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Liban - Décryptage

Derrière la bataille municipale de Jounieh, l’ombre d’un général...

Jeudi soir, la liste victorieuse à Jounieh, sous la houlette de Juan Hobeiche, célébrait sa victoire avec ses électeurs. L'atmosphère était au soulagement, après une bataille rude et serrée jusqu'au bout. Mais soudain, vers 23h, la foule est comme entrée en transe, des cris ont commencé à fuser et les gens se sont précipités vers l'une des entrées pour apercevoir un invité surprise venu présenter ses félicitations aux vainqueurs. Il s'agissait du général Chamel Roukoz. La foule qui s'est agglutinée autour de lui ne cherchait pas seulement à accueillir une figure charismatique. Elle avait compris que le général Roukoz était non seulement l'un des artisans de cette victoire, mais aussi un des enjeux de cette bataille qui a été d'une violence sans précédent pour une élection municipale.

Pour le CPL, la tendance au départ était pourtant de parvenir au plus grand nombre de compromis possible et de ne mener des batailles que lorsqu'il n'y a pas d'autres possibilités. Le CPL considérait en effet qu'il avait d'autres priorités que de se lancer dans des campagnes électorales dans les villages et les localités. C'est notamment dans cette logique qu'il avait préféré ne pas mener de bataille à Beyrouth en intégrant la liste des « Beyrouthins »...Le CPL préférait donc mener un nombre réduit de batailles, juste pour le symbole, et rester en général en dehors de la frénésie électorale. Comme le général Roukoz compte en principe présenter sa candidature au Kesrouan pour les prochaines législatives (quand elles auront lieu) et comme il a de bonnes relations avec la plupart des parties influentes dans cette région, il a pris en charge les négociations en vue d'aboutir à un compromis qui éviterait la bataille à Jounieh. Les discussions tournaient autour de deux points : d'abord, donner la priorité à une liste de compromis dont le général Aoun choisirait le président, ensuite convaincre Juan Hobeiche (qui se considérait comme l'homme fort de Jounieh et qui était déterminé à mener la bataille) à jeter du lest aux autres protagonistes en acceptant d'inclure dans sa liste des représentants de toutes les parties.

Toutefois, cette volonté de compromis a été interprétée comme un signe de faiblesse de la part du CPL par les partenaires potentiels et ils ont commencé à multiplier les conditions et les exigences. De plus, pour les pôles traditionnels du Kesrouan, comme Mansour el-Bone et Farid Haykal el-Khazen, les municipales de Jounieh étaient devenues l'occasion de défaire le général Roukoz pour sa première initiative publique. Dans leur optique, si les efforts de Roukoz vers le compromis n'aboutissent pas et s'il perd la bataille des municipales à Jounieh, il sera mal parti pour celle des législatives au Kesrouan avec, comme premier test, un échec. Sans oublier le fait qu'une défaite dans la bataille municipale de Jounieh serait interprétée politiquement comme un affaiblissement considérable de la popularité du CPL (ce qui pourrait être instrumentalisé dans le dossier présidentiel ) et comme un camouflet personnel pour le général Roukoz, qui a annoncé son intention d'entamer une carrière « au service de la chose publique », lors de la manifestation de solidarité avec lui, après son départ de l'armée.

C'est donc autour de ce point que se sont cristallisés les intérêts de l'alliance qui a voulu défaire Juan Hobeiche. Il y avait ainsi Mansour el-Bone et Farid Haykal el-Khazen, mais aussi les Forces libanaises qui ne voyaient pas non plus d'un très bon œil les visées du général Roukoz sur le Kesrouan, sachant que l'ancien chef des commandos de l'armée n'est pas membre du CPL et reste une énigme pour de nombreuses composantes politiques, n'étant pas « un homme du sérail » et ayant un profil atypique dans le monde politique. Souhaitant sans doute donner une leçon précoce à ce rival potentiel, ces parties ont convaincu Nehmat Frem de se joindre à elles face à la liste de Juan Hobeiche. Ayant compris qu'il était un enjeu important de cette bataille, le général Roukoz a alors décidé d'appuyer Juan Hobeiche, le considérant comme la pierre angulaire de la confrontation.

En même temps, il a continué à tenter de rapprocher les protagonistes et de trouver des compromis, tout en étant convaincu qu'en réalité, la bataille était inévitable. Après les élections, il a d'ailleurs eu un long entretien avec Nehmat Frem, autour d'un déjeuner, pour remettre les points sur les « i » et essayer de comprendre les véritables raisons qui ont mené à la bataille de Jounieh. Les deux hommes ont eu une franche explication et il est devenu clair qu'ils ont été entraînés vers une bataille dont les enjeux dépassaient la municipalité de Jounieh. Frem aurait ainsi précisé qu'il ne veut pas d'une guerre fratricide au Kesrouan, même s'il a été poussé et presque contraint à mener la bataille de Jounieh, et Roukoz a affirmé qu'il n'a pas, et n'aura jamais, l'intention de briser et d'éliminer les leaderships traditionnels et familiaux au Kesrouan, ni dans toute autre région du Liban. D'ailleurs, deux des membres de la liste dite des familles qui ont été élus, Silvio Chiha et Rodrigue Fenianos, étaient présents à la réception donnée par Juan Hobeiche jeudi soir. De même, le général Roukoz a effectué tout au long de la semaine dernière une tournée dans toutes les municipalités du Kesrouan pour féliciter les vainqueurs quels qu'ils soient. La page des municipales de Jounieh est donc tournée. À chacun d'en tirer les leçons.

 

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Jeudi soir, la liste victorieuse à Jounieh, sous la houlette de Juan Hobeiche, célébrait sa victoire avec ses électeurs. L'atmosphère était au soulagement, après une bataille rude et serrée jusqu'au bout. Mais soudain, vers 23h, la foule est comme entrée en transe, des cris ont commencé à fuser et les gens se sont précipités vers l'une des entrées pour apercevoir un invité surprise...

commentaires (9)

- Est-ce donc là ce "Général" dont certains ébaubis proclament encore la capacité suprême que la passion ne pouvait ébranler, ni que le trait du hasard ne pouvait effleurer ? - Oui, bon, il est ce qu'il est…. Nulle critique ne peut être murmurée dans son "fief" s’étalant, n’est-ce pas mahééék, de Dbbâïyéhhh ; yâââ¨; à Râbïyéhhh.... Allez, limite ; yîîîh ; Joûnïyéééh !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

17 h 07, le 23 mai 2016

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Commentaires (9)

  • - Est-ce donc là ce "Général" dont certains ébaubis proclament encore la capacité suprême que la passion ne pouvait ébranler, ni que le trait du hasard ne pouvait effleurer ? - Oui, bon, il est ce qu'il est…. Nulle critique ne peut être murmurée dans son "fief" s’étalant, n’est-ce pas mahééék, de Dbbâïyéhhh ; yâââ¨; à Râbïyéhhh.... Allez, limite ; yîîîh ; Joûnïyéééh !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    17 h 07, le 23 mai 2016

  • Un Général peut en cacher un autre , surtout que dans la stratégie , rien n'égale le Phare qu'un Général clairvoyant a instauré dans les sombres chaumières . Inégalable Scarlett pour nous plonger dans l'ambiance , à nous autres novices des mics-macs politicos familiaux .

    FRIK-A-FRAK

    16 h 26, le 23 mai 2016

  • Je m'exprime en ma qualité de Kesrouanais libre. Accorder cinq députés maronites au Kesrouan et priver les maronites et autres chrétiens d'un député maronite au Sud-Liban, je trouve cela illogique et non-équitable. Je souhaiterais que l'on supprime un député au Kesrouan puis l'accorder aux chrétiens du Sud : Yaroun, Rmeich, Aïn-Ebel, Debel, Qawzeh, Alma Chaab...

    Un Libanais

    16 h 01, le 23 mai 2016

  • Vous écrivez : "…sachant que l'ancien chef des commandos de l'armée n'est pas membre du CPL et reste une énigme pour de nombreuses composantes politiques, n'étant pas « un homme du sérail » et ayant un profil atypique dans le monde politique." Voilà donc, le profil idéal d’un "général-gendre" d’entamer une carrière au "service de la chose publique", et s’il a gagné la bataille de Jounieh (capitale des Maronites, selon Michel Aoun), il sera le remplaçant de Aoun dans le Kessrouan, et par extension, un parfait présidentiable, car il ne souffre plus de cet a priori défavorable d’un chef ou membre d’un parti… atypique et ne fait pas partie du sérail… C’est oublier le barrage de Aoun à cette initiative (la présidence de la République, c’est moi ou rien d’autre) et que finalement personne n’a sondé les intentions du Parti de Dieu quant à un éventuel laisser-passer pour les élections. On entend ce genre d’arguments qu’au cas d’un désistement de Aoun, (il est à un âge ou des rois ont abdiqué) un autre prétendant est assuré… , on est de ces pays, quand les militaires sont à la retraite, ils font de la politique.

    L'ARCHIPEL LIBANAIS

    15 h 47, le 23 mai 2016

  • Les retournements de veste ont commencé à la Municipalité de Jounieh Deux élus de la liste perdante Sylvio Chiha et Rodrigue Finianos pour ne pas les nommer s'invitent aux agapes du nouveau Président...l'ennemi d'hier.

    Un Libanais

    15 h 31, le 23 mai 2016

  • Comme d'habitude quoi !! Ce qui m'intrigue c'est qu'elle veut à tout prix mettre les FL dsns cette histoire car pour décryptage madame haddad les FL n'ont pas donner de mots d'ordre de voter pour tel ou tel et surtout n'ont pas mis tout leur poids ! Et Ca madame vous le savez très bien !!

    Bery tus

    15 h 01, le 23 mai 2016

  • Le Général "Tapioca" lui-même, n'aurait pas été aussi bien reçu !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 41, le 23 mai 2016

  • UN REPORTAGE SANS QUEUE NI TETE... DES SUPPOSITIONS ET DES APPRECIATIONS... DE NOTRE TRES CHERE MADAME SCARLETT HADDAD !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 16, le 23 mai 2016

  • Bon, le késchék pour la moûûûnéh de cette année sera de quelle qualité ? A, B ou C ?

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    06 h 50, le 23 mai 2016

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