Un accord a été conclu hier à Genève pour une désescalade rapide des tensions en Ukraine entre les États-Unis, la Russie, l'Union européenne et l'Ukraine. Cet accord, qui paraissait hors d'atteinte pour les diplomates avant la réunion, prévoit notamment le désarmement des groupes armés illégaux et l'évacuation des bâtiments occupés ainsi que la libération des rues, des places et autres lieux publics dans les villes ukrainiennes. Le document qui a été adopté prévoit aussi une amnistie pour ceux qui respecteront les dispositions de l'accord, à l'exception de « ceux qui sont coupables de crimes de sang ».
La mission de surveillance de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sera chargée d'aider les autorités ukrainiennes à mettre en œuvre ces mesures, selon la diplomate en chef de l'Union européenne Catherine Ashton, qui représentait l'UE à ces discussions quadripartites. Mme Ashton a assuré pour sa part que l'Union européenne « allait continuer ses efforts pour soutenir l'Ukraine, économiquement, financièrement et politiquement ».
Américains et Européens avaient prévenu que, faute de solution diplomatique à Genève, ils se préparaient à durcir leurs sanctions contre la Russie. « Chaque fois que la Russie prendra des mesures destinées à déstabiliser l'Ukraine et à violer sa souveraineté, il y aura des conséquences », a répété le président Barack Obama sur CBS News. N'ayant aucune certitude que l'accord ferait bien sortir l'Ukraine de l'impasse, le président américain a d'ailleurs donné son aval à la fourniture d'une « assistance militaire non létale » à l'Ukraine, notamment des fournitures médicales et des casques, a annoncé hier le secrétaire à la Défense Chuck Hagel. Le président français François Hollande a renchéri hier, prévenant que l'UE envisageait d'étoffer ses sanctions en cas d'échec à Genève. Il a eu des consultations hier avec la chancelière Angela Merkel et avec le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy.
L'engagement de la Russie à Genève « sera un test, on verra si la Russie veut aider à la stabilité de cette région », a de son côté estimé à Genève le chef de la diplomatie ukrainienne Andrii Dechtchitsa. « Il est important que ces mesures commencent à être appliquées (...) et les deux ou trois prochains jours, a-t-il estimé, seront cruciaux. »
(Commentaire : Le spectre d'un nouveau Tchernobyl dans la crise ukrainienne)
Menace voilée
Mais avant les réactions occidentales, c'est le chef de la diplomatie russe, Sergei Lavrov, qui a le premier annoncé l'accord lors d'une conférence de presse, réaffirmant que la Russie n'avait « aucun désir » d'envoyer des troupes en Ukraine. « Cela serait contre nos intérêts fondamentaux », a dit le chef de la diplomatie russe.
Des propos qui viennent presque contredire la position du Kremlin. Le président Vladimir Poutine a en effet lancé une nouvelle fois hier la menace voilée d'un recours à la force en Ukraine. Lors d'une longue séance télévisée de questions-réponses, M. Poutine a fait monter les enchères, avertissant qu'il « espère fortement » ne pas être « obligé de recourir » à l'envoi de ses forces armées en Ukraine. Le chef du Kremlin a exhorté les autorités ukrainiennes à accepter le « dialogue », via les entretiens quadripartites de Genève, au risque de mener le pays vers le « gouffre ». Il a également qualifié de « foutaises » les affirmations selon lesquelles les forces russes seraient impliquées dans les troubles dans l'est de l'Ukraine. M. Poutine a encore réclamé des « garanties » pour les droits des populations russophones de ces régions orientales ukrainiennes.
L'accord conclu à Genève a pris en considération ce dernier point, stipulant que le processus constitutionnel annoncé par le gouvernement transitoire ukrainien sera « transparent », « avec l'établissement d'un large dialogue national, pour inclure toutes les régions ukrainiennes et toutes les entités politiques ».
Tout en se félicitant de la conclusion de l'accord, le secrétaire d'État américain John Kerry s'est insurgé hier après des informations faisant état de l'obligation pour des juifs ukrainiens de s'enregistrer en tant que tels dans une ville de l'est de l'Ukraine, en proie à des troubles. « C'est non seulement intolérable, c'est grotesque. C'est au-delà de l'inacceptable », a-t-il martelé.
Pendant ce temps, sur le terrain, les tensions restent très fortes. Des affrontements qui ont fait trois morts ont opposé dans la nuit de mercredi à jeudi insurgés prorusses et loyalistes au pouvoir de Kiev. Autre signe de tensions, la compagnie aérienne russe Aeroflot a indiqué hier avoir reçu un « avis officiel » du gouvernement ukrainien interdisant l'entrée sur le territoire de ce pays à tout homme russe de 16 à 60 ans. Sont aussi interdits d'entrée sur le territoire ukrainien les hommes ukrainiens âgés de 16 à 60 ans et les femmes ukrainiennes âgées de 20 à 35 ans « domiciliés sur le territoire de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol », a signalé la compagnie aérienne.
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commentaires (3)
Ils sont tombés avec ces Ukrainiens, sur un "os" plus "slave" qu'eux, ces KGBistes Nains poutiniens Mongolo-sibériens.... Que Mâr Métér ait pitié d'eux !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
13 h 23, le 18 avril 2014