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Liban - Éclairage

Le financement du tribunal et la cohésion gouvernementale


Entre payer ou non la part du Liban dans le financement du TSL, le Premier ministre Nagib Mikati a choisi de jouer la carte du temps. Ce dossier étant inclus dans la discussion du projet de loi sur le budget, le Premier ministre compte bien le faire passer en dernier et permettre auparavant aux ministres de discuter chaque détail du projet en prenant tout le temps nécessaire pour cela. C’est d’ailleurs une méthode classique au Liban, lorsque vous vous trouvez face à un obstacle qui paraît insurmontable, prenez votre mal en patience et le temps se chargera d’arrondir les angles. C’est aussi le conseil judicieux donné par le président de la Chambre Nabih Berry à Mikati, dans l’espoir que d’ici à décembre, la situation régionale et internationale aura évolué, permettant une issue à ce problème.
C’est que la question du paiement de la part du Liban dans le financement du TSL pose un véritable problème et menace la cohésion gouvernementale. Voulant rassurer la communauté internationale et desserrer l’étau qui encerclait son gouvernement, le Premier ministre avait promis à ses interlocuteurs occidentaux, au cours des entretiens qu’il a eus avec eux, que le Liban paierait sa part. Il l’avait même déclaré publiquement. Au début, ces déclarations n’avaient pas suscité de réaction chez le Hezbollah. Seul le général Michel Aoun avait clairement exprimé son refus de financer le TSL, par principe, parce que, avait-il dit, la formation de ce tribunal s’est faite sans respecter les règles constitutionnelles libanaises. Mais au fur et à mesure que l’échéance s’est rapprochée, le Hezbollah a commencé à envoyer des signaux montrant son opposition au financement par le gouvernement d’un tribunal qu’il considère dirigé contre lui et s’inscrivant dans un plan américano-israélien destiné à briser la résistance au Liban.
Croyant qu’il finirait par avoir gain de cause et sachant que son gouvernement est une nécessité à la fois interne, régionale et externe, le Premier ministre a campé sur ses positions, allant même jusqu’à menacer, via « les fameuses sources proches du Sérail », de présenter sa démission si le financement était rejeté par la majorité des ministres. La manœuvre avait déjà fonctionné à deux reprises, lors des discussions pour l’adoption du plan de relance de l’électricité et lors du vote au Conseil de sécurité d’un projet de sanctions contre la Syrie.
Un vif débat a aussitôt eu lieu parmi les piliers de la nouvelle majorité entre ceux qui estimaient qu’il fallait aider le Premier ministre coûte que coûte et ceux qui se demandaient à quoi servait ce gouvernement, en principe formé de la nouvelle majorité, mais qui en réalité maintenait en place le vieux système et ne prenait aucune décision en faveur du 8 Mars. Ceux-là mettaient en avant le fait que le dossier des faux témoins n’a ainsi pas encore été ouvert, que le système Hariri-Siniora au sein de l’administration est encore en place, que même les symboles de ce système n’ont pas été touchés et enfin que le processus des nominations avance au compte-gouttes... En un mot, le gouvernement est celui du Hezbollah et de la majorité lorsqu’il s’agit de le critiquer, mais dans les faits, il n’y a pas réalisé un changement notable. « Les faucons » de la majorité estimaient ainsi qu’il n’était plus possible de faire des concessions au Premier ministre sous prétexte que sa présence est un atout auprès de la communauté internationale et qu’il faut l’aider à se maintenir en place en évitant toute décision qui pourrait irriter la rue sunnite et la braquer contre lui.
Il a pu ainsi apporter des modifications mineures au plan de l’électricité pour donner le sentiment à l’opinion publique qu’il n’a pas cédé au ministre du CPL et montrer une certaine marge de manœuvre au Conseil de sécurité. Mais la question du TSL est autrement plus vitale, notamment pour le Hezbollah qui mène depuis des mois, voire des années, campagne contre ce tribunal. Après maintes concertations, et toujours à l’aide du confortable subterfuge « des sources proches de... », la réponse de la majorité a été plus ou moins claire dans le sens d’une détermination tacite à faire chuter le gouvernement si le prix est le financement du TSL. Aux yeux de la majorité, la parade est aisée. Il s’agirait de soumettre la question au vote des ministres et la majorité de ceux-ci (notamment les ministres du Hezbollah, du CPL et d’Amal qui forment un bloc de 17) voterait contre et aboutirait ainsi à son rejet. Mikati et Joumblatt voteraient en faveur du financement mais devraient s’incliner devant la volonté de la majorité des membres du gouvernement, selon les règles démocratiques. Le Premier ministre peut-il accepter un tel scénario ? La question reste posée et le gouvernement a quelques semaines pour trouver une réponse convaincante à l’adresse de ses partisans, ainsi que de ses interlocuteurs régionaux et internationaux. Mais de plus en plus de voix ministérielles laissent entendre que le TSL reste une ligne rouge pour le Hezbollah qui craint qu’en acceptant son financement par le gouvernement (même si ses ministres se retirent de la séance destinée à l’examen de ce dossier, scénario qui avait été évoqué un moment), il soit considéré comme ayant implicitement reconnu ce tribunal. Dans les coulisses gouvernementales, le sujet est désormais évoqué ouvertement, mais tous les protagonistes préfèrent que le débat reste discret pour éviter sa politisation et surtout qu’il ne devienne un sujet de polémique mettant ainsi en danger les solutions possibles que certains médiateurs gardent peut-être encore en réserve...
Entre payer ou non la part du Liban dans le financement du TSL, le Premier ministre Nagib Mikati a choisi de jouer la carte du temps. Ce dossier étant inclus dans la discussion du projet de loi sur le budget, le Premier ministre compte bien le faire passer en dernier et permettre auparavant aux ministres de discuter chaque détail du projet en prenant tout le temps nécessaire pour cela. C’est...
commentaires (6)

Faites attention les irresponsables élus, car si vous ne financez pas le TSL vous ouvrez la boite de Pandore et ce qui en sortira ? Des dragons, des Hydres et des Hybrides. La raison doit prévaloir sur les sentiments. Les intérêts vitaux du pays doivent prévaloir sur les caprices vicieux des têtes brûlées. Anastase Tsiris

Anastase Tsiris

13 h 29, le 19 octobre 2011

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Commentaires (6)

  • Faites attention les irresponsables élus, car si vous ne financez pas le TSL vous ouvrez la boite de Pandore et ce qui en sortira ? Des dragons, des Hydres et des Hybrides. La raison doit prévaloir sur les sentiments. Les intérêts vitaux du pays doivent prévaloir sur les caprices vicieux des têtes brûlées. Anastase Tsiris

    Anastase Tsiris

    13 h 29, le 19 octobre 2011

  • Pour revenir au machin, je crois qu'il y a une mauvaise communication de l'info sur sa credibilite. Ce machin n'est ni une juridiction onusienne ni libanaise, mais un organe conventionnel entre l'onu et le gouvernement libanais, pas l'etat libanais. Jusqu'a present cette entite hybride n'a pas respecte les normes du droit international mais a suivi un agenda politique. Fort etrangement le machin a rendu plusieurs rapports au secretaire general de l'onu sur ses methodes et sa gestion, mais ne les a jamais communique au gouvernement libanais, des lors que celui ci a change de couleur politique,il est en definitive toujours a la recherche de sa legitimite, alors que les partis de la majorite demande sa dissolution.Quant a cassese, vous croyez a sa demission pour raison de sante ? tout le monde politico judiciaire connait ses engagements anterieurs.

    Jaber Kamel

    10 h 45, le 19 octobre 2011

  • Un gouvernement funambule, ou jongleur, comme on veut , mais un gouvernement vivant qui réfléchit,se concerte se teste, border line , et qui sortira de son chapeau le lapin ou la colombe. On avait pas vu ça depuis belle lurette au Liban. C'est l'impression que j'ai en lisant cet article, une équipe à la recherche de son équilibre en permanence et qui se fout du qu'en dira t on pour plaire ou pas aux "autres", qui n'auront qu'à attendre que la décision sorte , décidée par des libanais pour des libanais. Mon avis personnel sur le machin, il ne faut pas simplement le rejetter, mais le brûler et disperser ses cendres dans le litani.

    Jaber Kamel

    03 h 41, le 19 octobre 2011

  • Le TSL non financé et non renouvelé, les 4 suspects menant la belle vie, les assassins des martyrs morts et vivants se promenant un peu partout dans le monde sans remords, fiers de leurs exploits parce qu'ils on éliminés les défenseurs de la souveraineté, la liberté l'indépendance et l'intégrité libanaises : vive la jungle qu'est le Liban!

    Bardawil Michel Charles

    02 h 20, le 19 octobre 2011

  • Le bourreau ici le Hezbollah, et le souverain gouvernement forment un bon couple. Ils assurent de concert la cohésion de la société. Refus ou acceptation du TSL tout finira dans le monde de l’ oubli dans un pays qui se veut toujours amnésique dans le monde du financement . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    01 h 40, le 19 octobre 2011

  • - - A 17 au sein du gouvernement , donc au conseil des ministres , ils diront NO , NO et Renault au financement du TSL et aussi et surtout , à son renouvellement ? C'est ça la démocratie , respectons la décision de la majorité . L'occident comprendra , on s'en fou si les autres ne comprendront pas . Pour le PM Mikati , il le sait plus que quiconque , que personne n'est indispensable et surtout au Sérail .

    JABBOUR André

    23 h 55, le 18 octobre 2011

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