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Nos Lecteurs ont la Parole - Ronald BARAKAT

Du gouvernement bancal à la gouvernance locale

« Le ministre de l'Environnement Mohammad Machnouk a appelé la société civile à œuvrer aux côtés des municipalités pour le tri, le compostage et le recyclage des déchets, au lieu de simplement publier des déclarations et organiser des sit-in »
(Lu dans « L'Orient-Le Jour »).

Photo D.R.

Force est d'admettre que le ministre de l'Environnement a raison quant au rôle que devrait jouer la société civile dans la gestion des déchets, ou plutôt « l'ingestion des déchets », après plus d'un an d'inhalation nocive et de consommation indirecte qui nous conduisent, lentement mais sûrement, au « pavillon des cancéreux ».
Afin de sauver des vies et rendre la vie des citoyens moins insupportable, il est demandé à certaines composantes de la société civile, surtout celles portant le label collectifs, de passer du stade oral (cris, chahuts, insultes, vociférations, etc.) au stade pratique et pragmatique de participation aux efforts de sortie de crise en mettant la main à la pâte visqueuse, avec ou sans gants. D'autant plus que l'oralité discordante du mouvement civil n'a pas réussi à dissiper l'haleine malodorante des responsables et s'est avérée inopérante, voire nuisible, avec l'avortement de la révolution civile de l'été 2015, pourtant si prometteuse.
On ne peut plus se contenter de lancer « Vous puez ! » à la face des puants qui s'en battent royalement l'œil, ni filmer et diffuser les massifs montagneux artificiels et pestilentiels qui serpentent les ponts et les chaussées. On ne peut plus se contenter de catapulter des sacs d'ordures dans la cour des corrompus, qui nous le rendent au centuple et au quotidien, et ce impunément (d'ailleurs on ne le fait plus, de guerre lasse). On ne peut compter sur des ordures pour nous débarrasser des ordures. Il faut, hélas, se charger de le faire soi-même.
Devant l'incurie incurable des responsables qui empuantissent et empoisonnent notre espace perçu et vécu, devenu notre cimetière, face à la faillite d'un gouvernement central bancal, il faut se tourner résolument vers les pouvoirs locaux, à savoir les municipalités, associer les électeurs aux élus locaux pour prendre en main son destin, presser ceux d'entre eux qui n'ont toujours pas éprouvé l'urgence de la situation et instaurer une forme de gouvernance généralisée, décentralisée et coordonnée des déchets solides, de sorte à prendre carrément la relève du pouvoir central, défaillant et puant.
Il faut saisir l'opportunité de ce lâchage gouvernemental en faveur d'une décentralisation de la gestion des déchets et d'une responsabilisation des municipalités, qui d'ailleurs figure dans le plan du gouvernement, pour prendre la chose résolument et systématiquement en main, de A à Z, le A étant le tri à la source, et le Z, zéro déchet. Il reviendra aux pouvoirs locaux, joints des pouvoirs civils, de délimiter et d'administrer leurs propres secteurs et régions en mettant en œuvre les moyens de collecte et en aménageant des usines ou centres de tri, de compostage et de recyclage de sorte à envoyer le minimum possible en décharge. Les ressources issues des opérations de compostage et de recyclage seront mises à profit pour le bien public. Des initiatives réussies, sur le plan interne, peuvent être prises pour modèles, outre les meilleures pratiques que l'on retrouve à l'extérieur, même dans les pays perçus comme moins développés. Les experts en la matière, parmi les activistes, ne manquent pas. Il s'agit de les écouter et il s'agit pour eux d'écouter les autres, et non seulement de s'écouter eux-mêmes. Il s'agit pour chacun de sortir de son ego, de sa soif de visibilité et de mettre son moi au service du soi collectif. Sinon il n'y aura plus ni moi, ni toi, ni soi.
Une mobilisation organisée et coordonnée des forces vives de la société, une union des pouvoirs civils et des pouvoirs locaux sont requises en ces circonstances dramatiques pour mettre le holà aux deux types d'ordures (celles aux sens propre et celles au sens figuré).
Il conviendra aussi pour les deux pouvoirs, civils et locaux, de s'ouvrir au pouvoir politique représenté par les partis en faisant abstraction des considérations d'ordre politique et confessionnel pour une question qui touche à la santé publique de toutes les communautés, toutes politiques confondues, et à la préservation de l'environnement. Il faut sortir de la ritournelle « Tous, c'est-à-dire tous » qui met les pommes saines et pourries dans un même panier. Il y a de tout partout, même au sein de la société civile, hélas. Travaillons proprement avec les gens propres, qui qu'ils soient et d'où qu'ils viennent, et encourageons ceux qui ne le sont pas à se nettoyer et se joindre à la grand-messe civile et civilisée. Le parti Kataëb a dernièrement donné le ton pour une prise en charge décentralisée. Profitons de ce levier et de son assise populaire pour nous décharger de nos ordures. Et allons chercher d'autres leviers et d'autres assises parmi les partis, fussent-ils du mois de mars ou du mois de thermidor, et parmi les agences et les organisations locales et internationales pour décupler nos pouvoirs d'administration des déchets.
Sur la question budgétaire, en plus des fonds officiels qui reviennent de droit aux municipalités, qu'il faudra obtenir à l'arraché, jusqu'au dernier sou, et en redemander, frappons aux portes des donateurs de bonne volonté, qui voudront bien soutenir les « orphelins » d'une république délabrée et déplumée (par ses propres hôtes), qui ont décidé de se prendre eux-mêmes sous leur propre aile. Que les ONG locales spécialisées forment un consortium pluridisciplinaire et soumettent des propositions aux agences, institutions, organisations internationales à des fins de financement, à la faveur d'un système qui permet des donations directes aux ONG locales pour l'exécution de projets. Le secteur privé peut également être mis à contribution. Des entreprises seraient plus qu'enchantées de relever leur image de marque en sponsorisant des projets de gestion des déchets pour une région donnée. Des opérations de levée de fonds auprès du public libanais et de la diaspora libanaise pourraient également être menées par les moyens appropriés, avec l'aide de collecteurs de fonds (fundraisers) et les médias traditionnels et sociaux (donate button, dîner de gala, téléthon...).
Cessons de pleurnicher ou de récriminer, prenons-nous en main, retroussons nos manches et mettons-nous à l'œuvre. Sur la question de gestion des déchets, faisons notre deuil du père – de l'État –
et comportons-nous comme l'aîné(e) de la famille.

Force est d'admettre que le ministre de l'Environnement a raison quant au rôle que devrait jouer la société civile dans la gestion des déchets, ou plutôt « l'ingestion des déchets », après plus d'un an d'inhalation nocive et de consommation indirecte qui nous conduisent, lentement mais sûrement, au « pavillon des cancéreux ».Afin de sauver des vies et rendre la vie des...

commentaires (1)

Que Monsieur Mohammad Machnouk commence par faire le nécessaire pour aider effectivement les municipalités..."au lieu de simplement faire des déclarations" lui aussi ! Qu'il aille un peu se balader dans d'autres pays pour voir comment ceux-ci ont organisé le ramassage des ordures, et tout ce qui s'ensuit. Qu'il élabore avec le ministre de l'éducation un programme dans les écoles pour apprendre aux élèves dès les premières années scolaires la propreté partout, c'est-a-dire de ne pas jetter les emballages de friandises, bouteilles d'eau par terre, etc. De même les initier au triage, déjà chez eux. En leur expliquant le pourquoi et le comment. Cela fonctionne dans les autres pays, alors pourquoi pas au Liban ? Faudra bien commencer par changer nos comportements, en privé et en public. Quant à nos IRRESPONSABLES-INCAPABLES...tant que nous avons les mêmes...rien à espérer de leur part ! Irène Saïd

Irene Said

15 h 45, le 03 octobre 2016

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Commentaires (1)

  • Que Monsieur Mohammad Machnouk commence par faire le nécessaire pour aider effectivement les municipalités..."au lieu de simplement faire des déclarations" lui aussi ! Qu'il aille un peu se balader dans d'autres pays pour voir comment ceux-ci ont organisé le ramassage des ordures, et tout ce qui s'ensuit. Qu'il élabore avec le ministre de l'éducation un programme dans les écoles pour apprendre aux élèves dès les premières années scolaires la propreté partout, c'est-a-dire de ne pas jetter les emballages de friandises, bouteilles d'eau par terre, etc. De même les initier au triage, déjà chez eux. En leur expliquant le pourquoi et le comment. Cela fonctionne dans les autres pays, alors pourquoi pas au Liban ? Faudra bien commencer par changer nos comportements, en privé et en public. Quant à nos IRRESPONSABLES-INCAPABLES...tant que nous avons les mêmes...rien à espérer de leur part ! Irène Saïd

    Irene Said

    15 h 45, le 03 octobre 2016

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