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Nos Lecteurs ont la Parole - Carol SABA

Ces orthodoxes qui commencent à critiquer ouvertement le processus préconciliaire orthodoxe et ses documents

La Synaxis des primats orthodoxes en janvier dernier.

La dernière charge importante à cet égard est venue le 10 mars dernier, du métropolite Seraphim du Pirée, un des importants diocèses de l'Église orthodoxe de Grèce. Ce dernier vient d'envoyer une lettre « à charge » au saint-synode de l'Église de Grèce contre les documents du futur concile panorthodoxe qui doit se tenir à l'île de Crête du 17 au 27 juin 2016.
Mgr Seraphim critique ouvertement la décision prise à la Synaxis des primats orthodoxes en janvier dernier, de ne faire représenter chaque Úglise orthodoxe au prochain concile que par 24 évêques. Il considère qu'une telle « innovation n'a jamais été vue encore dans l'histoire de l'Église orthodoxe ». Il précise que tous les conciles œcuméniques avaient regroupé non pas une sélection mais le plus grand nombre possible d'évêques. « Selon l'ecclésiologie orthodoxe, chaque évêque, indique Mgr Seraphim, porte la dignité épiscopale d'une manière pleine et entière au nom du plérome de l'Église. Il représente son peuple de fidèles et son diocèse qui, le plus petit qu'il soit, fait partie intégrante de l'Église universelle. Cette innovation porte atteinte, selon Mgr Seraphim, à l'universalité de l'Église et de son épiscopat. Davantage, il a rappelé que la participation aux conciles œcuméniques n'était pas restreinte aux évêques seulement mais elle s'étendait aussi au bas clergé, aux prêtres et diacres ainsi qu'aux moines et laïcs. Ce qui ne sera pas le cas en l'occurrence au prochain concile de Crête, a regretté Mgr Seraphim qui considère que l'organisation du concile de Crête est contraire à la tradition orthodoxe. » Il va jusqu'à déclarer que ce concile panorthodoxe est un concile sans les orthodoxes ! Accusant par ailleurs les organisateurs du concile de vouloir éviter que certaines voix épiscopales orthodoxes puissent s'opposer aux documents du concile qui seraient contraires à la tradition orthodoxe, il contesta aussi sa dénomination comme « concile panorthodoxe » et non pas comme « concile œcuménique ». Cette dénomination « panorthodoxe » est voulue selon Mgr Seraphim par le patriarche œcuménique car Rome, qui n'est pas en communion avec l'Église orthodoxe, ne participera pas. Mgr Seraphim conteste ce raisonnement et considère que la non-participation de ceux qui sont en rupture de communion avec l'Église orthodoxe pour des raisons doctrinales n'enlève rien à la plénitude de la représentation de l'Église et donc du caractère œcuménique de ce concile.
Sur un autre plan, le métropolite Seraphim a contesté le principe du vote : « Une Église, un vote », inclus dans le règlement du concile adopté lors de la Synaxis de janvier dernier. Ce principe place, selon lui, le droit de vote au niveau des Églises et non plus, comme le veut la tradition, sur le plan de chaque évêque qui a le droit et le devoir de voter en conscience !
Le métropolite Seraphim a porté aussi de sévères critiques au document intitulé « Relations de l'Église orthodoxe avec le reste du monde chrétien », adopté lors de la Ve Conférence préconciliaire panorthodoxe qui s'est tenue à Genève du 10 au 17 octobre 2015. Il indiquait que l'Église orthodoxe ne dit rien dans ce document sur les hérésies et les déviances apparues depuis le VIIIe siècle. « C'est comme si, depuis le VIIIe siècle, elles ont cessé d'apparaître dans l'histoire de l'Église. » Il a contesté aussi les effets du paragraphe 22 du document en question qui veut que le critère de vérité ne réside « que dans la structure conciliaire de l'Église ». C'est comme si, commente le métropolite Seraphim, le prochain concile se donne par ces affirmations les bases pour considérer comme infaillibles ses propres décisions. Il ajoute que le critère de vérité n'est pas uniquement dans le concile mais dans la réception de ce concile dans la conscience de l'Église orthodoxe. C'est pour cela, précise-t-il, que beaucoup de conciles censés être œcuméniques ne l'ont pas été par la suite, à défaut de la réception canonique de leur actes par la conscience de l'Église orthodoxe. En conclusion, le métropolite Seraphim a exprimé son désaccord avec l'invitation au concile d'observateurs non orthodoxes, considérant cela comme une pratique de l'Église catholique (Vatican II) qui n'est pas propre à l'Église orthodoxe.
Plusieurs autres interventions en Grèce montrent qu'il y a une montée en puissance des charges et critiques à l'intérieur de l'Église de Grèce à l'encontre du prochain concile panorthodoxe et ses documents. C'est le cas des critiques du professeur Démétrios Tselengides, professeur de théologie à l'école Aristote de théologie de Thessalonique, qui critiqua par deux lettres adressées au saint-synode de l'Église de Grèce plusieurs aspects d'organisation et de préparation du concile. Ces critiques ont été portées plus particulièrement sur le mode de décision du concile, notamment la règle qui veut que les dissidences d'avis par certains évêques membres d'une délégation orthodoxe seront traitées comme une « question interne » à l'Église dont ils sont membres et n'auront pas d'impacts sur la prise de décision du concile. Selon lui, cela est contraire à la tradition orthodoxe car tous les documents proposés au prochain concile contiennent des implications ecclésiologiques, doctrinales et donc théologiques, qui ne peuvent être décidées de la sorte ! De son côté, le métropolite Symeon, de Nea Smirni, la nouvelle Smyrne, a formulé également plusieurs critiques frontales. C'est le cas aussi de l'un des théologiens et prêtres bien connu de Thessalonique, père Théodore Zisis, qui a formulé plusieurs attaques contre les documents et la préparation du prochain concile. Des rencontres aussi s'organisent ici et là en Grèce, comme celle qui vient d'avoir lieu à Petras, le 7 mars dernier, mettant en relief les ambiguïtés des documents préconciliaires.
À noter aussi le débat, qui s'annonce fort, sur le caractère œcuménique ou pas du prochain concile de Crête. Ce débat ne sera pas sans incidence juridique et canonique sur le processus de réception des actes du prochain concile dans les Églises orthodoxes. En effet, dans l'Église orthodoxe, la réception canonique des actes d'un concile est aussi importante, sinon plus, que les décisions prises lors du concile. Ces décisions ne deviennent parfaites et leur intégration canonique complétée que « dans » et « par » leur réception par les Églises orthodoxes autocéphales par la suite.
Le débat qui n'a pas eu lieu avant, s'annonce chaud dans la montée vers le concile. Il est appelé à s'amplifier. Aurait-il des conséquences sur l'unité de l'Église orthodoxe au moment où s'élèvent des voix critiques dans plusieurs autres Églises orthodoxes et au sein de la diaspora qui se sent exclue de l'ensemble de la dynamique préconciliaire ? Sommes-nous dans une accélération pour la tenue du concile qui est une forme de précipitation dommageable à l'unité de l'orthodoxie pourtant vitale et viatique pour le témoignage et la mission dans un monde tendu et en pleine mutation ? Des interrogations qui devraient rencontrer des réponses dans le si proche avenir. En tout cas, la marche vers le concile panorthodoxe ne sera pas de tout repos. Peut-être qu'il y a là une grâce à saisir d'aller vite mais sans se précipiter. L'histoire de l'Église orthodoxe nous enseigne qu'elle est sans cesse immuable et sans cesse en progression en synergie avec la protection que lui apporte la main du Seigneur. Fort de cette foi, il n'est jamais trop tard pour bien agir et pour bien faire ! Le Seigneur ne se tient-il pas devant notre porte, et Il toque et attend de nous qu'on Lui ouvre large la porte ?

La dernière charge importante à cet égard est venue le 10 mars dernier, du métropolite Seraphim du Pirée, un des importants diocèses de l'Église orthodoxe de Grèce. Ce dernier vient d'envoyer une lettre « à charge » au saint-synode de l'Église de Grèce contre les documents du futur concile panorthodoxe qui doit se tenir à l'île de Crête du 17 au 27 juin 2016.Mgr Seraphim...

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