Le vent d'optimisme qui a soufflé un moment sur les milieux politiques au sujet d'un éventuel déblocage de l'impasse présidentielle est en train de se dissiper. Des sources proches du 8 Mars révèlent que la logique du déblocage reposait sur le fait que le chef du courant du Futur Saad Hariri semblait de plus en plus favorable à la conclusion d'un accord portant sur l'élection du général Michel Aoun à la présidence moyennant sa désignation à la tête du nouveau gouvernement.
S'il est vrai que son camp était divisé sur la question, entre ceux qu'on appelle « les faucons » et les « colombes », la balance interne au sein du courant du Futur semblait pencher en faveur des défenseurs de cette théorie, sachant que les problèmes financiers de M. Hariri ne cessaient d'augmenter sans aucune visibilité d'amélioration.
Mais c'est justement à ce moment précis, poursuivent les sources proches du 8 Mars, que les autorités saoudiennes ont décidé d'inviter le chef du courant du Futur à un iftar royal à l'occasion de la fête du Fitr. Sans préambule ni déclarations d'introduction, Saad Hariri a donc été convié à participer au repas royal marquant la fin du mois de jeûne, au même titre que d'autres invités prestigieux dans le monde arabo-musulman. Plus même, le roi a reçu l'ancien Premier ministre du Liban pour un entretien privé au cours duquel, dit-on, la question de la présidentielle libanaise n'a pas été abordée. Immédiatement après ce développement symbolique, des informations sur un début de solution de la crise financière de Saad Hariri (notamment les difficultés rencontrées depuis plusieurs mois par sa société Saudi-Oger) ont commencé à circuler dans les médias.
Selon les sources précitées proches du 8 Mars, il ne faut pas être particulièrement futé pour en conclure que les autorités saoudiennes ont décidé d'aider Saad Hariri pour l'empêcher de conclure un accord avec le Hezbollah et le général Michel Aoun.
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Le message était donc clair, sachant qu'il y a rarement des coïncidences en politique, et même en économie et finances. Les sources proches du 8 Mars estiment ainsi qu'en mettant soudainement un terme à l'exclusion dont était victime Saad Hariri depuis plusieurs mois et en trouvant une solution même partielle à la situation de Saudi-Oger qui était menacée par la faillite, les autorités saoudiennes ont voulu montrer que l'heure d'un compromis politique n'a pas encore sonné au Liban, où, pour eux, la priorité reste à l'affaiblissement du Hezbollah considéré comme l'instrument de l'extension de l'influence iranienne dans la région arabo-musulmane. Cela ne signifie pas que le courant du Futur serait appelé à se transformer en milice armée face au Hezbollah, mais il resterait la formation politique la plus habilitée à faire un équilibre politique avec ce parti, en l'empêchant de marquer des points sur la scène interne. D'ailleurs, à l'heure actuelle, tout dossier ouvert est en train de devenir un sujet de conflit et de polémique.
Est-ce à dire qu'après les rumeurs sur une élection présidentielle après la réunion prolongée de trois jours de la conférence de dialogue prévue les 2, 3 et 4 août, convoquée par le président de la Chambre Nabih Berry, il ne faut donc plus s'attendre à aucun déblocage ? Les sources proches du 8 Mars affirment qu'il faudrait un véritable miracle pour aboutir à un déblocage présidentiel dans un contexte aussi tendu régionalement.
La nouvelle équation serait donc la suivante : soit l'élection de Michel Aoun à la présidence de la République, soit des élections parlementaires avant la présidentielle au printemps prochain. Toutefois, un imprévu est toujours possible, d'autant que la situation régionale semble soudain être prise de convulsions. Le coup d'État manqué en Turquie pourrait ainsi marquer un tournant décisif si les pronostics sur un désengagement progressif de la Turquie en Syrie étaient vérifiés. Un tel désengagement pourrait en effet pousser les dirigeants saoudiens à chercher des solutions, même partielles, sur certains des nombreux dossiers conflictuels avec l'Iran. Les négociations sur le Yémen entre les délégations antagonistes ont ainsi repris au Koweit, après l'échec de l'offensive annoncée contre le fief d'Ansarallah à Sanaa.
En Syrie, le régime et ses alliés ont réussi à resserrer l'étau autour d'Alep, coupant les chemins de ravitaillement aux combattants de l'opposition ( en particulier le Front al-Nosra) installés dans une partie de la ville. Sans être directement lié au coup d'État manqué en Turquie, ce développement sur le terrain syrien n'aurait peut-être pas été possible avant l'ouverture d'Ankara en direction de Moscou et les derniers pourparlers américano-russes sur la Syrie.
Toutes ces données pourraient donc favoriser une brèche dans l'impasse politique actuelle au Liban, même si les sources précitées proches du 8 Mars n'y croient pas trop, considérant que le Liban ne figure pas en tête des priorités internationales, surtout en cette période compliquée. Ce qui compte pour la communauté internationale, c'est que la stabilité y soit préservée. Ce qui est relativement le cas si on compare la situation au Liban à celle des pays voisins ou concernés par la crise syrienne...
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LA LIBRE EXPRESSION
15 h 38, le 19 juillet 2016