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Nos Lecteurs ont la Parole - Mounir El-KHOURY (U.L.)

Quand la pédagogie est visionnaire, pionnière et innovatrice

Lorsque la congrégation des sœurs des Saints-Cœurs, à travers son bureau pédagogique, lance, après la fin de la guerre civile au Liban, son plan d'action au service de la jeunesse, baptisé la «Génération de la relève», Louise-Marie Chidiac (décédée le 5 octobre 2014), qui vient de boucler son second mandat comme supérieure générale (1977-1989), prend la direction du projet.
Un projet d'envergure qui va s'étaler de 1989 à 1995. Antoinette Bassil, alors supérieure générale, délimite le cadre du projet dans un touchant article intitulé: «La cohésion nationale par les yeux, le cœur et la mémoire». Dans le second volume de la Génération de la relève, «La pédagogie du civisme», elle écrit: «On ne peut espérer une société d'hommes et de femmes "debout" que lorsque tous les citoyens sont en mesure de jouer leur rôle dans la vie de la communauté politique.» Antoinette Bassil affirme que «la congrégation des Saints-Cœurs, par son bureau pédagogique, se réjouit d'être comme le prophète, que Dieu appelle pour aider l'homme et le peuple libanais "à se mettre debout" et cela dans la clarté, la justice et la liberté». Elle annonce les assises principales du projet et lance les directives pour sa bonne marche.
Louise-Marie Chidiac qui par son intervention au seuil du second séminaire définit les points fondamentaux de son plan d'action et affirme sa détermination pour mener à bonne fin son projet, si cher à son cœur. Elle ne tarde pas à annoncer aussi les constantes de la démarche et la méthode d'action: «bien voir, juger, pour mieux agir».
Mais qu'est-ce qui hantait l'esprit de Louise-Marie Chidiac? Elle l'avoue elle-même: «La jeunesse, capital humain du pays et garantie de sa survie.» En vraie visionnaire, elle a su comment représenter les choses de l'esprit. Avec une grande habileté, elle prévoyait l'avenir de notre pays après ces moments de crise et n'a pas confondu la vision d'une vérité avec la démonstration de celle-ci. Elle croyait en l'homme et agissait suivant cette croyance avec une parfaite lucidité, guidée par une certitude, une confiance, une conviction et, bien entendu, une foi intense.
Pour parvenir à la réalisation de cette conviction, elle œuvrait pour la poursuite d'une action collective, basée sur une compréhension claire, parfaitement persuadée de sa valeur. À ce sujet, elle écrit: «On se forme au sens national et civique comme on acquiert l'esprit de famille en vivant avec, en s'y incorporant et en lui devenant organiquement solidaire pour le meilleur comme pour le pire.» Ne s'agit-il pas ici d'une dame pionnière qui, à travers l'éducation, croit que «ce n'est pas du domaine du choix mais de l'intégration qu'on assume progressivement au niveau de l'être»? J'ai connu Louise-Marie Chidiac, fière de son antécédent zahléiote, au collège des Saints-Cœurs de Zahlé en 1985, alors que je présidais le comité des professeurs et qu'on célébrait le 150e anniversaire de la fondation de la congrégation. À ma question, «nos jeunes, pour grandir, pour assumer leur avenir dans l'espérance et le dynamisme qui caractérisent leur âge, doivent-ils s'attendre à être suivis ou prêts à suivre dans la dignité?» La réponse a fusé, inspirée par une solide conviction: «Celui qui tient l'éducation de la jeunesse tient en main l'avenir des nations.» Elle semblait dire aussi qu'aider les jeunes à réaliser l'importance de leur rôle et à l'assumer, c'est raviver l'espérance en eux et, par conséquent, l'espérance en un monde meilleur. Dans ce contexte, la responsabilité n'est-elle pas entre les mains des éducateurs qui doivent savoir donner aux générations de demain les raisons de vivre et d'espérer? Suivront-ils les signes du temps, énoncés par Louise-Marie Chidiac?
Dans son intervention, au 3e séminaire, en juin 1992, sur «la pédagogie éthique», elle se demande s'«il faut parler de la pédagogie éthique ou bien se poser plutôt la question de l'éthique de la parole». «Une pédagogie éthique devrait se soucier de redonner à la parole sa consistance et de la revêtir d'authenticité, car il n'y a pas d'éthique là où il n'y a pas de vérité», répondait-elle.
Mais une pédagogie de l'éthique ne nécessite-t-elle pas une contribution de toutes les possibilités de la personne notamment à l'échelle des valeurs?
Alors, pour satisfaire cette interrogation, Louise-Marie Chidiac se réfère au père Kolvenbach, s.j., à l'époque, général de la Compagnie de Jésus, et elle résume: «Les valeurs sont liées à la tête, au cœur et à la main. Effectivement, les idées, la mémoire, l'imagination, la raison, la réflexion et enfin le jugement ne sont-ils pas le produit de la tête? Et les sensations, les émotions, l'affectivité, l'altruisme, la bienveillance, la compassion, la charité, le dévouement, la générosité, la pitié, la sensibilité, la droiture, l'honnêteté, la dignité, l'humain n'émanent-ils pas du cœur?»
Et la main, n'est-elle pas le moyen, par excellence, pour exécuter et procéder? N'est-elle pas le foyer de l'habileté, du savoir-faire?
Pour toutes ces valeurs, Louise-Marie Chidiac s'est battue afin de les transmettre aux jeunes du Liban par le biais de sa congrégation. Nous lui sommes redevables d'avoir instauré les assises d'une pédagogie visionnaire, pionnière et innovatrice!

Mounir El-KHOURY (U.L.)

Lorsque la congrégation des sœurs des Saints-Cœurs, à travers son bureau pédagogique, lance, après la fin de la guerre civile au Liban, son plan d'action au service de la jeunesse, baptisé la «Génération de la relève», Louise-Marie Chidiac (décédée le 5 octobre 2014), qui vient de boucler son second mandat comme supérieure générale (1977-1989), prend la direction du projet.Un...

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