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Lifestyle - Rencontre

Tony Fadell : Je me dois d’être un trait d’union entre Steve Jobs et la nouvelle génération

Il y avait les frères Lumière, Graham Bell, Edison et consorts. Il y a aussi, à sa manière, Tony Fadell, l'Américano-Libanais, créateur du iPod et du iPhone. Aujourd'hui, il s'est greffé des ailes de business angel pour porter le flambeau et aller butiner des myriades de start-up liées à la technologie. De passage à Beyrouth pour participer à la conférence BDL Accelerate, il s'est prêté avec enthousiasme, et en exclusivité, au jeu des questions-réponses de « L'Orient-Le Jour ».

Désormais, comme sorti d'une toile de Georges de La Tour, le monde maintient le regard courbé sur ces petites germes numériques qui lui poussent en un instant au creux de la paume. Ces graines du savoir qui font de nous des laboureurs de l'univers et permettent de briser les frontières, de voir grand et de partir au loin, ont vu le jour en Californie au début des années 2000. De toute évidence, il est question du iPhone et de son prédécesseur le iPod conçus par Apple (en 2001 et 2007 respectivement) et des précieux bébés d'équipes dirigées par l'Américano-Libanais Tony Fadell. L'une des têtes pensantes derrière ces deux projets colossaux, l'homme tient d'un laboratoire d'idées à lui seul. Mais loin d'être un nerd, un fondu d'informatique englué sur son écran, Fadell est un «héritier» de cette ère de génies (dont Steve Jobs) qu'il a côtoyés et dont il transmet désormais le savoir à la nouvelle génération, avec son regard bleu sans cesse intrigué par la nouveauté et son sourire en bandoulière de générosité. De fait, dans la lignée de son emploi (choisi) de mentor et investisseur dans des start-up en technologie, il était de passage à Beyrouth où il est intervenu dans les conférences BDL Accelerate à travers une série de talks et conférences.

Parlez-nous de vos premiers pas dans la technologie. Qu'est-ce qui vous a attiré dans ce monde et vous y a conduit ?
Je dois cela à mon grand-père libanais avec qui j'ai grandi dans l'Ohio ! Il avait l'habitude de me donner tous genres d'appareils, en particulier des vieilles radios que je passais mon temps à déconstruire, démanteler. Je voulais absolument comprendre comment ces objets-là étaient créés, bien avant mon premier contact avec un «pur» produit de la technologique.

Comment s'est produit ce premier contact avec un appareil technologique ?
La révélation s'est produite en 1979 lorsque j'ai été confronté au Apple II, qui a sans aucun doute bouleversé ma vision des choses. De suite, je me suis mis à travailler pour pouvoir me l'offrir. C'est ainsi que tout a
commencé.

À propos de votre enfance, quel était votre rêve ultime ?
Je voulais construire, coûte que coûte. C'était presque une frénésie. Je ne sais pas si on peut considérer que cela tient du rêve, mais je me souviens qu'à chaque fois que j'aspirais à quelque chose, je me disais: Je vais créer ça de mes mains. À partir de ma chambre à Detroit, j'ai donc monté une multitude de choses: des petites fusées, des télécommandes, des chemins de fer... Plus tard, je me suis essayé au basket qui m'avait tenté à l'époque. Mais après m'être fait mal au Texas, j'ai accepté que cela n'était pas fait pour moi, que je devais me consacrer à la technologie.

Quels souvenirs marquants retenez-vous de votre expérience chez Apple ?
Je pense instinctivement à trois moments : lorsque j'ai rencontré ma femme qui travaillait également chez Apple, quand je l'ai ensuite demandée en mariage et, finalement, le moment où nous avons annoncé cette nouvelle au reste de l'équipe. Les piliers de ma vie ont tous été liés d'une certaine manière à Apple.

Quelle est la leçon la plus précieuse que vous avez tirée de cette période et de Steve Jobs dont vous étiez très proche ?
Les conseils de Steve raisonnent encore dans ma tête. Il répétait toujours ces trois phrases, devenus des motos: «Ne jamais faire de compromis. Rester un débutant. Savoir dire plus souvent non que oui.»

Comment est née l'idée du iPod, et pourquoi vous aviez perçu le besoin de créer cet appareil à l'époque ?
Au cours des années 90, j'étais DJ à Detroit. Je me déplaçais avec des tas de CD lourds à porter, difficiles à classer, c'était un supplice. Philips Electronics avait introduit à l'époque les audiobooks et je me suis donc demandé pourquoi il n'existait pas un appareil où l'on pourrait stocker notre musique. Grosso modo, l'iPod était ma réponse à cette question. Le plus souvent, ce sont des besoins personnels qui aboutissent à ce genre d'inventions...

À ce moment précis, aviez-vous prédit que cette invention serait «the next big thing», l'une des idées brillantes du siècle ?
Pour avoir fait mes dents dans ce domaine, je peux confirmer qu'il est quasi impossible de prédire un succès ou un échec. J'ai été confronté à plein d'idées que nous pensions être «les» idées, mais qui ont échoué ou sont mortes dans l'œuf. L'essentiel est de prendre ces défaites et d'en extraire la leçon, d'en faire un tremplin vers une réussite. Au final, ce sont ces bas qui permettent de mieux célébrer les hauts. D'ailleurs, parlant de fête, le jour où les produits étaient lancés, Steve Jobs arrivait à l'atelier et déclarait: «Il faut changer ceci, fignoler cela.» Nous n'avions presque pas le temps de savourer ces moments de gloire.

Après une première révolution baptisée iPod, comment s'est produit le passage à la vitesse supérieure avec votre autre invention de taille, l'iPhone ?
Suite au lancement et au succès immédiat du iPod, les gens se sont retrouvés avec deux appareils dans la main, et donc un dilemme camouflé: l'iPod et leur téléphone mobile. Je me suis dit que s'ils avaient à faire un choix, ils laisseraient certainement tomber leur iPod. Alors, en toute logique, le challenge suivant a été de jumeler ces deux appareils. Sauf que nous avons dû créer deux versions du iPhone avant d'obtenir la version finale qui a été lancée sur le marché. Un véritable travail de coulisses, en d'autres termes.

Maintenant que vous vous consacrez aux investissements dans les start-up et aux jeunes entrepreneurs, quel est le conseil que vous leur donneriez ?
À mon avis, l'essentiel est d'avoir un mentor solide en qui ils ont confiance et à qui ils peuvent se référer à tout moment, comme un enfant se retourne vers ses parents au début de son parcours. C'est ainsi que je conçois les start-up. Dans cette optique, il faut être extrêmement résilient et garder en tête l'image d'un footballeur qui tacle la balle des centaines de fois avant de marquer un but. Ne jamais baisser les bras et se faire à l'idée que le succès ne nous attend pas à la porte de la fac!

Quels sont les indices qui vous permettent de flairer une start-up ou une idée qui aurait du potentiel? Dans quelle mesure la chance entre-t-elle dans cette équation?
Je me fie à la passion dans les yeux, celle qui ne trahit pas. Je suis attentif également à l'humilité, celle qui pousse les entrepreneurs à accepter l'aide et la rechercher, surtout.

Vos inventions ont sans aucun doute révolutionné l'industrie et même le monde. Aujourd'hui, après ces deux accomplissements colossaux, quelle est votre prochaine mission ?
J'ai eu la chance de côtoyer Steve Jobs, de travailler de près avec le créateur du Mac, de me frotter à tous ces héros qui ne sont malheureusement plus, aujourd'hui. Je me dois donc d'être le trait d'union entre deux générations, de porter le flambeau et transmettre le savoir de ces génies que j'ai connus à ceux qui démarrent dans l'industrie aujourd'hui.

En avez-vous repéré à Beyrouth ? Dans le cadre des forums «BDL Accelerate» où vous êtes intervenu, quels ont été vos ressentis et opinions par rapport au marché des start-up ?
Oui ! La dernière fois que je suis venu à Beyrouth c'était il y a dix-huit ans et j'ai palpé un bond de Sept-Lieues qui a eu lieu depuis. J'ai eu la chance de pouvoir discuter avec 30 start-up dont 5 ou 6 ont retenu mon attention et sur lesquelles je voudrais me pencher pour une potentielle collaboration. Cela devrait vous donner de l'espoir en l'avenir!

 

 

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