Selon toute vraisemblance, le gouvernement et le Parlement se dirigent vers des vacances de plus ou moins longue durée, avec une possible percée, la tenue d'un Conseil des ministres consacré à la crise des déchets. Les promesses faites par le courant du Futur au cours de la dernière séance de dialogue entre ses représentants et ceux du Hezbollah à Aïn el-Tiné, lundi soir, n'ont pas réussi à aplanir l'opposition farouche du ministre de la Défense, Samir Mokbel, et de ses nouveaux alliés dans le cadre du « Groupe consultatif », les Kataëb, à la promotion de trois ou six généraux pour qu'ils restent en service un an de plus. Qu'il s'agisse ou non d'une distribution des rôles, le résultat est le même. Le camp du 14 Mars dans toute sa diversité refuse de faire la moindre concession au général Michel Aoun et à son camp. Officiellement, l'argument des opposants à la promotion des officiers est que celle-ci porte un coup à la hiérarchie militaire et constitue par conséquent un préjudice à de nombreux officiers. C'est sans doute vrai. Mais le maintien en place du commandant en chef actuel, à deux reprises, ainsi que le report du départ à la retraite du chef d'état-major et du secrétaire général du Conseil supérieur de la défense ne sont pas non plus du meilleur effet pour le fonctionnement hiérarchique de l'armée, tout comme le rappel du chef des SR militaires après son passage à la retraite pour qu'il reste en fonctions. Preuve en est qu'un général a présenté un recours devant le Conseil d'État contre le maintien en place du général Jean Kahwagi en estimant qu'il porte préjudice à son propre avancement. Cela n'a pourtant pas empêché les mandats d'être prorogés, non seulement avec l'approbation, mais aussi à la demande du ministre de la Défense, qui n'y a vu aucun problème pour l'armée.
Pour les sources proches du CPL, il est clair que c'est le général Michel Aoun et son camp qui sont visés par le refus de faire passer la promotion des officiers. Par conséquent, le souci affiché de l'armée est tout à fait secondaire. Pourtant, Michel Aoun avait accepté de revoir à la baisse ses exigences en s'inclinant devant le maintien du général Kahwagi en fonctions, alors qu'il avait longtemps réclamé la désignation d'un nouveau commandant en chef de l'armée. Malgré ces concessions, le camp adverse, lui, a rejeté toutes les offres, confirmant les accusations portées contre lui par le CPL de vouloir briser politiquement Michel Aoun. Les partisans du général, qui commémorent ces jours-ci les événements du 13 octobre 1990, déclarent que la situation d'aujourd'hui ressemble par certains aspects à celle qui prévalait le 13 octobre 1990, au moins sur le plan d'une conjugaison d'efforts locaux, régionaux et internationaux pour défaire le général Aoun et le chasser du palais de Baabda.
Vingt-cinq ans plus tard, la même tentative se reproduit donc, avec la volonté claire de le tuer politiquement en refusant de le laisser réaliser le moindre acquis politique. Et curieusement, c'est un peu le même esprit qui règne, même si les noms ont quelque peu changé. Les partisans du général rappellent comment certaines personnalités politiques chrétiennes avaient pratiquement supplié les Syriens de lancer une opération militaire pour pousser Aoun à quitter le palais de Baabda, alors que d'autres ne s'étaient pas opposées à l'entrée militaire des Syriens dans les régions dites « est », juste pour pouvoir en finir avec Michel Aoun, ouvrant ainsi la voie et assurant une couverture chrétienne à une longue période de tutelle syrienne sur le Liban. Aujourd'hui, ces mêmes parties (qui sont devenues les chantres de la souveraineté), auxquelles d'autres se sont ajoutées, cherchent une nouvelle fois à isoler Michel Aoun et à le présenter comme un leader affaibli et en tout cas incapable d'obtenir le moindre acquis politique.
Mais, toujours selon les partisans du général, la situation de 1990 est différente de celle de 2015. Sur le plan régional et international, les paris de Michel Aoun se sont révélés plus réalistes que ceux de ses adversaires, depuis l'accord sur le nucléaire iranien entre la République islamique et la communauté internationale jusqu'au maintien en place du président syrien Bachar el-Assad en dépit des pronostics répétés sur sa chute émis depuis plus de quatre ans. L'axe international et régional, qui va de Moscou et passe par Téhéran, Bagdad, jusqu'à Damas, ne peut pas ignorer le Liban.
Sur le plan interne, Michel Aoun a un allié fort, le Hezbollah, et un réseau de relations non négligeable, sans parler de sa popularité qui devrait se préciser une nouvelle fois dans le cadre de la manifestation prévue dimanche. Ses adversaires peuvent donc l'empêcher de marquer des points politiques, mais ils ne peuvent pas pour autant élire un président sans lui, ni faire fonctionner les institutions publiques sans son aval ou sa participation. Il est donc pratiquement impossible de rééditer l'expérience de 1990, ni en misant sur le rapport des forces local ni en se basant sur le rapport des forces régional ou international. On voit mal en effet les troupes saoudiennes qui ont déjà du mal au Yémen venir au Liban pour y imposer une nouvelle équation...
Sur le plan strictement militaire, il reste que le départ à la retraite du général Chamel Roukoz est avant tout une perte pour l'armée, tant la popularité du chef des commandos est grande, dans toutes les communautés et dans tous les milieux, et tant son nom est lié aux victoires de l'armée contre les terroristes et contre les différentes milices. Quant à la polémique au sujet des promotions et aux décisions des prorogations militaires, elles ne font que fragiliser l'armée, au lieu de la renforcer, et elles en font plus que jamais une proie entre les mains de la classe politique... À un moment où le Liban a besoin de la vigilance de son armée face à la tempête qui frappe à ses frontières.
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commentaires (12)
. Chere scarlett. C est inoui que tout le monde se focalise sur l alliance du general avec le hezb .. Les 14 mars seraient ils seuls , les champions en matiere de la "non obedience " a un pays etranger , par exemple ?? Alors que saad hariri ( en dechdeche , vautré dans le giron des ben saoud ) et ses acolytes ne fonctionnent que par un signe du petit doigt d un de ces emirs de premiere classe de l arabie saoudite . C est l histoire de la poutre et la paille qui se reproduit regulierement .
Hitti arlette
15 h 38, le 09 octobre 2015