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À La Une - Liban

Au mépris des règles démocratiques, les députés libanais prorogent une nouvelle fois leur mandat

La société civile manifeste sa colère aux abords du Parlement.

Des manifestants libanais bloquent la route menant au parlement, où les députés ont voté la prorogation de leur mandat, le 5 novembre 20104. AFP /JOSEPH EID

Quatorze séances parlementaires ne leur ont pas permis d'élire un président de la République, trois ans ne leur ont pas suffit pour adopter la grille des salaires du secteur public ou voter une nouvelle loi électorale. Mais quelques dizaines de minutes leur ont été largement suffisantes pour proroger, une nouvelle fois, leur propre mandat de deux ans et sept mois.

Les députés libanais, réunis mercredi en séance plénière, ont voté à une large majorité la prorogation du mandat du Parlement qui expire le 20 novembre. Sur les députés présents, 95 ont voté pour et deux contre. Il s'agit de la deuxième prorogation du mandat de cette Chambre élue en 2009. Le 31 mai 2013, les députés avaient déjà prorogé leur mandat de 17 mois. La nouvelle rallonge leur permet ainsi de compléter une nouvelle législature entière (quatre ans) si l'on additionne cette durée avec celle de la première prorogation.

Le mandat du parlement expire donc désormais le 20 juin 2017.


Tous les blocs parlementaires ont participé à la séance parlementaire à l'exception des députés chrétiens du Courant patriotique libre (CPL) de Michel Aoun et des Kataëb. Le bloc des Forces libanaises (FL) a voté en faveur de la prorogation pour "éviter de tomber dans le vide", ainsi que les députés du Courant Marada de Sleimane Frangié et les chrétiens indépendants du 14 Mars. Le Tachnag, principal parti arménien, a voté contre la rallonge. Tous les blocs musulmans, dont ceux du Hezbollah, du président de la Chambre Nabih Berry, du Courant du Futur et du leader druze Walid Joumblatt ont voté en faveur de la prorogation.

Les partisans de la prorogation invoquent la vacance de la présidence et la situation sécuritaire précaire au Liban pour justifier leur position.

 

Au Parlement, la députée membre des FL, Sethrida Geagea, a affirmé mercredi que son parti aurait "préféré que des élections aient eu lieu". "Le blocage de la présidentielle nous a conduits à la prorogation. Sans la prorogation nous aurions été vers le vide. Les FL sont prêtes à prendre des décisions qui ne sont pas populaires pour sauver la nation", a-t-elle ajouté.

Mardi, le leader des FL Samir Geagea, avait regretté, lors d'une conférence de presse, que le pays se trouve, à deux semaines de l'expiration du mandat de la Chambre, face à l'alternative suivante : le vide institutionnel total, ou la prorogation du mandat du Parlement.


En votant la prorogation mercredi, les parlementaires renouent avec les pratiques de la guerre civile, durant laquelle les députés de l'époque enchainaient de facto les législatures faute de pouvoir organiser des élections. Les premières élections législatives d'après-guerre, certes largement boycottées, avaient été organisées en 1992 puis de façon régulière tous les quatre ans.


Manifestation de la société civile

Sur le terrain, des activistes opposés à la prorogation ont coupé plusieurs routes menant au Parlement. Ils ont ainsi barré la route près du quotidien an-Nahar, celle menant à la place Riad el-Solh et celle de Bab Idriss. Il s'agit des trois principaux axes menant à la Place de l'Étoile, où se trouve le siège de l'Assemblée. Plusieurs tentes ont été dressées sur ces routes, empêchant les voitures des députés d'arriver à la Chambre. Des heurts ont éclaté avec les forces de l'ordre déployées en force dans la région.

Certains manifestants ont lancé des tomates et des œufs sur les voitures de députés, dont celle de la députée Nayla Tuéni, rédactrice en chef du quotidien an-Nahar. Plusieurs députés ont dû arriver au Parlement à pieds en raison du blocage des routes par les activistes. Les rangs des manifestants gonflaient à mesure que s'approchait le vote de la prorogation.

"Ayez honte de ce que vous faites, vous ne nous représentez plus", a tonné au micro de la LBCI une manifestante portant le drapeau libanais. Un autre manifestant a promis des mesures d'escalade pour refuser "cette mascarade".

Le député Nicolas Fattouche, à l'origine de la proposition de loi sur la prorogation, a balayé d'un revers de main la contestation populaire. "La société civile ne connaît rien à la loi", aurait-il dit en prenant la parole dans l'hémicycle, selon plusieurs médias.

S'exprimant de Sydney où il se trouve en visite depuis plusieurs jours, le patriarche maronite Béchara Raï a qualifié d'"anticonstitutionnelle et illégale" la prorogation.

Angelina Eichhorst, chef de la délégation de l'Union européenne au Liban, a estimé sur son compte Twitter qu'il s'agissait d'un "triste jour pour l'histoire constitutionnelle du Liban".

 

 

 

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Quatorze séances parlementaires ne leur ont pas permis d'élire un président de la République, trois ans ne leur ont pas suffit pour adopter la grille des salaires du secteur public ou voter une nouvelle loi électorale. Mais quelques dizaines de minutes leur ont été largement suffisantes pour proroger, une nouvelle fois, leur propre mandat de deux ans et sept mois.Les députés libanais,...

commentaires (11)

Tous les electeurs qui touchaient de l argent pour voter doivent se sentir pauvres et cocus ...ils n'en ont pas eu pour deux mandats!!! Sinon rien de nouveau...

CBG

01 h 00, le 07 novembre 2014

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Commentaires (11)

  • Tous les electeurs qui touchaient de l argent pour voter doivent se sentir pauvres et cocus ...ils n'en ont pas eu pour deux mandats!!! Sinon rien de nouveau...

    CBG

    01 h 00, le 07 novembre 2014

  • ON CROIT RÊVER, ET POURTANT C'EST VRAI. ILS ONT VÔTÉ ET GEAGEA AVEC EUX IL A VÔTÉ. IL EST BRULÉ ET CUIT. IL A MONTRÉ SES LIMITES. IL REÇOIT LES ORDRES DE L'ARABIE SAOUDITE MAINTENANT ???????? AU LIEU DE DESCENDRE DANS LA RUE EN APPELANT LES BRAVES GENS QUI CROYAIENT EN LUI ENCORE À UNE MANIFESTATION POUR BALAYER TOUS CES DÉPUTÉS PUTINS QUI SONT LÀ POUR TOUCHER LEUR SALAIRE ET FAIRE LA SIESTE. JE VOMIS.....F.YOU

    Gebran Eid

    22 h 40, le 05 novembre 2014

  • Croyez-vous que les politiciens libanais ont un minimum de connaissance des règles démocratiques ? Croyez-vous le Hezbollah capable d'appliquer des règles démocratiques ? Croyez-vous qu'un général de 80 ans a eu connaissance des règles démocratiques ? Cette classe politique va enterrer le Liban

    FAKHOURI

    21 h 10, le 05 novembre 2014

  • C est Istez Nabih et les 12 voleurs........

    IMB a SPO

    19 h 27, le 05 novembre 2014

  • La société civile manifeste sa colère pour de vrais crocodiles, pauvre Liban .

    Sabbagha Antoine

    18 h 38, le 05 novembre 2014

  • I n a d m i s s i b l e !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    16 h 55, le 05 novembre 2014

  • J'ai déjà dit dans cette rubrique que le Liban souffre entre les mains d'une classe politique des plus décadentes et dégoûtantes du monde. Il faut ajouter maintenant que ceux qui ont exacerbé et mené à son paroxysme le délabrement des institutions de l'Etat sont, comme l'a dit le patriarche maronite, ceux qui "commettent le crime de bloquer l'élection d'un président de la République et ainsi décapitent l'Etat".

    Halim Abou Chacra

    16 h 17, le 05 novembre 2014

  • L'auteur se trompe lorsqu'il parle de mépris des règles démocratiques pour une raison simple : il s'agit de règles constitutionnelles et non de règles démocratiques qui sont en cause. Par pitié, faites appel à un juriste constitutionnaliste libanais afin d'avoir une réponse claire (peut-être) et cessez de demander l'avis de religieux ou de politiques technocrates étrangers. M.Fattouche a raison d'affirmer que le peuple ignore la loi, la question est de savoir la faute à qui?

    Olivier Georges

    15 h 47, le 05 novembre 2014

  • LES AUTO-ALLONGÉS.... ET AUTO-PROLONGÉS ! QUELLE HONTE ! QUELLE HONTE ! MAIS... QUELLE HONTE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 50, le 05 novembre 2014

  • c'est une journée noire dans l'histoire du Liban... Il faudrait que demain soit une journée de deuil national .. le deuil de la démocratie... ah si la première page des journaux pouvaient être cadrées de noir en signe de deuil pour que les usurpateurs sachent l'étendue de leur crime qu'ils ont perpétré contre la nation et la démocratie.

    Joseph Zoghbi

    13 h 40, le 05 novembre 2014

  • L'auto-prorogation "députes-à-vie " est l'assurance que le bakchich système se développe et se pérennise...dans la bananeraie ' libaniaise ' ....!

    M.V.

    13 h 37, le 05 novembre 2014

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