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Culture - Visite guidée

Beyrouth, cœur palpitant de l’art arabe

C'est une exceptionnelle collection d'art moderne et contemporain arabe qu'ont constituée Ramzi et Bassel Dalloul. Plus de 3 500 pièces d'artistes libanais, irakiens, palestiniens, syriens, tunisiens, et qui comprend nombre d'œuvres majeures. Le tandem père-fils veut maintenant l'ouvrir au public. Avec un projet de musée en vue.

Parmi les Nabil Nahas de la collection Dalloul, une « Fractale » (en face) et la magnifique « Mashallah » (à droite).

De Paul Guiragossian à Aymane Baalbacki, en passant par de magnifiques Nabil Nahas; de Faëq Hassan (l'un des pionniers de l'art irakien) à Dia el-Azzaoui; de Sleiman Mansour (l'un des plus importants artistes palestiniens) ou encore Samia Halaby à Amer Shomali (artiste visuel palestinien, auteur du fameux The wanted 18 ) ou Katanani; de Mukhtar (le père de la sculpture moderne égyptienne) à Adam Hnein, Salwa Raouda Choucair et Alfred Basbous... Toute la garde et l'avant-garde de l'art de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord se retrouvent dans ce qui est, sans doute, la plus grande collection privée d'art arabe moderne et contemporain.

3500 pièces d'artistes du Liban, d'Irak, de Palestine, d'Égypte, de Syrie, de Jordanie, de Tunisie, du Maroc, d'Arabie saoudite, du Soudan, du Yémen, etc., entreposées dans 4 appartements de 450 m2 chacun d'un même immeuble beyrouthin. Une collection initiée dans les années soixante par Ramzi Dalloul (ancien économiste aux Nations unies) qui a sélectionné avec soin les peintures et sculptures des pionniers de l'art moderne arabe. Aujourd'hui gérée par son fils Bassel (PDG d'une société de télécommunications au Caire), qui l'enrichit en permanence par des acquisitions d'œuvres de grandes signatures contemporaines. Arabes, évidemment. Tout en menant en parallèle une collection plus personnelle de street, urban et pop art américain.

Le choix de Beyrouth

«J'ai repris la collection de mon père par goût, mais aussi pour l'aider à réaliser son rêve de la voir un jour abritée dans une fondation ou un musée d'art arabe moderne et contemporain, qu'il voudrait édifier au cœur de Beyrouth. Nous sommes d'ailleurs en pourparlers avec Solidere à cet effet. Et nous espérons pouvoir concrétiser ce projet d'ici à cinq ans au plus tard, confie Bassel Dalloul. Mon père tient à le construire au Liban, et cela en dépit de toutes les sollicitations en provenance des émirats du Golfe, du Maghreb, d'Égypte et d'ailleurs. Parce que Beyrouth est historiquement la capitale culturelle du monde arabe.»
Constituée en majorité de peintures et de sculptures, la collection arabe des Dalloul s'est étoffée récemment de quelques installations, photographies et vidéos. Elle témoigne d'un goût sûr couplé d'une approche muséale dans le choix de pièces charnières des artistes qu'ils collectionnent.

3 500 tubes de rouge à lèvres

«Peu de gens se rendent compte de la grande variété artistique qui existe dans le monde arabe», déplore le fils. «C'est en constituant notre collection qu'on s'en est aperçu. Et c'est justement pour faire apprécier cette diversité de courants et de styles au plus grand nombre que nous envisageons la création de ce musée», affirme ce businessman quadragénaire, né à New York, et qui se définit comme un « geek américano-arabe».
Tout féru d'informatique qu'il soit, Bassel Dalloul dévoile, au cours de la visite guidée, une véritable sensibilité artistique et une profonde connaissance des œuvres amassées, dont il raconte en détails les origines et la petite histoire. Souvent à connotation politique, lui fait-on remarquer.
«La politique est omniprésente dans notre monde arabe. Elle se reflète donc forcément dans le travail des artistes de cette région», rétorque-t-il, en désignant The Icon, le portrait en 3500 tubes de rouge à lèvres de la révolutionnaire Palestinienne Leyla Khaled signé Amer Shomali. Ou encore The Pixelled Cow, une sculpture représentant une vache, composée en 52000 cubes de bois, par le même artiste, en référence à un épisode de l'intifada palestinienne (18 vaches cachées dans les maisons par les Palestiniens de Beit Sahour en Cisjordanie qui voulaient démarrer une petite industrie laitière en dépit de l'interdiction israélienne).

« Mashallah ! »

Ce qui frappe aussi dans cette collection, c'est sa présentation quasi muséale. Même entreposées en dépôt, les œuvres sont réparties dans les différentes salles en fonction de leur origine ou d'un thème précis. Ainsi, outre «l'étage libanais» et les «salles» égyptiennes, palestiniennes, irakiennes, maghrébines ou tunisiennes, une «sous-collection» d'œuvres réalisées par des artistes irakiens autour du fameux lancer de savate à la tête de George Bush occupe une pièce individuelle. Dans une pièce à côté, une belle série de toiles de la Libanaise Taghreed Dargouth orne les quatre pans de murs. «C'est une des valeurs montantes sur lesquelles je mise», avoue Bassel Dalloul, en ajoutant, admiratif: «Elle a un coup de pinceau d'une vigueur quasiment masculine.» Idem pour les impressionnants portraits photographiques des derniers eunuques gardiens sacrés de la tombe du Prophète, qui semblent accueillir le spectateur dans l'intimité de leur antre, avec des regards provocateurs et narquois. «J'aime dialoguer avec les œuvres», assure l'esthète. Il a d'ailleurs installé des banquettes dans toutes les pièces pour pouvoir «s'asseoir et contempler durant des soirées entières, l'une ou l'autre des toiles, un verre à la main», dit-il. Des toiles dont il se charge lui-même de changer l'accrochage régulièrement, «de manière à pouvoir les redécouvrir». Les seules qu'il ne décroche jamais et dont il ne pourrait se séparer pour rien au monde? «Les peintures de Guiragossian, d'Aymane Baalbacki et toutes les Nabil Nahas que je possède», répond sans hésiter l'heureux possesseur d'un exceptionnel diptyque d'étoiles de mer (de Nabil Nahas) tout simplement intitulé Mashallah!.


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commentaires (2)

Merci pour cet article! Question: peut-on voir/visiter cette collection? Est-elle ouverte au Public? Merci d'avance.

Maalouf Josiane

13 h 51, le 18 janvier 2016

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Commentaires (2)

  • Merci pour cet article! Question: peut-on voir/visiter cette collection? Est-elle ouverte au Public? Merci d'avance.

    Maalouf Josiane

    13 h 51, le 18 janvier 2016

  • Merci a ce palestinien qui veut offrir a Beyrouth sa collection. Quant a nos Libanais qui ont fait beaucoup d'argent sur notre dos, ils font quoi de leur argent? des milices (qu'on appelle au Liban parti politique), des comptes bancaire en suisse pour leur famille, des orgies.

    George Khoury

    10 h 43, le 18 janvier 2016

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