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À La Une - reportage

Mines et pièges contrarient le retour des réfugiés irakiens

De nombreux villageois ont été blessés, mutilés ou même tués.

Depuis quelques mois, des milliers d'Irakiens tentent de rentrer chez eux, deux ans après avoir fui en 2014 l'avancée éclair des jihadistes de l'organisation Etat islamique (EI). Mais le retour est souvent plus brutal qu'ils ne l'avaient anticipé. REUTERS/Mohammed Salem

Deux ans après l'avoir quitté, Khedr Selim observe avec inquiétude les décombres de son ancien foyer, redoutant que les jihadistes en déroute ne l'aient truffé d'explosifs. Quelques jours plus tôt, d'anciens habitants de Bachiqa, sa ville natale, ont été tués par l'explosion d'une bombe à l'entrée de leur maison.

"C'est dangereux. Il faudra retirer les explosifs de la ville avant de pouvoir commencer à nettoyer les décombres, sans même parler de revenir vivre ici", explique-t-il. "Mais on ne peut pas rester éloigné d'ici plus longtemps. On a loué ailleurs et je n'ai pas trouvé de travail. On commence à manquer d'argent, il faut rentrer chez nous."

Depuis quelques mois, des milliers d'Irakiens tentent ainsi de rentrer chez eux, deux ans après avoir fui en 2014 l'avancée éclair des jihadistes de l'organisation Etat islamique (EI). Mais le retour est souvent plus brutal qu'ils ne l'avaient anticipé. De nombreux villageois ont été blessés, mutilés ou même tués par des mines ou des pièges posés par les combattants de l'EI.

(Lire aussi : "On aimait Abou Bakr al Baghdadi parce qu'il nous a libérés de l'oppression chiite")

 

"Danger-TNT"
Sur les bâtiments encore debout à Bachiqa, beaucoup portent des inscriptions prévenant "Danger-TNT". De nombreuses rues sont encore impraticables. La tâche des équipes de déminage s'annonce colossale. Elles doivent à la fois désamorcer les engins placés dans les logements et ceux qui ont été enfouis le long de l'ancienne frontière délimitant les territoires tenus par l'EI.

Dans un village situé sur cette longue ligne de démarcation, des dizaines de piquets jaunes sont fichés dans le sol pour tracer un chemin sûr vers l'école locale.

"L'EI a décidé d'établir un champ de mine défensif, mais la plupart des champs de mines traversent des zones habitées", explique Salam Mohammed, membre de l'ONG Mines Advisory Group (MAG), spécialisée dans les opérations de déminage. "En même temps, ils ont piégé les maisons en prévision du retour des habitants."

Salam Mohammed affirme que MAG a déjà retrouvé plus de 350 engins explosifs dans ce village, repris cette année à l'EI. Dans les localités plus peuplées, comme Bachiqa, les opérations viennent à peine de commencer.

 

(Lire aussi : Recherche jihadistes au milieu des civils fuyant Mossoul)

 

Conçues pour tuer
Les mines terrestres, en majorité des dispositifs fabriqués dans les ateliers de l'Etat islamique, peuvent peser jusqu'à 35 kg et sont conçues pour tuer, pas pour mutiler, observe Salam Mohammed. Sur les 25 victimes de mines enregistrées ces derniers mois dans la zone de Khazer, 16 sont mortes. Désignant un fossé creusé en bordure de route, il raconte comment un villageois a été déchiqueté en sautant sur une mine.

La persistance du danger ne dissuade pourtant pas de nombreux candidats au retour. "On savait que la zone était minée quand nous sommes revenus, mais nous avons loué une maison dans la zone de Khabat pendant près de deux ans et on n'avait plus d'argent", explique Hamid Zorab, un agriculteur de 73 ans. "On n'avait plus le choix". C'est pourtant à cause de ce retour hâtif que son fils est mort lorsqu'une bombe a explosé devant son logement.

Selon Salam Mohammed, le poids d'un enfant suffit à faire exploser la plupart des mines dont l'explosion peut détruire un véhicule.

Pour limiter les pertes en vies humaines, les employés de MAG montrent aux enfants comment reconnaître les munitions non explosées et autres pièges explosifs cachés dans les objets les plus anodins, réfrigérateurs, tuyaux de canalisation, jouets. "Les enfants deviennent experts en explosifs", dit Khalil Khobyar, revenu vivre avec sa famille.

 

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