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Liban - Rentrée scolaire

Les écoles publiques libanaises n’ont pas la capacité d’absorber tous les petits réfugiés syriens

À la veille de la rentrée scolaire du secteur public, lundi prochain, les enfants syriens attendent toujours de pouvoir s’inscrire. Selon leur niveau, ils seront scolarisés à l’école publique ou orientés vers des structures éducatives non formelles. Les autorités libanaises et l’ONU tentent de gérer l’urgence, cahin-caha. Car les fonds manquent, cruellement.

Ils sont 248 000 réfugiés syriens, âgés entre 4 et 17 ans, en âge d’être scolarisés dans les établissements libanais.            Mohammad Azakir/Reuters

La rentrée scolaire du secteur public a été fixée au 23 septembre. Mais les défis sont de taille, cette année, pour l’Éducation nationale, vu l’afflux continu des réfugiés de Syrie et la nécessité de scolariser le plus grand nombre possible d’enfants. L’école publique libanaise, avec une capacité maximale de 360 000 élèves, ne peut absorber la totalité des jeunes réfugiés. Malgré les mesures d’exception qu’elle envisage, comme la construction de structures préfabriquées, l’aménagement de deux horaires ou l’embauche d’enseignants contractuels. Et ce avec le soutien technique et financier du Haut Conseil pour les réfugiés des Nations unies (HCR) et du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef).
Non seulement cette école publique est aujourd’hui de plus en plus sollicitée par les familles libanaises, économiquement touchées par la crise syrienne, mais elle doit faire face à une situation d’urgence particulièrement difficile à gérer. Les Nations unies prévoient la présence sur le sol libanais, d’ici à la fin de l’année 2013, « de 550 000 enfants venus de Syrie dont 330 000 petits Syriens », affirme la porte-parole du HCR, Dana Sleiman. Or les fonds alloués par l’organisation ne permettent actuellement de scolariser que 200 000 enfants réfugiés.

Des disparités difficiles à gérer
Cette situation met un enseignement public déjà boiteux face à un nouveau défi. Celui « de préserver le niveau et la stabilité de l’école publique », comme l’indique à L’Orient-Le Jour le directeur général du ministère de l’Éducation, Fady Yarak. La stratégie du ministère de l’Éducation a, certes, évolué depuis le début de la crise syrienne. Mais elle demeure confrontée à la grande disparité entre les élèves libanais et syriens. Une disparité que les enseignants ne sont pas préparés à gérer. « L’année passée, l’école publique a scolarisé 33 000 petits réfugiés, sur 300 000 élèves, affirme-t-il. Nous avons décelé les difficultés d’une telle démarche. Nous avons aussi identifié les problèmes rencontrés par les élèves venus de Syrie. »
À titre d’exemple, M. Yarak mentionne les faiblesses éducatives des petits Syriens, au vu des différences entre les deux programmes éducatifs libanais et syrien. Il mentionne aussi la barrière de la langue, car les petits Syriens poursuivent leurs études en arabe exclusivement, même en mathématiques et en sciences. « Certains enfants n’ont jamais été scolarisés. D’autres ne vont plus à l’école depuis deux ans », ajoute-t-il. D’autres encore travaillent déjà, après avoir quitté l’école, pour soutenir leurs familles dans la misère.
Deux formes d’enseignement sont donc envisagées pour cette rentrée, avec l’aide d’experts étrangers dans l’éducation en situation de crise, dépêchés par les Nations unies : l’une formelle, au sein de l’école publique, destinée aux enfants capables de suivre le cursus scolaire libanais, et l’autre informelle, gérée par les ONG partenaires de l’ONU, réservée aux élèves qui présentent des lacunes et nécessitent un suivi adapté à leurs besoins. « Cette sélection se fera à l’issue d’un test d’entrée à l’école publique, lors des inscriptions », précise M. Yarak. Les enfants incapables de s’intégrer dans le système classique seront orientés vers un apprentissage accéléré, des cours de renforcement ou des structures pédagogiques. « L’Unicef estime que sur 200 000 petits réfugiés, seulement 50 000 ont la capacité de suivre un enseignement classique », note Nathalie Fiona Hamoudi, spécialisée dans l’éducation d’urgence au sein de l’organisation. Les 150 000 autres seront placés dans des structures éducatives qui leur assureront un enseignement de base, les mettront à l’abri de la rue et « constitueront une porte d’entrée vers d’autres secteurs, comme l’accès aux soins de santé et à la vaccination », précise l’experte.

Les classes le matin ou l’après-midi
Pour l’heure, la priorité est accordée à la rentrée scolaire qui est imminente. « Nous prenons en charge les frais d’enregistrement, le coût de l’élève et les livres scolaires des réfugiés et des élèves libanais, affirme M. Yarak. L’ONU se charge de la caisse du comité des parents d’élèves et du transport des petits réfugiés. » Quant aux inscriptions, elles vont bon train, mais seulement pour l’horaire du matin. « Nous mettrons en place les classes de l’après-midi en fonction des besoins, une fois les sessions de la matinée saturées, promet le directeur général du ministère de l’Éducation. Car la situation diffère d’une région à une autre. »
C’est la raison pour laquelle il est d’abord nécessaire de connaître le nombre d’élèves inscrits. « Une opération qui risque toutefois de prendre plus de temps que prévu, et qui pourrait retarder de plusieurs mois la rentrée scolaire de nombre de petits réfugiés », craint Mme Fiona Hamoudi. D’autant que l’école publique n’a pas encore ouvert les inscriptions aux petits Syriens. La priorité étant donnée aux élèves libanais qui peuvent s’inscrire depuis début septembre. « Sans parler des fonds qui manquent cruellement et qui ne permettent d’ouvrir que 70 écoles l’après-midi », fait remarquer Dana Sleiman.


Ils sont pourtant 248 000 réfugiés syriens, âgés entre 4 et 17 ans, en âge de scolarité, sur le territoire libanais, selon le HCR. Des réfugiés que l’Unicef voudrait voir scolarisés dans des classes mixtes, avec les élèves libanais, et non confinés entre eux. « Ce serait de la discrimination », observe Nathalie Fiona Hamoudi, reconnaissant toutefois les grandes disparités de niveau au sein d’une même classe. « Il faut aussi dire que la présence d’enfants syriens réveille des blessures anciennes » (résultant du temps de la tutelle exercée par Damas), constate-t-elle, faisant part de la nécessité « d’œuvrer à l’intégration des petits réfugiés ». Les résultats obtenus jusque-là sont encourageants, assure-t-elle, preuves à l’appui. « Le taux de décrochage des enfants syriens était de 70 % au début du processus. Il n’est plus que de 20 % aujourd’hui », dit-elle avec satisfaction.
Quoi qu’il en soit, les petits réfugiés ne seront pas nombreux à prendre le chemin de l’école, lundi prochain. Ils devront attendre leur tour, avant de trouver des places disponibles. Assurément, les autorités libanaises, au même titre que la communauté internationale, sont dépassées par la situation. Car le nombre de réfugiés augmente dramatiquement, bien plus vite que le financement des aides à la scolarité. Il n’en reste pas moins que d’ici à la semaine prochaine, le ministère de l’Éducation devra œuvrer, conformément à son objectif, pour qu’au moins 200 000 enfants syriens aient accès à l’éducation ou à une opportunité d’apprentissage pédagogique, jusqu’à leur retour dans leur pays.

 

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