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À La Une - Liban

Présidentielle syrienne au Liban : 2e journée de vote, dans le calme cette fois

Aujourd'hui, l'armée libanaise a mis en place des mesures de sécurité renforcées.

Un groupe de Syriens venus voter, jeudi à l'ambassade de Syrie au Liban, au 2e jour du scrutin prolongé. Photo Matthieu Karam

Après une première journée de vote totalement chaotique, les ressortissants syriens se sont de nouveau présentés jeudi matin devant l'ambassade de Syrie au Liban pour voter à l'avance, dans le cadre de la présidentielle syrienne du 3 juin.


Le scrutin était censé se dérouler sur une journée, mais face à l'affluence hier, l'ambassade de Syrie a décidé de prolonger les opérations de vote d'une journée.


Ce matin donc, des ressortissants syriens ont repris la route de l'ambassade, qui se trouve à Baabda (est de Beyrouth). Aujourd'hui, les autorités libanaises ont toutefois décidé de prendre les choses en main, afin que ne se répète pas le scénario infernal de mercredi, quand une marée humaine a afflué vers l'ambassade, paralysant complètement toute la région. Une situation qui a provoqué la colère de beaucoup de Libanais.

 

(Présidentielle syrienne au Liban : les images)


Aujourd'hui, pas d'embouteillages sur les routes, pas plus que d'habitude en tout cas, pas de longues files d'électeurs grimpant vers Baabda à pied, peu de drapeaux syriens, du Hezbollah, de portraits d'Assad brandis à la fenêtre de voitures, van et autres bus, pas de chants à la gloire du président syrien, qui a toute les chances d'être réélu dans un scrutin qualifié de "farce" par l'opposition syrienne et ses alliés occidentaux.


Aujourd'hui, l'armée libanaise a mis en place des mesures de sécurité renforcées. A Baabda, l'accès à l'ambassade est contrôlé, parsemé de barrages auxquels les électeurs, divisés entre hommes et femmes, sont fouillés. Résultat : on est loin de la cohue de mercredi, de cette masse d'hommes et de femmes agglutinés devant l'ambassade, certains s'évanouissant sous le coup de la chaleur.

 

Voter pour Bachar "comme tout le monde"

Khouloud*, une Syrienne d'une soixantaine d'années, vient de voter, pour Bachar el-Assad "comme tout le monde", souligne-t-elle, interrogée par Lorientlejour.com devant l'ambassade. Le mari de Khouloud travaille au Liban. Elle, fait des aller-retours entre Tartous et Beyrouth. Elle aurait pu voter en Syrie, le 3 juin, mais, explique-t-elle, "comme je suis au Liban en ce moment, j'ai décidé de voter ici".

Dans l'ambassade, le processus de vote était exemplaire, souligne-t-elle.
Hier, les témoins avaient rapporté un processus de vote tenant du grand n'importe quoi : des bulletins découpés au lieu d'être cochés, une femme votant pour sept proches, un homme brandissant une liasse de papiers d'identité comme l'a notamment rapporté le Washington Post, des grappes d'électeurs fourrant dans un désordre total, leur bulletin dans une urne...

 

Les opérations de vote, dans le chaos, mercredi, à l'ambassade de Syrie au Liban. REUTERS/Sharif Karim


Rien de tout cela aujourd'hui, assure Khouloud, qui indique avoir voté seule, dans un isoloir, avoir mis un bulletin dans une enveloppe, puis l'enveloppe dans l'urne. Elle précise même que quand elle a demandé si elle pouvait voter pour son mari, coincé au travail aujourd'hui, les responsables de l'ambassade lui ont répondu que cela n'était pas possible.


Quand on lui demande pourquoi elle n'a pas voté hier, Khouloud répond : "Hier, les informations circulant étaient que ceux qui n'étaient pas inscrits sur les listes devaient d'abord passer à la frontière pour mettre les choses en ordre. Aujourd'hui plus besoin, l'information qui circule est que n'importe qui peut voter".
Elle s'arrête, puis demande, soudain soucieuse : "Je ne sais pas si je devais dire ça. Vous pensez que je n'aurais pas dû dire ça ?".

 

(Lire aussi : Vote ou provocation : l'insulte faite au citoyen libanais)

 

"En finir avec tout ça"
Comme hier, difficile de trouver un Syrien n'ayant pas voté pour Assad.

"J'ai voté pour Bachar pour en finir avec tout ça", explique Tony, qui vient de Damas. Interrogé sur les autres candidats, il répond "quels autres candidats, on n'a jamais entendu parler d'eux!" Les deux autres candidats de cette présidentielle qui se tiendra uniquement dans les zones tenues par le régime, font office de faire-valoir.

Quand on lui demande s'il fait partie de ce million de réfugiés syriens que compte désormais le Liban, Tony hésite un instant, puis répond "non, je ne suis pas un réfugié, je fais des allers-retours entre Damas et Beyrouth".

Alors que des rumeurs circulaient hier selon lesquelles les réfugiés auraient été incités à voter par des groupes libanais pro-Assad, certains affirmant que ceux qui ne voteraient pas se verraient interdire de retourner en Syrie, Tony affirme ne rien avoir entendu de tel. "Mais bon, tout est possible", lâche-t-il aussi.

"On m'a fait comprendre que si je ne me rendais pas pour voter, je ne pourrais plus retourner dans mon pays", racontait hier un jeune chrétien de Syrie, employé dans une boutique à Beyrouth.

 

"Je comprends leur colère"

Daham el-Hajj, lui, vient de Deir Ezzor. Il a essayé de voter hier, mais n'a pas pu, alors il est revenu aujourd'hui. Sans surprise, il vote pour Bachar car "il n'y a personne comme lui".

Interrogé sur la réaction des Libanais, excédés par la démonstration de force pro-Assad et le chaos qu'a suscité le premier jour de scrutin, il répond : "Je peux les comprendre".

 

Sur Twitter, des Libanais ont laissé éclater hier leur animosité contre le million de réfugiés syriens sur leur territoire. "S'ils veulent exercer leur droit constitutionnel, qu'ils le fassent chez eux sous l'autorité de celui qu'ils veulent élire", s'insurgeait ainsi un internaute. Le secrétariat général du 14 Mars a estimé pour sa part que "les démonstrations de force et les provocations de la part des Syriens loyalistes au Liban, sous le prétexte de la participation au vote, sont la preuve flagrante qu'ils ne sont pas menacés dans leur sécurité". "Partant, le statut de déplacés ne leur est pas applicable. C'est pourquoi nous appelons le gouvernement libanais à œuvrer pour les renvoyer immédiatement dans leur pays", a indiqué le secrétariat du 14 Mars dans un communiqué publié hier.

 

Khaled* aussi dit comprendre les Libanais. "Ce chaos sur les routes, les gens qui n'ont pas pu aller travailler, les jeunes qui n'ont pas pu se présenter à leurs examens... Je comprends leur colère. Mais indépendamment d'hier, nous ressentons aussi une rancœur de la part des Libanais envers nous", souligne ce Syrien, lui aussi venu voter jeudi à l'ambassade.

Khaled a choisi Bachar "car il a peur des rebelles". Originaire de Maarret el-Noomane, dans la province d'Idleb (nord de la Syrie), il vit depuis 18 ans au Liban. Cela fait deux ans qu'il n'est pas retourné chez lui. "Je vote Bachar, parce qu'on était en sécurité avant, que les prix étaient abordables, les médicaments gratuits. Aujourd’hui, on ne peut plus rien acheter". Khaled en veut aussi aux rebelles car il ont réquisitionné sa maison en Syrie. "Un type de l'ASL (armée syrienne libre, opposition) voulait se marier, alors il a pris ma maison. Comment voulez-vous que je soutienne les rebelles?".

 

Jeudi, l'ambassadeur de Syrie au Liban, Ali Abdel Karim Ali, a estimé que l'affluence "massive" au vote anticipé pour la présidentielle syrienne est un "message politique" adressé par les Syriens. "Le peuple syrien rejette la guerre mondiale dirigée contre la Syrie. Les Syriens ont été mus par leur sentiment patriotique et sont venus voter en masse", a-t-il déclaré à la chaîne LBCI. "La Syrie était le pays le plus sûr au monde. Les Syriens veulent retrouver cette Syrie en votant pour Bachar el-Assad", a-t-il ajouté.

 

*Les prénoms ont été changés à la demande des personnes interviewées. 

 

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Après une première journée de vote totalement chaotique, les ressortissants syriens se sont de nouveau présentés jeudi matin devant l'ambassade de Syrie au Liban pour voter à l'avance, dans le cadre de la présidentielle syrienne du 3 juin.
Le scrutin était censé se dérouler sur une journée, mais face à l'affluence hier, l'ambassade de Syrie a décidé de prolonger les opérations de...

commentaires (3)

Toujours et toujours une vraie mascarade.

Sabbagha Antoine

16 h 38, le 29 mai 2014

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Commentaires (3)

  • Toujours et toujours une vraie mascarade.

    Sabbagha Antoine

    16 h 38, le 29 mai 2014

  • Présidentielle syriennme en Syrie, au Liban, en Jordanie et partout, 1ère, 2ème, 3ème, n'importwe quelle journée, sur les décombres de la Syrie et les cadavres des Syriens, c'est une MASCARADE à 99.99999999999999999999999999999999999%

    Halim Abou Chacra

    14 h 35, le 29 mai 2014

  • En faisant des aller retour ils voterons deux fois comme cela Bashar s'assurera la majorité des voix habituelles. Voyons a présent s'il fera mieux que les 96% de Sissi. Juste pour l'info et la justice, hier, d’après les infos Syriennes, il y a eu 40.000 personnes qui se sont présentés a l'ambassade. Mis a part les mauvaises langues a l'Orient le jour, Now Lebanon, et tous les autres, nous allons considérer les 40.000 comme étant des votants. Franchement, sur les presque 2 Millions de Syriens au Liban que représentent ils? A croire que la moitié seulement votent ils ne sont que 4%? allez 10%??? Ils appellent cela des élections? Franchement est-ce le style de démocratie que Aoun et ses maîtres nous promettent? Merci nous nous en passerons!!!

    Pierre Hadjigeorgiou

    13 h 57, le 29 mai 2014

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