Rechercher
Rechercher

Diaspora - Portrait

Habeeb Salloum, une plume linguiste et « gustative »

Habeeb Salloum, écrivain canadien d'origine libanaise, peut être à la fois au four et au moulin en train de préparer un mets de la table digne de Shéhérazade, tout en vous racontant « l'odyssée de la langue arabe ».

Habeeb Salloum dans sa cuisine, faisant une « kebbé » familiale.

Ainsi est Habeeb Salloum, écrivain canadien de renom établi à Toronto, qui compte à son actif la publication de sept ouvrages (linguistiques, culinaires et récits de voyages) et de multiples articles socio-historiques dans des revues spécialisées. D'origine libanaise, il a eu la chance de vivre ses rêves d'enfant : voyager et manier la plume.
En tant que fils d'émigrés libanais, il avait grandi dans la ferme paternelle en pleine région éloignée de la Prairie Canadienne, plus précisément à Saskatchewan. Son père, Gergi Yacoub Salloum, et sa mère, Shams Saliba Khoury, étaient arrivés là en 1924 de leur village de Karaoun (Békaa). Gergi, à l'instar de la plupart des émigrés libanais de l'époque, pratique d'abord le commerce de la valise ambulante (« tejjar al-kaché »), avant de devenir fermier à Saskatchewan. Ce sera le monde où grandiront ses huit enfants.
Habeeb fréquente une toute petite école rurale constituée d'une seule pièce. Ses parents n'auront pas les moyens de le laisser achever ses études secondaires. Mais il y arrivera en s'inscrivant à des cours du soir. Puis il décroche un job à la Poste canadienne, se marie et obtient un BA en suivant des cours par correspondance.
Cet homme hors du commun précise que sa planche de salut à été la lecture. « J'ai lu tous les livres de la bibliothèque de ma première école, parfois plusieurs à la fois, et je rêvais de découvrir le monde, au-delà de notre ferme retirée de tout, se souvient-il. J'ai écrit mon premier livre à l'âge de 16 ans. Je n'avais qu'une envie, sortir des mots de ma tête et de ma plume. Plus mes camarades me taquinaient en m'appelant "le Syrien noir", plus je voulais en savoir plus sur mes origines ancestrales. »

Des mets façon Shéhérazade
L'histoire du Moyen-Orient et du Liban le fascine. D'autant que sa culture originale faisait partie de sa vie familiale. Une fois retraité, il commence à parcourir le monde, en particulier les pays méditerranéens, dont il va approfondir sa connaissance de leur histoire, pour les présenter dans des récits de voyages. Il s'intéressera parallèlement à leur art culinaire. Actuel et passé.
À ce sujet, il raconte : « En faisant des recherches avec ma fille, Mona, qui s'intéressait à ce sujet, nous sommes tombés sur six ouvrages culinaires de l'âge d'or de la civilisation arabe, rédigés entre le Xe et le XIIIe siècle. Le livre de recettes du Xe siècle se référait à un autre, du IXe, écrit par le calife abbasside Ibrahim ibn el-Mehdi. Une compilation nous a permis de réunir une centaine de recettes pour chacun des titres suivants : Les fêtes de Shéhérazade : aliment du monde arabe médiéval ; Douceurs des Mille et Une nuits. Nous les avons traduites en anglais, puis adaptées à la cuisine actuelle et, enfin, testées avant de les publier ». Idem pour Une journée culinaire le long de la route de la soie.
Pour ce qui est des recettes libanaises, Habeeb n'a pas dû aller loin pour les trouver : sa mère, son épouse (Libanaise, née Frida Bou Rizk) et plusieurs membres de sa famille étaient de parfaits
cordons-bleus.
Auparavant, Habeeb Salloum s'était consacré à
raconter l'odyssée de la langue arabe, insistant particulièrement sur son impact sur la langue espagnole. Il n'a jamais voulu que sa culture ancestrale soit uniquement de l'encre sur du papier et a poussé très loin l'autodidactisme. Il a commencé par apprendre à écrire l'arabe, qu'il ne savait que parler. Puis il l'a appris à ses enfants, à ses petits-enfants et à ses
arrière-petits-enfants. « S'ils ne maîtrisent pas parfaitement l'écrit, ils comprennent notre langue à 100 %, dit-il. Il était important pour moi de leur passer cette tradition. Et j'en suis très fier. »
On s'en doute bien, chez les Salloum, la nourriture a toujours été libanaise. À la fin du repas, on fait et on refait le monde « en arabe » autour de la table. À la question de savoir comment il effectue le passage des fourneaux à la linguistique, il répond : « L'histoire ne peut être bien comprise sans connaître le fonctionnement de la société, notamment la langue, la géographie, les usages, le commerce et l'art culinaire. De plus, l'histoire vous donne une raison d'être et les aliments nourrissent cette existence. »

Ainsi est Habeeb Salloum, écrivain canadien de renom établi à Toronto, qui compte à son actif la publication de sept ouvrages (linguistiques, culinaires et récits de voyages) et de multiples articles socio-historiques dans des revues spécialisées. D'origine libanaise, il a eu la chance de vivre ses rêves d'enfant : voyager et manier la plume.En tant que fils d'émigrés...