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Liban - Sécurité

L’épée de Damoclès pend au-dessus de Ersal

Menaces de mort, tentative d'assassinat et zakâte imposée par Daech aux propriétaires terriens.

Les menaces de mort proférées contre une dizaine de figures publiques et civiles à Ersal se sont avérées sérieuses et auraient commencé à être mises à exécution.
Mercredi soir, vers 22 h, deux inconnus à moto ont tiré en direction de l'un des moukhtars nouvellement élu, Mohammad Allouli, le blessant grièvement à la mâchoire. Ce dernier, qui a subi depuis plusieurs opérations chirurgicales, a échappé de justesse à la mort. Réputé pour ses « liens amicaux » avec toutes les parties et apprécié pour ses services rendus, le moukhtar figurait sur une liste de dix personnes, dont le président de la municipalité, Bassel Houjeiri, en plus de 5 autres Libanais et 3 Syriens, qui ont tous reçu des menaces de mort il y a un mois environ.

Hier, M. Houjeiri a déploré cette nouvelle « tentative de discorde » dans cette localité sensible qui subit, depuis 2011, les débordements de la crise syrienne. « Ersal ressemble à un navire. S'il coule, il coulera avec tout le monde », a-t-il dit, usant d'une métaphore puissante pour signifier que les Syriens venus s'y réfugier paieront le pris autant que les Libanais si la dégradation de la situation sécuritaire devait se poursuivre.
Abritant près de 120 000 déplacés syriens, soit trois fois le nombre de ses habitants, et se trouvant à la lisière d'un no man's land (le jurd), où des combats opposent régulièrement l'armée libanaise et le Hezbollah aux forces jihadistes, repoussées dans cette zone, le village est pris en tenailles. Depuis plusieurs années, il subit les contrecoups de ces affrontements, aggravés par l'ingérence du Hezbollah dans la guerre syrienne. Les assassinats et opérations de vendetta de tout genre se succèdent et les habitants se sont plaints à plus d'une reprise d'une « mainmise syrienne », notamment armée, sur le village.

(Pour mémoire : « Bombardements intenses » de l'armée contre les jihadistes dans le jurd de Ersal)

 

Accusations de traîtrise
« Des voitures sans immatriculation dotées de vitres fumées sillonnent nuit et jour le village sans être inquiétées », confie à L'Orient-Le Jour un habitant du village sous le couvert de l'anonymat. Fait inédit, le président de la municipalité a décrété hier une interdiction de circuler aux réfugiés syriens entre 22h et 7h du matin, les appelant à respecter cette consigne « qui doit les protéger autant que les habitants ».

Le village, qui cherche encore à se remettre des affrontements qui ont opposé en 2013 l'armée à des éléments jihadistes (EI et al-Nosra), est devenu l'otage d'une situation de polarisation politique et militaire inextricable.
Ayant gagné les élections municipales contre l'équipe de Ali Houjeiri, alias Abou Aajineh, proche du courant du Futur, les nouveaux locataires de la municipalité ont amorcé depuis une politique d'ouverture envers toutes les parties dans le but de « calmer les tensions et de trouver un modus vivendi entre les habitants et les réfugiés », confie à L'OLJ M. Houjeiri. Depuis, les membres de la municipalité sont pointés du doigt par leurs adversaires politiques locaux, réputés proches de « l'opposition syrienne » et de certains milieux islamistes. « Certains les ont mêmes assimilés aux forces du 8 Mars, notamment durant la campagne municipale. »

Au lendemain du scrutin, les visites effectuées par les membres du nouveau conseil municipal aux différentes parties politiques, sécuritaires et militaires, dont le commandant en chef de l'armée, « leur ont valu des accusations de traîtrise », confie un membre de la municipalité, qui affirme que les membres ne seront pas pour autant intimidés. La source assure que leur réunion avec le général Jean Kahwagi avait pour objectif de « consolider la convivialité dans le village, mais aussi de trouver un règlement aux problèmes économiques désastreux dont souffre cette localité ».

À maintes reprises, les habitants du village, qui continuent de payer à ce jour un prix élevé pour leur accueil d'une population importante de déplacés – « elle-même désormais prise dans l'engrenage de la violence et des règlements de comptes » – ont réclamé une présence plus effective de l'armée, confie un habitant en précisant que des règlements de comptes ont souvent lieu « entre Syriens ».

(Pour mémoire : Nasrallah : Si nous n'étions pas présents en Syrie, les attentats-suicide auraient été quotidiens)

 

Asphyxie économique
Livrés à eux-mêmes et à leurs démons, les habitants de Ersal, dont seule la périphérie est contrôlée par l'armée, souhaitent un retour plus effectif de l'État, notamment des patrouilles régulières à l'intérieur du village, pour mettre fin à l'anarchie régnante. « Le problème, confie à L'OLJ Bassel Houjeiri, c'est qu'un déploiement de la troupe à l'intérieur de Ersal risque de mettre en péril la population civile et même les réfugiés, dont une partie importante veut vivre en paix et pouvoir manger à sa faim ». À cette occasion, Bassel Houjeiri tire la sonnette d'alarme et exhorte l'État à trouver une solution à l'asphyxie économique dont souffre le village. En effet, plus de 400 personnes vivent des carrières et de leurs terrains agricoles situés dans le no man's land, où sont implantés aujourd'hui l'État islamique et le Front al-Nosra.

Contacté en soirée, l'un des habitants raconte cet épisode surréaliste qui s'est produit avec ses deux frères. S'étant aventurés à aller inspecter leurs vastes terrains plantés de cerisiers dans la localité de Sallaha, du côté de Wadi Martabiyya, dans la partie nord du jurd, ils se font arrêter à un barrage où se trouvaient deux éléments de l'EI. Ces derniers leur enjoignent de « ne plus mettre le pied dans les champs de cerisiers à moins de payer une zakâte (aumône légale requise en islam) sur le total des ventes des caisses de cerises ». « Ils ont même exigé de voir les factures pour s'assurer que les comptes sont bons », s'offusque la source.
Pour le président de la municipalité, cette situation ne peut pas continuer, et les habitants qui comptaient sur les revenus en provenance de leur culture ou de l'extraction et du travail de la pierre n'ont plus aucune rentrée. « L'État doit soit trouver une solution pour leur permettre d'accéder à leurs terrains, soit leur accorder des compensations », a-t-il dit.

 

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ERSAL PAIE LE PRIX DES INTERVENTIONS IRRESPONSABLES AU MEPRIS DE L,ETAT ET DU PEUPLE LIBANAIS PAR LA MILICE IRANIENNE...

LA LIBRE EXPRESSION

07 h 48, le 23 juillet 2016

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Commentaires (1)

  • ERSAL PAIE LE PRIX DES INTERVENTIONS IRRESPONSABLES AU MEPRIS DE L,ETAT ET DU PEUPLE LIBANAIS PAR LA MILICE IRANIENNE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 48, le 23 juillet 2016

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