D’un vendredi l’autre. L’humeur n’est pas la même. Le ton n’est pas le même. Le phrasé non plus. L’index n’est pas le même. À l’occasion du décès du père de l’un de ses prédécesseurs, Abbas Moussaoui, Hassan Nasrallah était loin de la polémique post-BIEL du 17 février. Comme la semaine dernière, il a naturellement parlé pour ne rien dire, sauf que cette fois, il y a du nouveau. Un nouveau bref, pas très développé, mais un nouveau lourd. Hassan Nasrallah s’est dédit. Ou alors, il a fait son mea culpa. Ou alors, il a compris qu’il était dans une impossible impasse. Ou alors, il a fait ce qu’il réussit en maître : se moquer de ses compatriotes. Mais il l’a fait.
En quelques mots, Hassan Nasrallah a dynamité au moins les deux tiers du cahier des charges du Hezbollah, de sa raison d’être. Ce Restons à l’écart des problèmes régionaux, quelle que soit sa sincérité, est un point d’inflexion inouï : c’est comme si Marc Lévy choisissait de se consacrer enfin à la littérature ou Haïfa Wehbé décidait de ne plus enregistrer que des reprises de la Callas. Ce Restons à l’écart des problèmes régionaux vient, mine de rien, de mettre le parti chiite au quasi-chômage technique. Même d’éventuels nouveaux 7 Mai sont (momentanément) écartés : Hassan Nasrallah veut garder le cabinet Mikati en place.
Même s’il ne le montre plus souvent depuis plusieurs mois, voire depuis quelques années, le patron du Hezb est une bête politique d’une intelligence supérieure. Bien sûr qu’il est conscient de la fin d’un monde en Syrie, de la chute plus ou moins rapide de la maison Assad ; en assurant son minimum syndical. En voulant le chaos pour la Syrie, les USA et Israël le veulent aussi pour le Liban. Bien sûr qu’il est conscient de la fin d’une ère, la fin d’une Syrie cordon ombilical entre l’Iran et le Hezboland. Bien sûr qu’il est conscient que rien n’est éternel en Iran, justement, qu’un peuple qui a décapité la Savak peut tout faire, même mettre un terme à la dictature des pasdaran. Mais surtout, Hassan Nasrallah a entendu la foule palestinienne pro-Hamas asséner, aux tympans d’un Ismaïl Haniyeh tétanisé, ces mots impensables, indicibles il y a trois mois : Ni Iran ni Hezbollah, Syrie islamique ; dégage Bachar, dégage, espèce de boucher.
Tellement impensable que cela en devient pathétique : jamais le Hezb n’a été aussi isolé, aussi seul, aussi déchu, surtout par ceux-là mêmes qui l’avaient placé sur le plus haut des piédestaux. L’idole est tombée. L’idole va bientôt être brûlée sur le bûcher de sa propre, de son infinie vanité. Bien sûr, Hassan Nasrallah en a pris note. Il ne lui reste plus comme alliés au Liban que Michel Aoun, une petite partie des cadres du CPL et une infime proportion des partisans aounistes.
Et cela, cela doit sacrément remonter le moral du secrétaire général du Hezbollah : lorsque tout va mal, au point de reconsidérer la définition même d’un concept (le Hezbollah), sa nature et sa culture, un peu de soutien n’est jamais malvenu. D’autant que Michel Aoun a choisi le même jour pour sortir d’énièmes et hallucinés lapins de son béret orange, comme autant de pains bénis offerts à son partenaire chiite : le choix du très lahoudo-hezbollahi Sélim Jreissati en lieu et place du très remplaçable Charbel Nahas (le nouveau ministre du Travail, beaucoup plus impressionnant et judicieux dans un tribunal que dans le maelstrom de la politique a du souci à se faire...) et cette phrase, terrible, pitoyable, digne de l’ancien commandant en chef de l’armée qui a brillé par tout sauf par sa maîtrise de la stratégie et de la guerre : Assad ne sera pas vaincu ; Homs sera la dernière bataille et ensuite, nous passerons à la phase de nettoyage. Hassan Nasrallah n’en demandait probablement pas tant.
Si le peuple de Syrie n’est pas près d’oublier cet obscène et nouvel affront, le patron du Hezbollah, lui, doit très certainement s’inquiéter. Parce que, n’est-ce pas, mieux vaut cent adversaires éclairés, raisonnables, qu’un seul allié furieusement, férocement à côté de la plaque.
- - Je constate que la nomination de l'excellent constitutionnaliste Jreissati par GMA irrite quelques uns qui auraient préféré que lui soit retiré au représentant officiel des Chrietiens et homme fort du gouvernement , le ministère du travail pour lui réduire le nombre de maroquins de 10 à 9 .. Je rappelle au passage à ces mémoires courtes qu'aucun parti politique Chrétien n'a jamais obtenu a lui seul un si grand nombre de ministères et de cette qualités , malgrés les trois ministres " offerts " gracieusement au président par le chef du CPL . Je rappelle aussi à ceux qui rêvent et espèrent , que Les cadres et les partisans du CPL sont tous très satisfaits de cette nomination et n'ont jamais été autant soudés et unis comme ils le sont aujourd'hui autour de leur chef , et sont déjà prêts pour la troisième grande Victoire de 2013 , puisque c'est bien de cela qu'il s'agit , si élections il y a bien sùr ..
11 h 39, le 25 février 2012