Une violente polémique oppose depuis hier le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, à son collègue des Télécoms, Boutros Harb, au sujet de plusieurs dossiers du ressort du ministère dirigé par ce dernier.
L'origine de la polémique remonte au Conseil des ministres de jeudi, auquel M. Harb n'assistait pas. M. Bassil avait quand même demandé que des questions concernant les télécoms soient débattues en réunion. « À chaque fois, ils trouvent des excuses afin d'éviter ces dossiers, prétextant des élections législatives ou d'autres questions », avait lancé le chef de la diplomatie. Le Premier ministre, Tammam Salam, avait contourné la demande de M. Bassil, d'autant qu'elle intervenait à la veille des municipales du Liban-Nord dans le cadre desquelles M. Harb parraine une liste à Tannourine.
Au quotidien al-Joumhouriya, M. Bassil a surenchéri en affirmant hier que « toute une direction ministérielle a été abolie par la société Ogero (qui gère les télécoms libanaises) et le ministère des Télécoms », dans une allusion claire à son collègue.
« Centres d'embauche pour ses proches »
La réponse de Boutros Harb n'a pas tardé. Lors d'une conférence de presse, hier, le ministre a riposté violemment à ces attaques : « Le gouvernement, formé de pôles antagonistes, s'est transformé en un conseil de partage des parts et une tour de Babel minée par les conflits, a-t-il tonné. Chaque ministre n'en fait qu'à sa guise, et ce sont les intérêts personnels et partisans qui priment, sans quoi le gouvernement est menacé de blocage. »
« Si ma démission pouvait faire avancer les choses, j'aurais démissionné, a repris le ministre. Mais je suis contraint de travailler, et contre mon gré, au sein de ce gouvernement. » Puis d'ajouter : « Je n'accepte pas que le ministère que je dirige soit détruit par des hommes rancuniers qui ne font que mentir et accuser les autres. Il est de mon devoir de leur faire face. »
M. Harb s'est ensuite lancé dans une attaque frontale contre M. Bassil, qui l'avait précédé à la tête du ministère des Télécoms. « Ce qui importe au ministre Gebran Bassil, a-t-il accusé, c'est de paralyser le ministère que je dirige (...). Il a fait des promesses qu'il n'a pas tenues, défendu des projets suspects tel le barrage de Janné et profité des deniers publics. Il a transformé les institutions publiques en officines d'embauche pour ses proches. »
Accusé par M. Bassil d'avoir commis des irrégularités dans le cadre des contrats liant le ministère des Télécoms à Ogero, M. Harb a vigoureusement démenti : « Je n'ai jamais signé de contrat avec Ogero sans qu'il n'ait été auparavant examiné par la Cour des comptes », a-t-il assuré.
Gabriel Murr et les réseaux Internet illégaux
Par ailleurs, Boutros Harb a abordé le dossier des réseaux Internet illégaux, se défendant cette fois contre ce qu'il a qualifié de « campagne de la part de la chaîne MTV et de ses propriétaires », en allusion à son propriétaire Gabriel Murr.
Ces réseaux, dont certains présumés liés à Israël et qui distribuaient entre autres leurs services à des administrations publiques libanaises, notamment des services de sécurité, ont été découverts il y a plusieurs semaines. Quatre relais Internet illégaux ont été repérés dans les secteurs du jurd de Denniyé, au Liban-Nord, de Ouyoun el-Simane et de Faqra, dans le Kesrouan, ainsi que dans le secteur de Zaarour, dans le Metn.
« La campagne menée par la MTV contre le ministère des Télécoms s'est transformée en une campagne contre ma personne », a dénoncé M. Harb. Il a rappelé que la station illégale située à Zaarour « appartient à la MTV ».
« Gabriel Murr m'a demandé de dire qu'il n'y a aucune infraction au niveau de cette station, mais j'ai refusé, car je n'ai pu inspecter cette station pour m'en assurer, et j'ai entre les mains un rapport qui dit le contraire et que je ne peux contredire », a déclaré M. Harb. « J'ai dit aux propriétaires de la MTV que j'allais laisser cette affaire entre les mains de la justice, chose qui ne leur a pas plu, ce qui a poussé la chaîne à intensifier sa campagne contre moi », a-t-il conclu.
commentaires (6)
Ce n'est qu’un mince "bonheur", une médiocrité pareille !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
16 h 17, le 29 mai 2016