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Économie - Liban - Corruption

Le ministre des Finances prêt à dévoiler son patrimoine foncier pour montrer l’exemple

Le ministre des Finances Ali Hassan Khalil a déclaré à l'association Sakker el-Dekkené avoir demandé des relevés des patrimoines fonciers des fonctionnaires de son administration pour détecter les cas d'enrichissement illicite et s'est dit prêt à jouer lui-même la transparence en la matière.

Un chef de registre foncier était prêt à payer un pot-de-vin de 200 000 dollars pour éviter sa permutation, déclare le ministre des Finances Ali Hassan Khalil.

Le ministre des Finances Ali Hassan Khalil a déclaré à l'association de lutte contre la corruption Sakker el-Dekkené qu'il était prêt à dévoiler publiquement son patrimoine foncier et immobilier pour donner l'exemple au plus haut niveau de son administration.

« Tous les ministres devraient faire de même et dévoiler leur patrimoine », a commenté Carole al-Charabati, cofondatrice de l'association.

Dans un communiqué, Sakker el-Dekkené précise que le ministre s'est également dit prêt à lui communiquer le relevé de patrimoine foncier de tout fonctionnaire de son administration au sujet duquel pèseraient des soupçons de corruption sur la base de plaintes récoltées auprès du public.
Le ministère des Finances est engagé dans une opération « mains propres » qui a débuté dans les services du cadastre et du registre foncier, et s'étend désormais aux services fiscaux et aux douanes, affirme Ali Hassan Khalil.

(Lire aussi: Plus de 50 % des Libanais disposés à corrompre un agent public)

Quelque 400 plaintes ont été transmises au parquet financier pour sous-évaluation frauduleuse de biens-fonds au moment de leur enregistrement, et quelque 72 milliards de livres de taxes ont été récupérées par le Trésor. Des relevés de patrimoine foncier ont été établis pour la totalité des employés du cadastre (département de topographie) et du registre foncier (conservation des titres de propriété), et il est apparu que seules 19 personnes n'avaient aucun bien. « Pour 134 autres, nous avons des listes de biens-fonds que nous sommes en train d'étudier, certaines étant particulièrement suspectes : quelque 82 biens-fonds sont enregistrés au nom d'un fonctionnaire de catégorie quatre ; 55 biens-fonds au nom d'un assistant topographe ; 116 biens-fonds au nom d'un topographe, répartis sur tout le territoire, Baabda, Sarba, Békaa, Roumié, Bauchrieh, Kesrouan, Metn, etc. » Le cadastre et le registre foncier emploient au total environ 500 personnes dont 300 contractuels.

Les émirs du foncier

Le ministre des Finances a affiché sa volonté de s'attaquer à un système de « vol institutionnalisé » – dans lequel tout le monde est impliqué, convient-il, y compris des proches de son parti et de ses alliés politiques. « Les chefs des registres fonciers se sont transformés en émirs. L'un d'entre eux a proposé 200 000 dollars à l'un de mes adjoints pour éviter sa permutation. »

(Pour mémoire : Des cadeaux de Noël pas comme les autres aux ministres et députés)

La corruption de l'administration foncière ne se limite pas à de l'évasion fiscale, elle permet aussi l'appropriation de terres domaniales municipales par des particuliers (machaat). « J'ai envoyé 17 plaintes pour appropriation illégale de ce type au parquet financier. S'y ajoutent désormais aussi une centaine de plaintes fondées sur les dénonciations de la société civile. Les gens sont encouragés par notre action », commente le ministre des Finances qui cite au moins deux exemples – l'un dans le nord du Liban, l'autre dans le Sud – portant sur quelque 250 à 300 000 mètres carrés de terres domaniales devenues la propriété de particuliers. « Quand vous examinez le dossier, tout est légal dans la forme. Du topographe au mokhtar, en passant par le registre foncier et le juge foncier, tout le monde est de mèche. »

Le ministre cite aussi l'exemple d'un relevé topographique réalisé en pleine guerre contre Israël en juillet 2006. « Le document atteste d'une visite sur les lieux, dans le sud du Liban, réalisée par le topographe, en présence des personnalités de la région, etc. ! »

Permutations administratives

Outre les relevés de patrimoine foncier, le ministre a choisi d'ébranler les habitudes des diverses administrations au contact des citoyens pour percevoir des impôts et des taxes à travers une série de permutations. « Elles ont concerné 850 personnes aux douanes », a expliqué le ministre selon qui l'évasion fiscale liée à ce département s'établit à 700 millions de dollars au minimum. Des mesures particulières concernant les douanes seront annoncées mercredi, a-t-il ajouté.

(Lire aussi : Sakker el-Dekkené a recensé 1 600 cas de corruption en quelques mois)


Du côté du fisc, le ministre a annoncé avoir déféré au parquet une fonctionnaire à la suite de la détection de mouvements suspects sur ses comptes bancaires sur lesquels transitaient des millions de dollars. La commission spéciale d'investigation sur le blanchiment d'argent a été saisie, permettant la levée du secret bancaire. « La plainte déposée contre elle a créé un choc dans l'administration. Nous allons demander une enquête interne sur les quelque 90 individus qui occupent les mêmes fonctions que cette personne. »

Dans un rapport publié en février, l'association Sakker el-Dekkené confirme que le ministère des Finances arrive en tête de liste des administrations libanaises jugées les plus corrompues. Sur près de 1 600 cas de pots-de-vin et de petite corruption recensés en 2014 par l'ONG pour un montant total de 2,2 millions de dollars, 27 % des cas étaient liés au ministère des Finances qui arrive après le ministère de l'Intérieur (52 % des cas). En valeur, en revanche, c'est aux Finances que revient la palme avec un total de 827 000 dollars de pots-de-vin dont le paiement a été signalé. Et parmi toutes les administrations publiques, le cadastre est le champion toutes catégories (nombre et valeur) des actes de petite corruption avec 227 cas dénoncés (15 % du total) d'une valeur de 630 000 dollars (29 %).

* également membre du conseil de Sakker el-Dekkené




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commentaires (2)

Raymond Eddé avait créé la loi "Men ayn laka haza ?" (D'où as-tu cela ?) jamais appliquée. Je dis Bravo au ministre Ali Hassan Khalil. La déclaration du patrimoine est appliquée depuis longtemps en France à tous les ministres dès leur entrée au gouvernement. Si le gouvernement libanais décide enfin d'appliquer la loi Eddé, cela ferait beaucoup de dégâts. Je ne vise personne.

Un Libanais

15 h 59, le 23 février 2015

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Commentaires (2)

  • Raymond Eddé avait créé la loi "Men ayn laka haza ?" (D'où as-tu cela ?) jamais appliquée. Je dis Bravo au ministre Ali Hassan Khalil. La déclaration du patrimoine est appliquée depuis longtemps en France à tous les ministres dès leur entrée au gouvernement. Si le gouvernement libanais décide enfin d'appliquer la loi Eddé, cela ferait beaucoup de dégâts. Je ne vise personne.

    Un Libanais

    15 h 59, le 23 février 2015

  • Le principal ce n'est pas de déclarer son patrimoine mais c'est surtout de faire le bilan avant nomination pour les ministre et élection pour les députés et comparer à la fin du mandat mais il faut surtout une commission de juges intègre pour faire le contrôle sinon ça ne sert à rien

    yves kerlidou

    15 h 01, le 23 février 2015

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