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Lifestyle - Un peu plus

Another one bites the dust

Les dix plaies d'Égypte. Les 100 plaies du Liban. Ils ont eu le Nil changé en sang. Nos rivières et notre mer sont devenues nauséabondes. Les grenouilles recouvrirent l'Égypte. Nous avons les rats qui skient sur les montagnes de poubelle. Moustique et poux ? Nous aussi. Mouches et taons ? Nous aussi. La mort des troupeaux ? On mange de la viande avariée. Furoncles ?
Nous sommes à la limite d'une épidémie de peste. Grêle ? Sable. Sauterelles ? Nous aussi, l'année dernière. Ténèbres ? Ça fait combien de temps qu'on ne voit plus la lumière au bout du tunnel ?
La mort des premier-nés ? Nous avons l'éternité de nos hommes politiques. 10 ? Pas besoin de continuer la liste, on la connaît tous par cœur. Et franchement, qui a encore envie de ressasser tout ça. Ouvrir le journal ? Allumer la télé ? Regarder par la fenêtre ? Non. Se promener sur les réseaux sociaux ? Eh bien oui. Oui parce que les Libanais, malgré le vent, le sable, les ordures, les manifs, la tempête, ont continué à faire preuve d'humour. Et ça, ça vaut son pesant d'or. Parce qu'ils ont le don de nous faire sourire derrière notre masque. Parce que leurs jeux de mots, slogans et autres dessins montrent une fois de plus notre sens inné de la dérision. Ce n'est pas de la résilience, de l'abandon. Non, c'est juste ce tempérament inouï qui nous permet de rester debout. Qui nous a toujours permis de rester droits. De ne pas plier. Même si aujourd'hui, tout semble perdu, que l'esprit combatif des années de guerre a quitté chacun d'entre nous. Même si on sait que cette fois, ça va être compliqué de régler le(s) problème(s) de corruption, d'insalubrité, de vide présidentiel – on ne reviendra donc pas sur cette longue liste qu'on connaît tous par cœur.
Par contre, on reviendra à loisir sur tout ce qui a été dit, fait, posté ces dernières semaines. Et on remerciera tous ces Libanais et Libanaises qui nous ont fait rire et continuent à le faire. Farid Hobeiche, avec ses sketches, dont le génial sur les touristes qu'il a emmenés skier sur les montagnes d'ordures. Pierre Hachache qu'on ne présente plus et Simi Merheb qui se marre quasiment tous les jours. Merci. Merci pour ces petits films, même s'ils abordent ces sujets si graves. Merci aux manifestants pour leurs slogans, leurs pancartes, les photos détournées des hommes politiques « non recyclables », les « I wish my girlfriend was as dirty as our politicians », « Regarde bien ta Rolex, c'est l'heure de la révolte », « ri7etkon wosslit 3a Montréal ». Merci au mec qui s'est mis à danser derrière le journaliste de la MTV. Merci aux sourires des protestataires malgré les jets d'eau. Merci aux poings levés. Merci aux status et aux photos sur la tempête de sable alors qu'on était en train d'étouffer. Dieu seul sait combien on avait besoin d'humour. Et de connerie. #naturalfilteroverbeirut. « Warning : there's an Instagram filter all over Beirut » , « Le marchand de sable, touché par la crise économique, liquide son stock », « Also, if you woke up and your car was super dirty, don't panic. It simply means that you're not rich enough to live in a building with an underground parking space », « Must be everyone's return from Burning Man (le festival, NDLR) "Mad Max" », #BelRouhBelDamBelRamel, « En voyant les députés sortir de la Chambre, j'ai eu l'impression de revivre les mêmes moments qu'il y a 5 ans, 10 ans, 20 ans. Le Liban a inventé la machine à remonter dans le temps ». Merci au manifestant qui voulait la plage dans la Békaa et à qui on a dit d'attendre l'eau encore deux jours, maintenant qu'il a le sable. Sans parler des photos, des montages, des selfies planqués sous des masques à gaz, une paire de lunettes sur fond jaunâtre, des chameaux sur l'autostrade de Jounieh.
Sans ça, sans vous, plus rien ne serait plus supportable. Sans ça, sans vous, on ne tiendrait pas encore le coup. Sans ça, sans vous, le Liban ne serait définitivement plus le Liban.

Les dix plaies d'Égypte. Les 100 plaies du Liban. Ils ont eu le Nil changé en sang. Nos rivières et notre mer sont devenues nauséabondes. Les grenouilles recouvrirent l'Égypte. Nous avons les rats qui skient sur les montagnes de poubelle. Moustique et poux ? Nous aussi. Mouches et taons ? Nous aussi. La mort des troupeaux ? On mange de la viande avariée. Furoncles ?Nous sommes à la limite...

commentaires (1)

Et sans les salauds au sommet, sans eux, tout serait à nouveau supportable. Sans eux, sans les voyous, on tiendrait encore longtemps le coup. Sans eux, le Liban redeviendrait à nouveau le Grand-Liban.

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

14 h 38, le 12 septembre 2015

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Commentaires (1)

  • Et sans les salauds au sommet, sans eux, tout serait à nouveau supportable. Sans eux, sans les voyous, on tiendrait encore longtemps le coup. Sans eux, le Liban redeviendrait à nouveau le Grand-Liban.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    14 h 38, le 12 septembre 2015

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