Rechercher
Rechercher

Liban - La situation

Modération iranienne contre moumana’a aouniste

Le message paradoxal aouniste, mêlé d’attaques et de mises en garde d’une part, et d’appels au dialogue et au partenariat de l’autre. Photo Nasser Traboulsi

Le passage de la phase de l'affrontement militaire à celle du dialogue politique – décrit par une source bien informée du Futur – s'est confirmé avec la visite officielle à Beyrouth du ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif. Protagoniste de l'accord sur le nucléaire et acteur-clé de l'aile iranienne dite réformiste, relevant du président Hassan Rohani, le ministre s'est exprimé à Beyrouth en termes neufs, d'espoir et d'ouverture, nés d'une « nouvelle vision qui s'offre à la région, fondée sur le dialogue ». Ce discours, qui reste pour l'instant d'ordre moral, accompagne la dynamique diplomatique, déjà initiée – mais encore longue – pour une solution au conflit syrien.

En attendant que se précise cette solution, l'heure au Liban reste au maintien de la stabilité et, par voie de conséquence, au maintien du gouvernement. Ce souhait iranien était manifeste dans l'appui exprimé par le chef de la diplomatie iranienne au Premier ministre Tammam Salam, mardi, au Grand Sérail. En signe de bonne foi, le diplomate a veillé à rompre avec la tradition, entretenue jusque-là par les responsables iraniens en visite au Liban, de se rendre à la sépulture de Imad Moghniyé, relève un observateur. Ce qui ne l'a pas empêché, pour autant, d'entretenir en filigrane le discours traditionnel de lutte contre Israël et contre le terrorisme, une lutte dont l'accord sur le nucléaire serait le nouvel outil, selon lui. Parallèlement à ce discours officiel, il aurait notifié ses interlocuteurs respectifs du Hezbollah et du Courant patriotique libre (CPL) de l'impératif de maintenir le cabinet Salam.

Ce plafond étant fixé, aucun signe d'une éclaircie intérieure ne pointe encore. Même si certains observateurs jugent possible que le déblocage institutionnel au Liban précède une solution en Syrie. D'une part, l'insistance du ministre iranien sur « la non-ingérence de Téhéran dans les affaires intérieures libanaises » laisse sceptiques les observateurs quant à un déblocage prochain de la présidentielle. En effet, cet argument avait été avancé par M. Zarif en réponse à son homologue français, qui tentait, le mois dernier à Téhéran, un déblocage de la présidentielle libanaise, dans le prolongement de l'initiative de l'émissaire français Jean-François Girault, et avec l'appui de principe de Washington.


(Lire aussi : Zarif assure à Beyrouth le service après-vente de l'accord avec Téhéran)



Il n'empêche, d'autre part, que les discours officiels du 8 Mars, y compris celui du Hezbollah, relatifs à la présidentielle commencent à remplacer l'appui immodéré au leader du CPL, par un souhait d'« un candidat consensuel ». La polémique qui a éclaté au grand jour entre le général Michel Aoun et le président de la Chambre, Nabih Berry, serait en effet l'expression d'une mise à l'écart, par le 8 Mars dans son ensemble, de la candidature de son allié chrétien à la présidence. Alors que certaines sources du 14 Mars disent craindre un possible fléchissement du président de la Chambre, sous les pressions éventuelles du Hezbollah en faveur de Michel Aoun, le constat politique général reste que « le président de la Chambre a exprimé tout haut ce que ses alliés pensent tout bas ». Certaines figures du 14 Mars tendent même à affirmer que le Hezbollah « laisse faire son allié chrétien dans ses menaces d'escalade, non plus pour les instrumentaliser le cas échéant, mais parce que l'isolement, où s'enlise actuellement le courant aouniste, convient désormais au parti chiite ».
Il y a, dans la lecture respective des événements, par le 8 Mars et le 14 Mars, des points de convergence inattendus et nombreux. Ainsi, certains milieux proches du parti chiite n'écartent pas l'éventualité d'une reconversion politique du Hezbollah : si l'Iran venait à imposer son rôle régional, ce rôle accompagnerait « la démilitarisation » des problèmes régionaux.

Le CPL est le seul à se démarquer de la configuration nouvelle des rapports internes. Le ministre des AE, Gebran Bassil, qui recevait hier son homologue iranien, a réédité le même discours, antérieur à l'accord sur le nucléaire, de lutte commune contre le « takfirisme », dont il n'a pas écarté, en outre, « le takfirisme politique au Liban ». Un « takfirisime politique » dont les manifestants du CPL, rassemblés hier au centre-ville, ont accusé explicitement le courant du Futur, à travers leurs slogans et calicots. Mais dans l'acharnement politique d'un courant qu'on isole (et qui s'isole), une prudence s'est imposée hier, celle de respecter le plafond du maintien du cabinet. En effet, afin de contenir tout dérapage sécuritaire, ce sont les cadres du CPL et leur entourage direct qui ont composé la grande partie de la foule descendue dans la rue. Certains éléments du Hezbollah étaient par ailleurs présents parmi les manifestants, rapportent notre correspondante sur le terrain. Cela n'a pas empêché les organisateurs de recourir à des ruses, pour laisser croire à un nombre plus grand de participants : le convoi du CPL roulait lentement hier sur l'autoroute menant vers la capitale, et les voitures maintenaient une certaine distance, afin de donner l'illusion d'un cortège. La présence des députés et des ministres, prenant part spontanément à la manifestation, avait pour objectif de renvoyer « l'image d'un courant uni et cohésif », à la veille de ses élections internes, selon notre informateur, citant des sources du CPL.
Ce qui n'a pas empêché, semble-t-il, ni le ministre Gebran Bassil, relayé par le ministre Élias Bou Saab, ni le député Alain Aoun, et avec lui le député Ibrahim Kanaan, de marquer respectivement leur présence parmi les manifestants, lutte de succession oblige à l'intérieur du parti.

Sur un autre plan, si le mouvement aouniste avait en partie pour objectif de rappeler à toutes les parties que « le CPL est libre et souverain et agit sans consulter personne », selon des sources du parti orange, cela n'a pas empêché que des reproches lui soient adressés par les milieux politiques chrétiens : dans son discours, le secrétaire général du CPL, Pierre Raffoul, a mentionné la résistance du Hezbollah, en omettant de mentionner la résistance chrétienne – le comble pour une manifestation qui se targue d'être au nom des « droits des chrétiens », ce qui n'a pas été sans indisposer certains partisans. C'est que, selon un observateur, « la visite du ministre Zarif a mis la montre à l'heure du compromis, tandis que la montre aouniste est toujours arrêtée sur la résistance et la moumana'a ».

Le mouvement de la rue hier portait toutefois un message aux effets directs, susceptibles de limiter le décalage du CPL : survenant à la veille du Conseil des ministres aujourd'hui, la manifestation aouniste avait pour but principal de prévenir un scénario qui se préparait pour la réunion ministérielle. Le Premier ministre avait prévu de soumettre au débat les dossiers urgents, notamment celui des déchets, reléguant au second plan le débat sur les nominations sécuritaires, au risque de pousser les ministres aounistes à se retirer de la séance – auquel cas la réunion se poursuivrait sans eux. C'est donc un message paradoxal, alliant mise en garde et appel au « partenariat », que le CPL a lancé hier. Et qui pourrait se traduire aujourd'hui par une entente, devenue imminente, sur le mécanisme de prise de décision, trois mois après une situation de pseudo-démission du cabinet.

 

Lire aussi
À Amman, Salam appelle la communauté internationale à « sortir de son attentisme face à la tragédie syrienne »

Report de la 27e séance électorale, Fadel dénonce « une fuite en avant vers le suicide »

Le 14 Mars déplore les attaques de Aoun contre l'armée, une « atteinte au prestige de la troupe »

Chaptini : Les droits des chrétiens sont une chose, la protestation une autre

Le passage de la phase de l'affrontement militaire à celle du dialogue politique – décrit par une source bien informée du Futur – s'est confirmé avec la visite officielle à Beyrouth du ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif. Protagoniste de l'accord sur le nucléaire et acteur-clé de l'aile iranienne dite réformiste, relevant du président Hassan...

commentaires (9)

Zarif-Aoun-Hassan. Tiercé gagnant dans l'ordre et le désordre. On arrive tout doucement à l'effacement de la corruption et de l'incompétence du passé. Peuh ils appelaient ça le futur !

FRIK-A-FRAK

20 h 23, le 13 août 2015

Tous les commentaires

Commentaires (9)

  • Zarif-Aoun-Hassan. Tiercé gagnant dans l'ordre et le désordre. On arrive tout doucement à l'effacement de la corruption et de l'incompétence du passé. Peuh ils appelaient ça le futur !

    FRIK-A-FRAK

    20 h 23, le 13 août 2015

  • Quel cinema les discours de ces blancbecs du CPL lors de leur rassemblement. Pas impressionant dutout le Raffoul en train de lire ses fiches!!!! quelle mascarade! de la demagogie qui fait courir les libanais ignorants qui ne connaissent rien a la constitution!!! Hier ils pensaient vraiment recuperer un saladier de malheureux contestataires de tous bords....!

    Bibette

    13 h 45, le 13 août 2015

  • le scoop du jour....le "general" AOUN s est converti a l islam et a ete nomme emir du LIBAN par DAECH.

    HABIBI FRANCAIS

    13 h 19, le 13 août 2015

  • LA SITUATION En politique, c'est très dangereux de perdre la boussole. وفهمكم كفاية !

    Halim Abou Chacra

    12 h 12, le 13 août 2015

  • "Modération iranienne contre moumana’a aouniste." ! Ou, Tarek Yatîm contre Georges Rîf....

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 03, le 13 août 2015

  • QUELQUE CHOSE DIT QUE LA VISITE DE ZARIF DONNERA DES FRUITS... INCH'ALLAH !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 01, le 13 août 2015

  • le plus interessant c'est le photo que l'OLJ a choisi de publier et que je n'avais pas vu. Alors ils veulent vraiment assimiler le courant du futur, le courant de saad harrir a l'etat islamique, aux takfiristes, aux radicaux. vraiment une bande d'abruti ce cpl. est-ce qu'ils se sont donne la peine d'ecouter tout les discours modere de saad hariri??? ce n'est pas lui qui a refuse de prendre les armes lorsqu'on a eu les chemises noires du hezbollah en 2008?? est-ce qu'ils se sont donne la peine de regarder l'image que le courant du futur projette a travers sa tele la futuretv? que des emissions sur la culture libanaise dans toute sa richesse, aucun discours religieux excepte lors de Ramadan avec une tres bonne emission faite par un Cheikh qui ne prechait que la moderation du Coran. Aucune speakrine voilee et parfois des decollete affriolant. Comparez cela avec la tele de almanar, allez faire un tour et voyez par vous meme. juste pour rappel, lors du deces de la chanteuse Sabah, elle n'a pas eu droit a une seule mention sur la tele du hezbollah, meme pas a la fin de leur journal televise. c'etait a en vomir. Alors qu'ils viennent faire un proces d'intention au mouvement du futur et disent que c'est les takfiristes, ca montre l'etat de leur decrepitude.

    George Khoury

    08 h 29, le 13 août 2015

  • Cette mascarade de manifestation n'arrive pas à masquer l'échec du mouvement aouniste élimé par les pratiques de ses ministres et de son général. La Défense des intérêts des chrétiens ne passe pas par celle des intérêts bancaires des Gendres . La présidence ne peut revenir à celui qui a mis les intérêts du Hezbollah chiite avant ceux des chrétiens et du Liban. Le monde arabe et l'Europe sont les frontières naturelles du Liban. L'Iran est la fin du partenariat spécifique islamo-chrétien (50-50) . Le rôle du Hezbollah est de transformer cette participation en un déséquilibre 1/3-1/3-1/3 qui aura pour résultat la fin des chrétiens : 33% chrétiens contre 66% musulmans. Le tandem Aoun-Nasrallah a un rôle de sape tout tracé par l'impérialisme iranien : a moyen terme le Liban sera un État de dhimitude sous contrôle de l'Iran et les chrétiens seront en état de dhimitude sous contrôle du Hezbollah qui veut avoir la main-mise sur la totalité islamique : l'assassinat de Hariri allait dans ce sens. L'assassinat du 14 mars va dans ce sens. L'interdiction de séjour de hariri fils au Liban va dans ce sens. La recherche de sunnites de compensation inféodés au Hezbollah va dans ce sens. Aoun est la pire chose qui soit arrivée au Liban ces vingt dernières années. Le Hezbollah n'est rien sans Aoun. Le 14 mars est la dernière chance du Liban. Et Geagea la dernière chance du 14 mars.

    Saleh Issal

    07 h 32, le 13 août 2015

  • comme je l'ai dit il est un fin diplomate, je me suis tromper sur son compte a se Mr Zarif, il vient de prouver qu'il tiens parole et fait partie de la mouvence reformatrice iranienne oui ca on le savait mais il fallait le prouver !!

    Bery tus

    04 h 00, le 13 août 2015

Retour en haut