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Liban - La situation

La « petite phrase » du ministre, le rappel à l’ordre du président

Le ministre de l’Intérieur vient de se faire proprement, quoique indirectement, taper sur les doigts par son propre mentor, le président de la République. En un moment de distraction, dimanche soir à la télévision, Marwan Charbel est allé jusqu’à oublier les fonctions qu’il occupe pour faire part aux téléspectateurs de son « sentiment » que les élections législatives n’auront pas lieu à la date prévue, c’est-à-dire le 9 juin prochain. Personne ne veut de ce scrutin, a cru bon d’ajouter le ministre, non sans avoir souligné que lui-même « préfère la sécurité aux élections ».
Sans chercher le moins du monde à donner l’impression de vouloir tancer un ministre qui fait partie de son « lot » au sein du gouvernement, le président Michel Sleiman a su trouver hier les mots qu’il faut pour dénoncer une tentative insidieuse de la part de certains milieux de « normaliser » auprès de l’opinion publique l’éventualité d’un ajournement des élections.


Selon un communiqué de la présidence, M. Sleiman a émis l’espoir que les commissions parlementaires, qui ont repris hier les discussions autour de la réforme électorale, « tiendront compte de l’intérêt national et se rappelleront du caractère inéluctable du déroulement des élections en temps prévu, en vertu du principe fondamental qu’est l’alternance du pouvoir ».


Mais le chef de l’État ne s’est pas contenté de ce rappel à l’ordre. Il a également souligné, toujours à l’adresse des députés, la nécessité de « prendre leurs distances vis-à-vis des projets qui renforcent la polarisation confessionnelle et sectaire, car ils sont contraires à la Constitution et de nature à mettre en danger la paix civile ». Une manière pour le président de réaffirmer, sous des considérations d’ordre général, son opposition au projet du Rassemblement orthodoxe et son intention, maintes fois exprimée, d’attaquer ce projet devant le Conseil constitutionnel s’il est adopté par la Chambre.


Cela étant dit, M. Charbel n’a pas entièrement tort. Certes, son rôle n’est pas de jouer à l’observateur politique qui se contente de dresser un tableau de la situation. Et il n’est surtout pas censé nous indiquer ses préférences de telle manière à mettre en opposition sécurité et démocratie. À la base, ces deux concepts ne sont nullement opposés. S’ils le sont aujourd’hui au Liban, c’est que la démocratie et les élections y sont l’objet d’un chantage et il revient au ministre de l’Intérieur de le dénoncer, pas de paraître s’y associer.


D’autre part, en affirmant que tout le monde est d’accord pour ajourner les élections, le ministre de l’Intérieur cherche à noyer le poisson. Aujourd’hui, il semble clair que le Hezbollah fait tout son possible pour obtenir un tel ajournement, en chargeant comme de coutume ses alliés, notamment aounistes, de l’exécution des travaux nécessaires à cette fin.
Attaqué de toutes parts et confronté au refus tranchant de la part du courant du Futur d’un bazar lui permettant de conserver ses armes et son statut particulier, le parti de Dieu ne veut en aucun cas prendre le risque de perdre une nouvelle fois les élections. D’où son ralliement à deux types de propositions de loi électorale uniquement : celles qui donneraient une victoire nette au 8 Mars (sans Walid Joumblatt) ou celles qui conduiraient à une impasse dans la réforme électorale, comme par exemple le projet « orthodoxe », dont l’aspect problématique, pour ce qui est de la conformité à la Constitution et au pacte national, est clairement établi.

 

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Or, il est nettement moins certain que cette volonté d’ajournement du scrutin se retrouve aujourd’hui dans les rangs du 14 Mars et tout particulièrement du courant du Futur. C’est seulement s’il est mis dos au mur par le projet « orthodoxe » que ce dernier, ainsi d’ailleurs que le PSP et les chrétiens indépendants, pourrait éventuellement être tenté d’adhérer à l’idée d’un tel report, quoique dans son dernier discours Saad Hariri avait écarté un tel scénario.
La bataille, à ce stade, bat son plein. Le procédé n’est pas dépourvu de suspense hitchcockien. Hier soir, les commissions ont voté l’article 1 (amendé) de la proposition dite « orthodoxe », qui concerne uniquement le nombre total de sièges et ne pose donc pas de problème.


Face à la velléité des commissions de passer à l’article 2, qui contient l’essence de ce projet, les députés haririens et joumblattistes ont décidé de ne pas se présenter à la réunion d’aujourd’hui. Que fera le président de la Chambre ? Ira-t-il de l’avant ? Et les alliés du Futur ? Sur combien de peaux de banane devront-ils glisser encore ? Des éléments de réponse pourraient être donnés dès ce matin.

 

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commentaires (3)

Ajournement du scrutin le plus court chemin dans un pays ou les responsables sont toujours irresponsables . Antoine Sabbagha

Sabbagha Antoine

08 h 53, le 19 février 2013

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Commentaires (3)

  • Ajournement du scrutin le plus court chemin dans un pays ou les responsables sont toujours irresponsables . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    08 h 53, le 19 février 2013

  • Il n'a fait que révéler le SECRET DE POLICHINELLE...

    SAKR LEBNAN

    06 h 24, le 19 février 2013

  • ben,il a dit tout haut ce que beaucoup pensent tout bas...parceque parti comme c'est parti,c'est bien ce qui nous pend au nez,en fait.On peut le regretter,bien sûr...mais bon,on est au Liban,n'est ce pas?

    GEDEON Christian

    04 h 52, le 19 février 2013

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