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Économie - Liban - Compte-rendu

Les entreprises familiales face au défi de la transition générationnelle

Pour assurer leur pérennité, ces sociétés, majoritaires au Liban, doivent préparer en amont le passage de relais à leurs descendants.

Les membres fondateurs de Family Business Network Levant ont plaidé pour une implication précoce des jeunes générations dans les entreprises familiales. Photo D. R.

« Seules 30 % des entreprises familiales dans le monde sont reprises avec succès par les descendants de leurs fondateurs, tandis qu'environ 12 % d'entre elles survivent à la 3e génération. » Tel est le constat qui a été soulevé lors de la cérémonie de lancement de l'association Family Business Network Levant (FBN Levant) par son président, Chaker Saab, également PDG de Tinol Paints International, devant une centaine d'actionnaires d'entreprises familiales rassemblés mercredi dans les locaux de la fondation Fattal, à Sin el-Fil. « Basée à Beyrouth, FBN Levant devient ainsi la 30e antenne du réseau FBN International dont le siège est à Lausanne. En quelques jours seulement, nous avons d'ores et déjà comptabilisé une cinquantaine d'adhésions », s'est réjoui auprès de L'Orient-Le Jour M. Saab.

« Notre objectif est de mettre en relation les membres des entreprises familiales au Liban, en Syrie, en Jordanie et en Irak, qui ont besoin de se soutenir mutuellement face à des enjeux communs, notamment en matière de conciliation de gouvernances familiale et entrepreneuriale, de dialogue intergénérationnel, ou encore de planification de la transmission de propriété et de gestion de l'entreprise », a détaillé de son côté Lina Chéhab el-Alaili, fondatrice et directrice générale de la FBN Levant, dans son discours inaugural.
Constituant plus de 90 % du tissu entrepreneurial libanais (et 85 % au Levant), ces entreprises doivent « tout en faisant face à des défis économiques, commerciaux et politiques gérer des problèmes familiaux complexes », a encore rappelé Mme Alaili.

 

(Pour mémoire : Les Libanais préfèrent gérer leur entreprise, selon un sondage)

 

« Cohésion familiale »
Concrètement, l'association FBN Levant accompagne les propriétaires d'entreprises familiales pour les aider à préparer le passage de relais aux membres des générations futures, destinés à prendre la direction de l'entreprise ou d'en devenir actionnaires. « Le rôle de FBN est de sensibiliser les jeunes membres à l'esprit entrepreneurial familial », a résumé Matteo Fumagalli Romario, directeur de l'entreprise italienne Sol et ambassadeur de FBN International. « Dans notre société, qui a été fondée par deux familles et regroupe aujourd'hui 300 actionnaires issus de trois générations, nous organisons chaque année des réunions pour impliquer les plus jeunes membres dans la vie de l'entreprise », a-t-il exposé.
Mais outre cet effort de sensibilisation à l'égard des plus jeunes, plusieurs écueils peuvent entraver la réussite d'une transition générationnelle, le premier concernant la santé financière de l'entreprise. « C'est en général un exercice difficile », indique à L'OLJ M. Saab, notant par exemple que certaines entreprises familiales libanaises s'efforcent d'enregistrer « une hausse d'environ 18 % de leur chiffre d'affaires » pour réussir leur transition.

Le deuxième facteur, selon M. Saab, est lié à « la cohésion familiale, qui est tout aussi importante pour préserver la société ». Un des principaux défis est donc de continuer à développer l'entreprise malgré un nombre d'actionnaires qui augmente de génération en génération au risque de ralentir le processus de prise de décision. « En fonction des cas, les héritiers sont soit des frères, soit une confédération de cousins. Or, si le processus de transition n'est pas anticipé par une refonte des statuts de la société et des protocoles d'accords entre actionnaires, il pourra être source de conflits », confie pour sa part à L'OLJ l'avocat d'affaires Nabil Zakhia. « Ces conflits peuvent conduire à une scission de l'activité, la vente de la société à une partie extérieure, ou à la dégradation de l'activité de l'entreprise », alerte Me Zakhia.

 

(Pour mémoire : Le Liban parmi les champions du monde de l'entrepreneuriat, selon une étude)

 

Salaire de complaisance
Une régulation de l'emploi des membres de la famille au sein de l'entreprise est aussi nécessaire. « Nous exigeons par exemple que le membre de la famille soit titulaire d'un Bac+5 et qu'il ait au moins cinq ans d'expérience en dehors de l'entreprise familiale », a détaillé le PDG de Baalbaki Chemical Industries et membre du bureau de la FBN Levant, Hassane Baalbaki. « Sur les huit actionnaires de Tinol Paints International, cinq sont employés par la société, et des codes régulent les conditions de leur embauche et de leur rémunération », précise à L'OLJ M. Chaker. « C'est une manière de prévenir l'octroi de salaires de complaisance », explique Me Zakhia.

Mais que se passe-t-il si les jeunes descendants ne souhaitent pas malgré tout prendre la relève ? « Depuis 2011, la part de jeunes (entre 18 et 21 ans) ayant exprimé leur volonté de reprendre l'activité familiale a baissé à 30 %. Ces derniers sont intéressés par un marché de l'emploi de plus en plus attractif », a prévenu Alexis du Roy de Blicquy, PDG de FBN International. « Lorsque vos enfants ne sont pas passionnés par la gestion de votre entreprise familiale, il est préférable de confier cette mission à des professionnels et de leur constituer un fonds leur permettant d'entreprendre ailleurs », a conseillé Hassane Baalbaki. « Dans ce cas, la société crée un fonds d'investissements qu'elle alimente en prélevant un quote-part sur ses bénéfices. Ce fonds sera ensuite destiné à financer les start-up des membres de la famille ne souhaitant pas intégrer le management de la société », conclut Me Zakhia.

 

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