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Liban - Élections municipales

À Tyr, le plébiscite chiite et la première « opposition »

Les chrétiens boycottent le vote municipal et réclament leur droit à une meilleure représentation.

Pour le troisième round des élections municipales, la ville de Tyr était le théâtre d'une bataille opposant une liste appuyée par le tandem Amal- Hezbollah à des candidats indépendants. Si les résultats étaient prévisibles dans cette ville du fait de l'hégémonie du duopole chiite (en particulier le mouvement Amal), il s'agit pour certains d'un test de la fidélité de l'électorat chiite à ces deux formations politiques majoritaires.

L'hommage à Berry et Sadr
Dans la ville de Tyr, un grand fief du mouvement Amal de Nabih Berry, près de 45 % des électeurs ont pris part au scrutin pour « remercier » le président de la Chambre et « exprimer leur fidélité » à l'imam disparu Moussa Sadr.
Interrogés sur place, les électeurs se sont félicités, via L'Orient-Le Jour, du caractère calme et démocratique de la bataille pour les 21 sièges du conseil municipal de la ville. « Nous venons exercer notre droit dans un climat calme parce que Tyr devrait rester fidèle à l'imam Moussa Sadr, comme le veut le président (de la Chambre) Nabih Berry », dit Mahmoud Hussein Khalil, un cadre d'Amal. À son tour, Ali estime que « Tyr vit aujourd'hui (hier) un combat démocratique », avant de déclarer : « À travers ce scrutin municipal, les gens récompensent M. Berry de sa contribution significative à l'évolution de la ville et du caza. » Un autre homme rencontré dans un bureau de vote va plus loin en disant : « Quoi que nous fassions, nous ne pourrons pas remercier M. Berry comme il le mérite, surtout avec le soin particulier qu'il accorde à la ville. » La dimension politique du vote des électeurs de Tyr peut être facilement remarquée à travers les témoignages de certains votants axés sur l'appartenance partisane. Ainsi, Kamal a fait savoir qu'il a voté conformément à ses orientations politiques, alors que Mohammad déclare : « J'ai voté conformément aux directives de sayyed Hassan Nasrallah et du président Nabih Berry, et je crois qu'il serait difficile à la liste opposée de gagner ou même de percer celle "de la Fidélité et du Développement" appuyée par le Hezbollah et le mouvement Amal ».


(Lire aussi : Au Liban-Sud, les indépendants et les communistes ont fait entendre leurs voix face au duopole chiite)


À l'image des électeurs, le député Abdel Majid Saleh (Amal) a souligné le caractère calme de la journée électorale, tout en indiquant que « la compétition est un signe de démocratie ». Commentant les thèses selon lesquelles la formation de Nabih Berry monpolise les sièges de moukhtars et du conseil municipal, M. Saleh a affirmé que « les appels du secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah et du président de la Chambre Nabih Berry ont engendré une bonne affluence des électeurs dans les bureaux de vote. Selon le député, « ce sont des appels politiques par excellence pour « protéger la Résistance, qui est devenue, depuis longtemps, une cible sur le double plan politique et de sécurité ».
À son tour, Nassif Seklaoui, un cadre d'Amal, a insisté à l'issue d'une tournée dans les bureaux de vote sur « l'importance de l'appel plébiscitaire lancé par le Hezbollah et Amal, en vue de la conformité à l'entente et à la méthode de la Résistance ».

Les indépendants sont là aussi
En dépit de leur forte présence à Tyr, les deux formations majoritaires chiites n'ont pas pu célébrer une victoire d'office. Leur liste qui se veut consensuelle a dû faire face, pour la première fois, à des candidats indépendants soutenus par l'ancien ministre du Travail Charbel Nahas et l'ancien ambassadeur Khalil el-Khalil, connu pour son opposition de longue date à l'hégémonie du tandem Amal-Hezbollah dans la ville. Dans d'autres villages du caza de Tyr, l'alliance des deux partis chiites a affronté des listes appuyées par les communistes, les indépendants et les familles. C'est le cas notamment de Jwaya, Bazouriyyeh, Srifa et Klaïlé.


(Lire aussi : Les élections entachées de nombreuses infractions, constate la Lade)


Interrogé par L'OLJ, M. Khalil a mis en relief un cas de refus des actions du conseil municipal sortant « qui n'a pas accordé la priorité aux intérêts des habitants de Tyr ». « J'ai voulu soutenir une liste incomplète de 13 personnes et regroupant tous les indépendants pour donner l'opportunité aux électeurs de Tyr de faire entendre leurs voix, et de réduire l'effet du rouleau compresseur qui leur est imposé depuis des années », a-t-il ajouté avant de poursuivre: « Il est grand temps de commencer à mettre fin à cette fausse orientation. C'est pour cette raison que j'estime que la liste des indépendants a gagné par le simple fait que ses membres se sont portés candidats. »
Pour sa part, la candidate indépendante Fadia Audi a indiqué que « les indépendants sont soutenus par les familles, et c'est à la demande de ces dernières qu'ils ont présenté leurs candidatures ». À L'OLJ, Mme Audi a déclaré : « Le plus important n'est pas de gagner, mais de laisser une trace, de faire entendre une nouvelle voix. » « Nous voulions empêcher l'élection d'office de la liste des partis pour exprimer notre opposition à ce que nous avons vécu pendant les six dernières années, et nous voulons demander des comptes », a-t-elle encore dit.

 

(Lire aussi : Municipales : paroles d'électeurs au Liban-Sud et à Nabatiyé)

 

Le boycott chrétien
Aux côtés de l'électorat chiite massif, le vote chrétien n'en est pas moins important. Si les chrétiens ont pu, lors des scrutins municipaux précédents, faire pencher la balance en faveur de l'une des listes en lice pour le conseil municipal, ils semblent cette fois beaucoup plus intéressés par les élections de moukhtars, où ils estiment « pouvoir faire une différence », et sont même allés jusqu'à « boycotter les élections municipales ».
« Nous avons élu un moukhtar en fonction de notre appartenance politique, mais nous ne voulons pas voter pour les municipales parce que cela ne nous intéresse pas et nous ne pouvons pas changer les choses », a indiqué Maroun à L'OLJ. « La municipalité ne me concerne pas car je n'ai pas, en tant que chrétienne, ma place en son sein », indique Jeannette avant d'ajouter : « Face à cet état des choses, je me suis contentée d'élire deux des trois candidats en course pour les sièges de moukhtars catholiques dans la "hara massihiyeh" (le quartier chrétien). » Une jeune dame interrogée aussi dans le quartier chrétien a insisté sur « le droit des chrétiens de Tyr à être représentés par le vice-président du conseil municipal, sans quoi nous continuerons à boycotter les municipales », souligne-t-elle.
Notons enfin que ce troisième round des municipales a été marqué par une série d'irrégularités à Tyr, dont notamment la tentative de vote avec un passeport dont le délai a expiré ou encore le retard de certains électeurs à entrer derrière l'isoloir.

 

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