Au lendemain de la libération de cinq militaires détenus par la formation jihadiste depuis les affrontements à Ersal (Békaa) avec l'armée libanaise, le Front al-Nosra (branche syrienne d'el-Qaëda) cité par l'agence de presse turque Anatolie, a indiqué dimanche que "toute participation du Hezbollah aux combats dans les jours à venir pour la libération du Qalamoun (localité syrienne à la frontière du Liban, ndlr) nous forcera à tuer les militaires chiites que nous détenons".
Dans le communiqué rapporté par Anatolie, le groupe jihadiste a en outre déclaré aux chrétiens du Liban : "Le Courant patriotique libre a privé par ses récents actes un nombre de vos proches de la libération, restez donc à l’écart". Al-Nosra fait allusion à un drapeau de Daech (actuellement l’État Islamique, EI), qui porte la profession de foi musulmane, brûlé place Sassine à Achrafieh (Beyrouth).
Le ministre libanais de la Justice Achraf Rifi a demandé aux autorités judiciaires d'engager des poursuites contre les personnes responsables. Dans un communiqué, il a dénoncé le fait que des inscriptions religieuses, en l'occurrence "il n'y a d'autre dieu que Dieu, et Mahomet est son prophète", aient été insultées de la sorte, soulignant que ces inscriptions n'avaient aucun rapport avec le drapeau du groupe jihadiste, qui les affiche sur son étendard.
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Réagissant à cette décision, l'avocat et député membre du Courant patriotique libre, Ibrahim Kanaan, a annoncé qu'il se chargerait de la défense des jeunes qui ont brûlé le drapeau de Daech à Beyrouth. Pour sa part, le ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil a appelé les responsables libanais à ne pas confondre l'islam et l’État islamique. "La religion musulmane n'a rien à voir avoir le mouvement islamiste jihadistes", a-t-il assuré.
Les médias locaux ont dans ce cadre rapporté que des croix ont été incendiées dans le camp de Aïn el-Heloué, à Saïda (Liban-Sud) ainsi qu'à Tripoli (Liban-Nord) où l’armée a effacé des slogans islamistes écrits sur les murs de deux églises, en représailles au fait que le drapeau de l'EI portant la profession de foi musulmane ait été brûlé.
Ainsi, les cinq militaires libanais - quatre soldats et un agent des Forces de sécurité intérieure (FSI) - libérés samedi soir par al-Nosra sont tous sunnites. Il s'agit de Ahmad Ghiyé, Ibrahim Chaabane, Saleh al-Baradei, Mohammad al-Kadri et Waël Darwiche. Le groupe jihadiste a d'ailleurs assuré dans son communiqué dimanche aux sunnites du Liban que "nous avons libéré vos fils en guise d'affection car vous êtes nos familles".
Les familles des otages ne lâchent rien
Les cinq militaires sont arrivés samedi dans la nuit à Ersal, où ils ont été accueillis par le cheikh Moustapha Houjeiry, un dignitaire religieux faisant office de médiateur, puis remis dimanche aux services de sécurité avant de rejoindre leurs familles.
De leur côté, les familles des militaires toujours en otage ne lâchent pas la pression. Elles ont brièvement coupé à l'aide de pneus enflammés dimanche matin l'autoroute de Tripoli-Akkar (Liban-Nord) de Laboué ainsi que l'autoroute de Baalbeck et la route Rayak-Baalbeck, dans la Békaa, pour réclamer la libération de leurs proches.
Parallèlement, l'armée libanaise a indiqué samedi qu'elle enquêtait sur des images et une vidéo montrant la décapitation présumée d'un soldat libanais aux mains du groupe jihadiste de l'EI. Des sympathisants de l'EI ont diffusé une vidéo samedi montrant la décapitation d'un homme en treillis militaire, les yeux bandés, et présenté comme l'un des soldats libanais enlevés par le groupe jihadiste sunnite syrien. "Nous enquêtons", a indiqué à l'AFP un porte-parole militaire se refusant à confirmer l'authenticité de la vidéo.
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La victime, identifiée par les sympathisants de l'EI comme le soldat Ali el-Sayyed, apparaît assis sur le sol, entouré de trois hommes armés et cagoulés. Il est visiblement dans un état de grande agitation au moment où l'un d'eux annonce qu'il va le tuer, avant d'être décapité sous les cris de "État islamique". Juste avant l'exécution, l'un des hommes armés a accusé l'armée libanaise d'être "sous les ordres" du Hezbollah qui combat les rebelles et les jihadistes aux côtés du régime en Syrie. "Première décapitation d'un soldat libanais par les lions de l'EI", ont commenté des partisans de l'EI sur Twitter. La vidéo, postée dans un premier temps sur YouTube, a été supprimée pour violation aux règles d'usage.
Dimanche, Ibrahim Chaabane, un des soldats libérés par al-Nosra a affirmé que Ali el-Sayyed est encore vivant.
Alors que la tension à Ersal est à son paroxysme, le commandant en chef de l'armée, le général Jean Kahwagi, a affirmé que la situation sur le terrain dans la localité est "normale", mettant en garde contre le grand nombre de rumeurs qui circulent en cette période."On dit que les groupes terroristes se préparent par milliers à lancer une offensive contre l'armée. Aucun problème, qu'ils soient les bienvenus, nous avons pris toutes les précautions", a indiqué le général Kahwagi dans des déclarations au quotidien al-Mustaqbal publié dimanche, tout en assurant que ce genre d'informations sont "plus proches des rumeurs que de la réalité".
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commentaires (4)
Avec la libération des cinq militaires sunnites par al-Nosra espérons que l'armée restera unie et ne revivra pas les tristes jours de 1975 .
Sabbagha Antoine
15 h 22, le 31 août 2014