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Société - Covid-19

Dans les prisons, « la situation est toujours contrôlable, mais il faut agir vite »

Des spécialistes mettent en garde contre la menace que pose pour la santé et la sécurité la propagation du coronavirus dans les établissements pénitentiaires.

Dans les prisons, « la situation est toujours contrôlable, mais il faut agir vite »

«  Le coronavirus envahit Roumieh. Une catastrophe similaire à celle du port. Halte à la négligence  », peut-on lire sur cette pancarte brandie par une proche d’un détenu à Roumieh, lors d’un sit-in observé hier devant le Palais de justice de Beyrouth pour réclamer une loi d’amnistie générale. Anwar Amro / AFP

Un vent de panique souffle dans la prison de Roumieh où treize cas de contaminations au coronavirus ont été détectés le week-end écoulé parmi les détenus et neuf autres parmi les gardiens. L’inquiétude a également gagné les familles des prisonniers qui ont observé hier un sit-in devant le Palais de justice de Beyrouth, réclamant l’adoption d’une loi d’amnistie générale pour « des motifs humanitaires et non politiques ». Elles ont mis en garde contre « une explosion au sein des prisons, similaire à celle du port de Beyrouth, le 4 août », au cas où des décès liés à la pandémie surviendraient.

Le Liban n’est pas le seul pays à avoir enregistré des cas de contaminations au Covid-19 dans ses prisons. À ce jour, quelque 200 000 cas ont été signalés dans des prisons en Italie, en France, en Grande-Bretagne, en Iran, aux Philippines, entre autres pays, dont près de 2 200 décès, selon les chiffres internationaux.

« On savait que le coronavirus allait potentiellement entrer dans les prisons du Liban, mais il fallait se préparer et prendre les mesures adéquates », estime Suzanne Jabbour, directrice exécutive de Restart (Centre pour la réhabilitation des victimes de la torture et de la violence) et vice-présidente du sous-comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (SPT) des Nations unies. « Déjà en mars, Restart avait présenté aux autorités concernées un document sur les mesures pour la prévention du coronavirus dans les prisons et centres de détention, explique-t-elle à L’Orient-Le Jour. Malheureusement, le ministre démissionnaire de l’Intérieur, Mohammad Fahmi, avait alors estimé avoir pris toutes les mesures nécessaires. » Ce qui n’a pas été fait, selon Mme Jabbour, qui souligne que « l’État n’a fait que renforcer les mesures contraignantes, interdisant même aux associations de la société civile d’accéder aux prisons, sans pour autant créer des alternatives, une plate-forme en ligne à titre d’exemple, qui permettrait aux détenus d’entrer en contact avec leurs avocats, des psychologues, des médecins… ».

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Pour elle, la pandémie de Covid-19 n’a fait que « mettre encore plus en exergue le manque de soins médicaux dans le secteur pénitentiaire et l’échec de la justice pénale à réduire la surpopulation dans les prisons, qui reste le problème le plus dangereux et qui aurait dû d’ailleurs constituer une priorité ». « Le plan de réponse au Covid-19 dans les prisons aurait dû faire partie du plan national de réponse à la pandémie, martèle Mme Jabbour. Mais les institutions carcérales en ont été exclues. »

État d’urgence sanitaire

Aujourd’hui, Mme Jabbour tire une fois de plus la sonnette d’alarme, insistant sur la priorité qui doit être accordée à ce sujet, ainsi que sur la nécessité de réhabiliter des centres et des hôpitaux pour accueillir les détenus qui auraient contracté le virus.

Contactée par L’OLJ, une source sécuritaire assure qu’un centre d’isolement à la prison de Roumieh a été mis en place en coopération avec le ministère de la Santé, le Comité international de la Croix-Rouge et le bureau régional de l’Organisation mondiale de la santé, soulignant que les détenus ayant été contaminés au coronavirus y sont isolés. Selon cette source, un autre bâtiment a également été équipé à Roumieh. Elle précise par ailleurs que l’hôpital gouvernemental de Dahr el-Bachek a été réhabilité pour recevoir d’éventuels patients et des départements dans plusieurs autres hôpitaux gouvernementaux sont en voie de préparation.

Selon la même source, un des treize détenus a été hospitalisé pendant vingt-quatre heures, « mais il est retourné à Roumieh et son état est stable ».

Appelant à « décréter l’état d’urgence sanitaire, légal et sécuritaire dans les prisons », Mme Jabbour met en garde contre « une nouvelle catastrophe si on a des décès des suites du coronavirus parmi les prisonniers ».

C’est ce craint également Omar Nachabé, spécialiste des prisons au Liban et auteur de trois ouvrages sur cette question. « Si un prisonnier décède des suites du coronavirus, cela provoquera une insécurité dans plusieurs régions, prévient-il. Les familles ne vont pas rester inactives alors que leurs proches sont incarcérés et que nombre d’entre eux purgent une peine de quelques années. »

Pour le spécialiste, la détection de cas de coronavirus dans la prison « va y créer une confusion », poursuit-il. « Les prisonniers vont avoir peur de mourir, ce qui va les pousser à créer des problèmes, d’autant qu’ils n’ont plus rien à perdre, avance-t-il. Il faut un traitement rapide au problème. Dans l’immédiat, celui-ci consiste à réduire la surpopulation dans les prisons, sachant que la loi d’amnistie générale n’est certes pas la solution. Il faudrait par contre libérer les personnes arrêtées qui attendent d’être jugées et qui sont, conformément à la Constitution, innocentes jusqu’à ce qu’elles soient jugées coupables. De plus, il faut installer un hôpital de campagne dans les cours des prisons qui soient équipés de respirateurs et dotés d’une équipe de spécialistes. Enfin, les prisonniers à la santé déjà fragile doivent être mis en isolement pour les protéger du virus et il faut améliorer les conditions hygiéniques des prisons qui sont catastrophiques. » Et M. Nachabé d’assurer : « La situation est toujours contrôlable, mais il faut agir vite pour éviter qu’elle ne se dégrade. »

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Le bâtonnier de l’ordre des avocats de Beyrouth, Melhem Khalaf, a lui aussi appelé à lutter contre la surpopulation carcérale, estimant que la justice devait accélérer certaines remises en liberté, à l’exception des crimes particulièrement graves ou liés au « terrorisme ». Dans une interview accordée à l’AFP, il a réclamé aux autorités des « grâces spéciales », notamment pour les détenus malades. Dans la prison, « le virus est semblable à une bombe humanitaire que personne n’est capable de prendre en charge », a conclu Me Khalaf.

Un vent de panique souffle dans la prison de Roumieh où treize cas de contaminations au coronavirus ont été détectés le week-end écoulé parmi les détenus et neuf autres parmi les gardiens. L’inquiétude a également gagné les familles des prisonniers qui ont observé hier un sit-in devant le Palais de justice de Beyrouth, réclamant l’adoption d’une loi d’amnistie générale pour...

commentaires (1)

C'EST PEUT ETRE CONTROLABLE . MAIS CE QUI NE L'EST CERTAINEMENT PAS C'EST CETTE FACON CETTE LEGERETE CETTE INCAPACITE A VOIR PLUS LOIN QUE LE BOUT DE LEUR NEZ. CELA FAIT DES MOIS QU'ON LES ALERTE A CE SUJET, EN VAIN. ET ILS INSISTENT A VOULOIR RESTER AU POUVOIR. ILS TIENNENT A ENFONCER ENCORE PLUS PROFONDEMENT LA NATION DANS UN ENFER QU'ILS SONT SEULS A POUVOIR EN RECHAPPER.

Gaby SIOUFI

10 h 16, le 15 septembre 2020

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Commentaires (1)

  • C'EST PEUT ETRE CONTROLABLE . MAIS CE QUI NE L'EST CERTAINEMENT PAS C'EST CETTE FACON CETTE LEGERETE CETTE INCAPACITE A VOIR PLUS LOIN QUE LE BOUT DE LEUR NEZ. CELA FAIT DES MOIS QU'ON LES ALERTE A CE SUJET, EN VAIN. ET ILS INSISTENT A VOULOIR RESTER AU POUVOIR. ILS TIENNENT A ENFONCER ENCORE PLUS PROFONDEMENT LA NATION DANS UN ENFER QU'ILS SONT SEULS A POUVOIR EN RECHAPPER.

    Gaby SIOUFI

    10 h 16, le 15 septembre 2020

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