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Moyen Orient et Monde - Un œil sur le Moyen-Orient

Israël et le chaos arabe

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Photo AFP

Israël est-il un acteur ou un spectateur dans la profonde phase de mutation qui bouleverse l'équilibre des puissances au Moyen-Orient ? Est-il impliqué d'une manière ou d'une autre dans les guerres intestines qui déchirent le monde arabe en Libye, en Égypte, en Syrie, en Irak et au Yémen ?

À ces questions, qui peuvent être considérées comme naïves ou au contraire comme tendancieuses selon les affiliations politiques, deux types de réponses sont généralement apportées. La première, inspirée par les théories du complot, extrêmement populaires dans le monde arabe, rend Israël responsable de tout ce qui se passe de négatif dans la région. Selon cette version, Israël – et son allié américain – a un plan bien défini qui vise à démembrer les États du Moyen-Orient, potentiellement dangereux pour sa sécurité, les uns après les autres. La deuxième, notamment avancée par les responsables israéliens, prétend que les conflits actuellement en cours dans la région ne concernent aucunement Israël puisqu'ils sont liés à des divisions internes aux sociétés arabes, et surtout à l'islam.

La première position ignore volontairement la responsabilité des autres acteurs régionaux dans cet engrenage de conflit tandis que la seconde apparaît douteuse du point de vue du bon sens politique : comment l'acteur le plus puissant du Moyen-Orient peut-il être complètement étranger à un ouragan régional qui, dans les faits, a tendance à servir ses intérêts ? De facto, Israël est partie prenante dans, au moins, trois zones de tensions au Moyen-Orient : le conflit israélo-palestinien, la guerre froide avec l'Iran et la guerre en Syrie. À partir de là se posent en fait les questions du degré d'implication de l'État hébreu et de l'évolution de ses relations avec les États ou organisations concernées au cours de ces dernières années.

Concernant le conflit israélo-palestinien, est-il encore nécessaire de rappeler à quel point celui-ci participe à la radicalisation des mouvements politiques qui se disputent le pouvoir au Moyen-Orient ? Les guerres menées contre la bande de Gaza, la diabolisation du Hamas, la politique de colonisation des territoires palestiniens et surtout le refus d'engager un processus de paix avec l'Autorité palestinienne contribuent très largement à la popularité des mouvements les plus extrémistes, parmi lesquels l'organisation de l'État islamique (EI), dans le monde arabe et dans le monde occidental, ce que même le secrétaire d'État américain, John Kerry, a admis. La réélection du Premier ministre Benjamin Netanyahu et la montée en puissance de Naftali Bennett, le chef du parti nationaliste religieux Foyer juif, notamment connu pour ses propos : « Les terroristes, on doit les tuer, pas les libérer. Je me suis battu toute ma vie pour défendre les deux propositions contenues dans cette phrase », ne risquent pas d'inverser le déroulement du processus en cours. Bien au contraire.

Dans cette lutte contre ce qu'il appelle « les terroristes », Israël a trouvé un allié de poids en la personne du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi. Considéré comme une branche des Frères musulmans, à qui il a déclaré la guerre, le Hamas est désormais confronté à la répression des autorités égyptiennes qui ont notamment détruit tout ou une partie des tunnels qui reliaient la bande de Gaza au Sinaï et qui constituaient la seule source d'approvisionnent pour l'organisation.

À en croire les propos des responsables israéliens, particulièrement ceux de M. Netanyahu, l'Iran constitue la menace numéro un pour Israël. Du point de vue des Israéliens, l'Iran est perçu comme une puissance qui arme et finance des organisations qui combattent Israël (Hezbollah, Hamas, Jihad islamique), qui tient des propos négationnistes et menace l'État hébreu de disparition. La perspective d'un accord entre l'Iran et les 5 + 1 a été très largement critiquée par Israël pour au moins deux raisons, outre celles qui concernent la politique interne : d'une part, Israël considère qu'il est impossible de faire confiance à l'Iran ; d'autre part, il a peur que la levée des sanctions encourage Téhéran à accroître ses soutiens envers les ennemis de l'État hébreu.

Encore une fois, Israël a trouvé dans cette lutte un allié circonstanciel dans le monde arabe, avec l'Arabie saoudite. Pendant que les tensions sectaires ou politiques ont divisé la société égyptienne entre pro-Morsi et anti-Morsi et le Moyen-Orient entre sunnites et chiites, Israël a profité des reconfigurations des rapports de force qui s'en sont suivis pour apaiser ses relations avec les deux leaders du monde sunnite, l'Arabie saoudite et l'Égypte. Autrement dit, non seulement Le Caire et Riyad ne sont plus des soutiens de poids à la résistance palestinienne, mais en fait ils deviennent quelque part des alliés objectifs de l'État israélien.

Sans nul doute, la Syrie est l'épicentre des tensions qui parcourent actuellement la région. Mais elle semble aussi être l'épicentre de la politique régionale israélienne puisque la guerre syrienne oppose, sur le terrain, deux potentiels dangers pour la sécurité d'Israël : d'un côté des mouvements jihadistes qui souhaitent sa destruction, de l'autre l'axe de la résistance Iran/Hezbollah/Syrie qui investit un deuxième front. Beaucoup plus mesurés que les Occidentaux, et probablement mieux renseignés, les analystes israéliens ont tout de suite expliqué que cette guerre risquerait de durer un bon moment.
Jusqu'alors, Israël s'est gardé de prendre une position définitive en faveur de l'une ou de l'autre des parties. Son principal souci étant d'éviter que le conflit déborde sur son territoire. Pourtant, Israël est le seul pays à être directement intervenu en Syrie, et à plusieurs reprises, ciblant des convois transportant du matériel de la Syrie au Liban ou des membres du Hezbollah et/ou des pasdarans iraniens. Concernant l'issue qui serait la plus profitable à Israël, les analystes sont partagés. Certains considèrent que les groupes islamistes et jihadistes, dont le Front al-Nosra avec qui Israël a conclu une sorte de pacte de non-agression dans la partie syrienne du Golan, sont beaucoup moins dangereux pour la sécurité de l'État hébreu que les combattants de l'axe de la résistance. Ces combattants verraient d'ailleurs sans doute d'un bon œil une participation plus accrue des Israéliens au conflit qui, par le biais de frappes chirurgicales, pourrait fragiliser le régime. D'autres, au contraire, estiment que l'axe de la résistance est une menace connue pour Israël et que de ce fait il est préférable à l'inconnu des jihadistes, selon le vieil adage « le diable qu'on connaît est préférable à celui qu'on ignore ».

Quoi qu'il en soit, la poursuite du conflit, le statu quo profite indéniablement à l'État hébreu, dont les dirigeants résument la situation en une formule assez limpide : « Qu'ils saignent ». Israël aura profité de la guerre en Syrie pour au moins deux raisons. Un : les armes chimiques du régime, qui pouvaient constituer une grande menace pour Israël, ont été détruites. Deux : le conflit syrien occupe le Hezbollah et l'Iran.
Plus généralement, le chaos général qui ravage la région favorise le démembrement des États et la formation de petits États nations, kurdes, druzes ou alaouites, nettement moins menaçants pour Israël et avec qui il pourrait entretenir des relations comme il le fait avec le Kurdistan irakien.
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, Israël n'est jamais apparu autant en sécurité que depuis que la région est à feu et à sang.

 

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commentaires (7)

HÉLAS ! LA PERC(S)ÉE POUSSE DE TOUT SON POIDS LES ARABESQUES A UNE "ENTENTE" AVEC ISRAËL... ON NE S'ÉTONNERAIT POINT DE VOIR UN JOUR UNE NOUVELLE TEMPÊTE DE LA FERMETÉ AVEC PARTICIPATION ISRAËLIENNE !

LA LIBRE EXPRESSION

16 h 17, le 13 mai 2015

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Commentaires (7)

  • HÉLAS ! LA PERC(S)ÉE POUSSE DE TOUT SON POIDS LES ARABESQUES A UNE "ENTENTE" AVEC ISRAËL... ON NE S'ÉTONNERAIT POINT DE VOIR UN JOUR UNE NOUVELLE TEMPÊTE DE LA FERMETÉ AVEC PARTICIPATION ISRAËLIENNE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 17, le 13 mai 2015

  • c'est hilarent de croire qu'il y a encore de vrais libanais qui attendent, commentent et applaudissent "l'education" ou l'ignorance de toutes ces nuisances, angelique, lol.

    Christine KHALIL

    19 h 33, le 12 mai 2015

  • Dans un article publié ce Lundi , intitulé "Israël doit changer sa stratégie » , le quotidien israélien Haaretz estime qu’ « Israël devrait doter, le principal rival de l’Iran, la bensaoudie de l’arme nucléaire au lieu de tenter d’empêcher l’Iran de devenir une puissance nucléaire ». On comprend aisément qu'on dote-un ami ? un allié ? ou un collabo/esclave d'une arme pareille ! parce que dire ça c'est une preuve que la vraie guerre est entre israrecel/bensaoud/occicon et les résistants de l'Iran NPR/Syrie/HEZB . La conclusion parle d'elle même , à qui profite le crime ? le bémol est de comparer les dangers entre qaida/nosra/daech pour israrecel a celui des résistants , ça fait mauvaise foi , les résistants s'arment , s'éduquent et progressent en réduisant le gap techno-stratégique entre eux et les usurpateurs , tandis que bactéries meurent dans l'ignorance totale de ce qui leur met la tête dans le gaz . Je demanderai juste une chose aux bensaouds ignares , essayez de fabriquer chez vous dans vos labos inexistants , un simple composant électronique ou une application scientifique , dans la minute qui suit , vous disparaissez pour un autre plus conciliant . A vous , on vous applique juste le principe du "payez et vous serez considéré " . Et puis la bombe nucléaire que vous propose israrecel , vous n'aurez aucun contrôle là dessus! That's the difference !

    FRIK-A-FRAK

    12 h 05, le 12 mai 2015

  • Correcte comme point de vue et analyse. A mon avis, Israël profite juste des circonstances qui lui ont été favorables en raison de la bêtise des régimes de la région. Maintenant que ceux-ci se sont charges de tout détruire par eux même, bien sur qu’Israël va y mettre son grain de sable supplémentaire pour s'assurer que ces gens la ne pourront plus la mettre en danger. La principale faute a tout ce qui s'y passe est la pensée obtuse qu'ont les musulmans arabes sur l'histoire, ne pouvant comprendre que le monde tourne et progresse, que le temps passe et que faire du surplace sans suivre le cours des changements c'est régresser. Ils devraient prendre exemple sur les musulmans Libanais qui eux ont tout compris après l’expérience douloureuse par laquelle ils ont fait passer leur pays. Bien sur il reste encore irréductible Hezbollah, mais la guerre en Syrie sera la leçon dont il a besoin pour se réveiller aussi. En attendant, historiquement, Israël fut, est et restera toujours au Moyen Orient. A nous de trouver la bonne formule pour mettre tout ce monde sous le même toit! Je pense que seul les Libanais trouverons la formule et ce n'est pas celle du Hezbollah!

    Pierre Hadjigeorgiou

    11 h 46, le 12 mai 2015

  • "Le conflit syrien occupe le Hezbollah et l'Iran. Le chaos général qui ravage la région favorise le démembrement des États et la formation de petits États kurdes, druzes ou alaouites, nettement moins menaçants pour Israël et avec qui il pourrait entretenir des relations comme il le fait avec le Kurdistan irakien." ! Donc, retour à la case départ ; CQFD !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 50, le 12 mai 2015

  • "La diabolisation du Hamas." ! Mais, il n'a nullement besoin d'être diabolisé par Israël, il l'est déjà par sa nature même et.... par le Fatah !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    09 h 34, le 12 mai 2015

  • NON SEULEMENT ACTEUR... MAIS INITIATEUR PAR EXCELLENCE ! DEPUIS LES PEUPLES DE LA RÉGION... OH L'ABERRATION ! ONT PRIS BÊTEMENT LA RELÈVE... ET CONTINUENT TOUT AUSSI BÊTEMENT LE "JOB" POUR SON COMPTE ET À SON PROFIT ET INTÉRÊT !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    06 h 14, le 12 mai 2015

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