux infractions majeures qu'il avait commises, l'une à Barbara (Batroun), où il s'est construit une villa et une jetée, empiétant ainsi sur le domaine maritime public, l'autre à Zeitouna Bay, un mégaprojet du centre-ville auquel il est associé sur le plan financier, à hauteur de 12 %, qui n'a pas l'aval du « Conseil supérieur de la planification ». Selon M. Aridi, un plan reliant le bâtiment construit à une surface proche, qui permettrait de tricher sur le coefficient d'exploitation, est en cours.


Cinq jours après les premières fortes pluies de la saison qui ont entraîné inondations et dégâts, paralysant pendant des heures la circulation dans la plupart des régions libanaises, le ministre sortant des Travaux publics, Ghazi Aridi, a présenté ses excuses à l'opinion, tout en expliquant avoir manqué à son devoir ministériel, en raison des restrictions budgétaires imposées par M. Safadi.
« Je suis au service du peuple et je le resterai quoi qu'il arrive, a dit M. Aridi. Je présente mes excuses au peuple pour les embouteillages sur les routes. J'accepte toutes les critiques, même si elles sont blessantes ou fausses », a-t-il ajouté, avant d'expliquer en détail la cause des retards dans l'exécution des travaux publics, à l'origine des inondations.


Selon le ministre des Travaux publics, M. Safadi est revenu sur l'assurance qu'il lui avait donnée, en date du 3 mai dernier, concernant le budget qu'il est en droit de dépenser au titre de l'expédition des affaires courantes, sachant que le budget de son ministère pour 2013 est de 122 milliards de livres. « En quittant M. Safadi, ce dernier m'avait affirmé qu'il m'enverrait une formalité » à signer, a dit M. Aridi. Le 24 mai, je recevais les plans du port (de Barbara), qu'on me demandait de renforcer avec des acropodes brise-lames. « Approuver ces travaux aurait signifié approuver l'infraction, a-t-il dit. Je ne l'ai pas fait. »
« Le 2 septembre dernier, nous avons reçu un avis de la part du Conseil des ministres, refusant l'exécution des travaux demandés, a poursuivi le ministre. Entre-temps, nous avions déjà contacté les entrepreneurs. j'ai pris sur moi de leur demander d'entamer le travail quand même. C'est le ministre des Finances qui s'est personnellement opposé à l'octroi des 61 milliards de livres libanaises que nous avions requis du gouvernement », a-t-il poursuivi.


Selon M. Aridi, M. Safadi a refusé de débloquer ce crédit en affirmant que le chef de l'État s'y opposait car le contrat de gré-à-gré signé en la matière privait le Trésor public d'un montant de 2 milliards de livres qu'il fallait considérer comme « volés ». « Cela s'est passé en plein Conseil des ministres », a-t-il précisé.
Et M. Aridi de s'indigner en expliquant que la procédure qu'il avait suivie était calquée sur celle qu'avait suivie M. Safadi lui-même, quand il était ministre des TP.
Le ministre des TP se rappelle avoir demandé alors à son collègue « s'il était lui-même le voleur ou bien s'il essayait d'en protéger un », en lui rappelant qu'il l'avait lui-même averti, lors de la cérémonie de passation des pouvoirs, qu'il devait « surveiller tous les couloirs de son département » contre les voleurs et les profiteurs.
Le ministre Aridi a par ailleurs révélé que le budget accordé à son ministère durant l'année 2013 ne dépassait pas les trois milliards de livres. « En septembre dernier, j'avais déjà mis en garde contre les risques d'inondations majeurs dans le pays », a encore dit M. Aridi.

 

(Lire aussi : « Alexa » arrive aujourd'hui, le Liban en état d'alerte)

 

« Il est payé pour ça... »
Mohammad Safadi n'a pas tardé à réagir, rejetant les accusations de son collègue. « Toutes ces accusations sont fausses, a-t-il déclaré dans une intervention télévisée. La campagne que mène Ghazi Aridi est politique par excellence, a-t-il ajouté. Il sait que je peux être nommé Premier ministre, et il tente par ce scandale de compromettre mes chances. Le ministre des TP est payé pour ça », a-t-il accusé.
M. Aridi « veut rejeter la responsabilité de son échec sur tout le monde », a encore dit M. Safadi, qui a expliqué que les crédits étaient automatiques pour les projets « urgents », et non pour tous les projets.
Au sujet de la jetée qu'il avait construite devant son domicile à Barbara, M. Safadi a affirmé qu'il s'agissait d'un « brise-lame » pour lequel il avait reçu une autorisation en bonne et due forme en date du 11 avril 2013.
Au sujet du projet de Zeitouna Bay, M. Safadi a affirmé qu'il y était associé à des capitaux saoudien, américain, britannique et libanais, sans compter Solidere. « Généreux », M. Safadi a même affirmé que le projet avait permis la création de 700 emplois.


Notons qu'au cours de sa conférence de presse, M. Aridi a parlé des irrégularités qui affectent bon nombre d'autres projets, notamment celui de l'entretien des tunnels de l'autoroute sud, noyés par les eaux de pluie. Cet entretien n'a pas été fait cette année, en dépit de ceux qui affirment le contraire, a-t-il dit, mais ce contrat de gré-à-gré ne relève pas du département des TP, laissant entendre qu'à ce niveau aussi, l'argent public est dilapidé, quand ce n'est pas l'incompétence et l'imprévoyance qui sont en cause. De même, M. Aridi a affirmé que le dossier du torrent d'hiver al-Ghadir, dans la banlieue sud, dont le lit a été réduit à 3 mètres de largeur au lieu de 12, en raison des constructions illégales, ne relevait pas des TP, mais du ministère de l'Énergie. Il a également évoqué les scandales du périmètre de la marina de Dbayé et de la prison de Roumieh.

 

Lire aussi

Déballages, manœuvres et guéguerres

 

Pour mémoire

Avant la tempête, le Liban se mobilise pour venir en aide aux réfugiés syriens

Nabatieh-Beyrouth : récit d'une odyssée de 7 heures (texte et vidéo)

 

L'immunité politique du Liban est à son point le plus bas. C'est l'un des plus grands déballages de ces dernières années. Le ministre des Travaux publics du gouvernement démissionnaire, Ghazi Aridi, a accusé hier son collègue des Finances, Mohammad Safadi, d'avoir privé son département des crédits qui lui reviennent, au titre de l'expédition des affaires courantes, pour avoir refusé...

commentaires (7)

Faut-il vraiment respecter ces deux phenomenes en depit de leur couilloneries?!

Nicolas Rubeiz

22 h 20, le 10 décembre 2013

Tous les commentaires

Commentaires (7)

  • Faut-il vraiment respecter ces deux phenomenes en depit de leur couilloneries?!

    Nicolas Rubeiz

    22 h 20, le 10 décembre 2013

  • ça c'est somptueux ! il me revient a l'esprit une réponse que Hassan Nasrallah a fait lors d'un interview : "pouvez-vous gouverner seul le Liban ?" et notre Sayyed de repondre "nous pouvons gouverner un pays cent fois plus grand que le Liban !" veni, vidi mais pas vici notre matamore tout jaune.

    Lebinlon

    15 h 24, le 10 décembre 2013

  • Le style libanais bien connu de nos responsables chaque ministre en déclarant sa faillite attaque le coté privé de l'autre ministre . Justice mais ou es tu ?

    Sabbagha Antoine

    14 h 57, le 10 décembre 2013

  • Le plus frappant est que cet article est juste à côté de celui qui parle de Nelson Mandela.... Ben, on a ce qu'on a!

    Michel Fayad

    14 h 28, le 10 décembre 2013

  • Lynch them...

    GEDEON Christian

    10 h 53, le 10 décembre 2013

  • Plus degueu... que ca tu creves. Entretemps on trinque et on n'est pas plus avances. Faudrait les goudronner puis les plumer et les envoyer faire un tour (a pied) sur nos belles routes..

    Karim Tabet

    08 h 58, le 10 décembre 2013

  • Ou, quand la Merdouille se partage d'elle-même en deux parts égales....

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    03 h 14, le 10 décembre 2013

Retour en haut