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Liban - Décryptage

Le gouvernement cherche à réorienter l’aide internationale...

Comme l'an dernier, le siège de l'Onu à New York devrait abriter cette année aussi une réunion de soutien au Liban, fixée en principe au 27 septembre. Entre-temps, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et deux conférences internationales de soutien au Liban ont eu lieu, une à Paris, l'autre à Rome, sans grand changement sur le terrain dans le dossier des déplacés syriens (réfugiés étant un terme impropre puisque tous les Syriens au Liban n'ont pas le statut de réfugiés). Au contraire, en un an, la situation s'est largement détériorée puisque le nombre de Syriens au Liban a dépassé le million et demi, dispersés sur l'ensemble du territoire, sachant que parmi eux, il y a désormais des extrémistes du Front al-Nosra et de Daech. Avec l'agression contre l'armée libanaise à Ersal, le 2 août dernier, par les combattants jihadistes, la situation est devenue encore plus complexe, d'autant que de plus en plus de Libanais considèrent désormais la présence des Syriens sur leur territoire comme un poids économique, sécuritaire et même militaire. En effet, ce qui a commencé il y a plus de trois ans comme une simple question humanitaire est devenu aujourd'hui un véritable problème pour le Liban et les Libanais qui perçoivent de plus en plus la présence des Syriens comme une menace, en dépit de la tragédie que ceux-ci vivent. L'exemple des habitants du Akkar, qui avaient été les premiers à accueillir les déplacés syriens fuyant les combats dans la région de Homs et de Tell Kalakh et qui aujourd'hui refusent l'installation de camps à Abboudié, est suffisamment concluant.

 

C'est donc dans un contexte particulièrement difficile que va se tenir dans une dizaine de jours la conférence de soutien au Liban à New York. La catastrophe est là et le Liban ne peut pas se contenter de la subir. Selon le conseiller du Premier ministre Tammam Salam, Chadi Karam, le gouvernement cherche à trouver des solutions. L'idée directrice est de réorienter l'aide sociale internationale vers les Libanais qui, jusqu'à présent, non seulement accueillent les déplacés syriens mais voient également ceux-ci bénéficier d'aides alors que dans certaines régions, ils sont, eux, totalement démunis. La situation est d'autant plus dramatique que la crise économique fait rage au Liban aux niveaux privé et public. Ce qui rend encore plus lourdes les dépenses causées par l'accueil des déplacés syriens. Selon les chiffres officiels, les Syriens profitent indirectement des subventions de l'État libanais aux produits de base au détriment des Libanais. Par exemple, 2 millions de paquets de pain sont consommés par jour par les Syriens présents au Liban ; or, la farine est subventionnée par l'État. Même chose pour le courant électrique qui est aussi subventionné, alors que les réfugiés syriens consomment 184 mégawatts par jour. Ils consomment aussi 76 millions de m³ d'eau alors que celle-ci est aussi subventionnée. Toutes ces données augmentent encore les susceptibilités entre les Libanais et les Syriens, les premiers considérant qu'il ne s'agit plus d'une aide humanitaire mais d'un poids insoutenable en période de crise, doublé d'une menace sécuritaire.


Pour cette raison, le gouvernement songe à trouver des formules pour faire profiter les collectivité libanaises les plus fragiles des aides humanitaires en créant des projets sur le plan de la santé, de l'éducation, de l'eau et même du traitement des eaux usées, de manière à réduire la tension entre ces couches vulnérables et les déplacés syriens. Selon Chadi Karam, le gouvernement a établi ainsi des projets pour relancer les économies locales dans les régions défavorisées dans un double objectif : combattre la pauvreté et créer des occasions d'emploi. En même temps, en adoptant des projets pour de nouvelles infrastructures, comme l'aménagement du service routier, le gouvernement créera des emplois pour les Syriens, qui généralement ne rechignent pas à accomplir ces travaux, contrairement à beaucoup de Libanais. En réalité, le conseiller du Premier ministre pense qu'il est important de préserver la dignité des déplacés syriens d'abord sur le plan humain, mais aussi parce que cela rendra les plus vulnérables d'entre eux moins perméables aux thèses extrémistes.


Dans ce contexte, le gouvernement sait donc qu'il n'est pas possible pour l'instant de régler définitivement le dossier des Syriens au Liban, mais il ne peut pas non plus ne pas réagir, d'une part parce que la crise économique est dramatique pour les Libanais eux-mêmes, d'autre part parce que, sans organisation, la présence des Syriens sur le territoire national pourrait devenir une véritable menace pour la stabilité interne. Ce qu'il faudrait donc, c'est utiliser l'aide internationale pour investir dans des projets qui font travailler les Syriens et sont en même temps profitables aux Libanais. Il faut aussi rappeler que parmi le million et demi de Syriens présents au Liban, près d'un demi-million travaillent sur place depuis des années. Ceux-là ne sont pas des déplacés et par conséquent, ils ne doivent pas être traités comme tels. Certaines parties au sein du gouvernement vont jusqu'à proposer à ceux-là d'installer leurs familles au Liban en tenant le raisonnement suivant : si, par exemple, la journée d'un travailleur syrien au Liban est de dix dollars, cela fait pratiquement 5 millions de dollars par jour. Au lieu de laisser les travailleurs syriens envoyer chez eux pour leurs familles ces sommes, elles seront dépensées au Liban si les familles sont là. Mais cette idée ne fait pas l'unanimité, certaines parties ministérielles considérant qu'il y a déjà suffisamment de Syriens au Liban, sans avoir besoin d'ajouter les familles des travailleurs. D'autres encore pensent qu'un Syrien accompagné de sa famille est plus stable qu'un travailleur seul. Ce qui est sûr, c'est que le débat est ouvert et que le dossier constitue une priorité pour le gouvernement, qui cherche des formules basées sur la réorientation de l'aide internationale de manière plus profitable pour tout le monde. Le défi n'est pas facile à relever, mais le Liban n'a pas vraiment le choix.

 

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commentaires (9)

...ajouter au million et demi de Syriens vivant déjà au Liban, "travailleurs" et "déplacés", les familles d'un demi-million de "travailleurs"... Cela voudrait dire une famille d'environ 5 personnes au minimum (1 épouse + 4 enfants) et ferait au bas mot 2500000 Syriens en plus sur notre territoire, sans compter les nombreux enfants à naître... Donc, nous Libanais, serions très vite submergés, pour ne pas dire occupés par ces "travailleurs" et leurs familles de nationalité syrienne, avec leurs coutumes différentes des nôtres. Les enfants de ces "travailleurs" seraient scolarisés dans nos écoles, avec des classes elles aussi débordées par une majorité de petits Syriens, déboussolés par un enseignements bien différent de celui qu'ils ont connu en Syrie, etc. etc. Renseignez-vous auprès des Suisses qui ont connu la vague des refugiés de la guerre de Bosnie, avec tous les problèmes que cela a causé dans les écoles, justement ! Et plus tard, si la guerre se termine en Syrie...comment déloger ces "presque enracinés" de chez nous ??? Je me demande si les concepteurs de cette idée connaissent vraiment comment cela se passe sur le terrain actuellement au Liban...? Sans parler des problèmes sécuritaires liés à ce qui se passe dans les pays voisins ! Irène Saïd

Irene Said

14 h 59, le 16 septembre 2014

Tous les commentaires

Commentaires (9)

  • ...ajouter au million et demi de Syriens vivant déjà au Liban, "travailleurs" et "déplacés", les familles d'un demi-million de "travailleurs"... Cela voudrait dire une famille d'environ 5 personnes au minimum (1 épouse + 4 enfants) et ferait au bas mot 2500000 Syriens en plus sur notre territoire, sans compter les nombreux enfants à naître... Donc, nous Libanais, serions très vite submergés, pour ne pas dire occupés par ces "travailleurs" et leurs familles de nationalité syrienne, avec leurs coutumes différentes des nôtres. Les enfants de ces "travailleurs" seraient scolarisés dans nos écoles, avec des classes elles aussi débordées par une majorité de petits Syriens, déboussolés par un enseignements bien différent de celui qu'ils ont connu en Syrie, etc. etc. Renseignez-vous auprès des Suisses qui ont connu la vague des refugiés de la guerre de Bosnie, avec tous les problèmes que cela a causé dans les écoles, justement ! Et plus tard, si la guerre se termine en Syrie...comment déloger ces "presque enracinés" de chez nous ??? Je me demande si les concepteurs de cette idée connaissent vraiment comment cela se passe sur le terrain actuellement au Liban...? Sans parler des problèmes sécuritaires liés à ce qui se passe dans les pays voisins ! Irène Saïd

    Irene Said

    14 h 59, le 16 septembre 2014

  • L'origine du problème est très simple à identifier : l'absence de toute coordination au sein de l'appareil étatique (la faute peut-être à ceux qui doivent profiter des subventions?) ainsi qu'à l'absence de toute démarche dans ce sens sur le plan international (rien d'étonnant quand on voit la qualité de nos deux derniers ministres des affaires étrangères). Les camps doivent être organisés et contrôlés par l'Etat, la même logique devrait être retenue pour les Palestiniens. "Dans ce contexte, le gouvernement sait donc qu'il n'est pas possible pour l'instant de régler définitivement le dossier des Syriens au Liban", nous le savons depuis fort bien longtemps malheureusement...

    Olivier Georges

    12 h 48, le 16 septembre 2014

  • Ce qu'il faudrait donc, c'est utiliser cette aide internationale pour investir dans des projets qui font travailler ces Syriens et sont en même temps surtout profitables aux Libanais. Il faut aussi rappeler que parmi ce million et plus de Syriens présents au Liban, près d'un demi-million travaille sur place depuis des années. Ceux-là ne sont pas des déplacés et, par conséquent, certaines parties vont jusqu'à proposer à ceux-là d'installer leurs familles ici au Liban en "raisonnant" de cette façon : si, e.g, la journée d'un de ces syriens au Liban est de dix dollars, cela fait pratiquement 5 millions de dollars par jour. Au lieu de laisser ces Syriens envoyer chez eux pour leurs familles ces sommes, elles seront dépensées au Liban si les familles sont là. Mais cette idée ne fait pas l'unanimité, certains, considérant qu'il y a déjà suffisamment assez de ces Syriens chez nous au Liban, sans avoir besoin d'ajouter leurs familles en sus à présent, en voilà assez maintenant ! D'autres encore pensent plutôt, qu'un bääSSyrien, lui, même accompagné de sa famille est encore pire et encore plus instable qu'un de ces bääSSyriens seul. Ce qui est sûr, c'est que le débat reste ouvert, mahééék n’est-ce pas ?!

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 17, le 16 septembre 2014

  • "Comme c’était à prévoir, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts sans grand changement sur le terrain dans le dossier des déplacés syriens. En un an, la situation s'est largement détériorée puisque le nombre de ces Syriens au Liban a dépassé le million, dispersés sur l'ensemble du territoire ; sachant que parmi eux, il y a désormais des extrémistes et chabbîhhâhs sectaires noussaïrîs en sus d’être bää bää bääSSyriaNiques ! En effet, ce qui a commencé il y a plus de trois ans comme une simple question humanitaire est devenu aujourd'hui un véritable problème pour le Liban et les Libanais qui perçoivent de plus en plus la présence des Syriens comme une menace, en dépit de la tragédie que ceux-ci vivent à cause de la saloperie aSSadique. L'exemple des habitants chïïtes du Sud, qui avaient été les premiers à accueillir les déplacés syriens pro-bääSSdiots fuyant les combats dans la région de Derää et de Kounaïtrâh, et qui aujourd'hui refusent l'installation de camps à Tâïybéééh, Tébbnîne et rachidïyéééh, est suffisamment concluant !".

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 00, le 16 septembre 2014

  • On est toujours dans les mêmes chémas que ceux qui avaient facilité l'entrée des palestiniens chassés par les usurpateurs de terre , on les voit cette fois ci complice du complot contre la Syrie légitime , le retour de bâton se fera contre notre pays pour accueillir encore plus la misère du monde qui nous entoure . Il est plus difficile de combattre les effets de l'incompétence des dirigeants passés que l'incompétence elle même ! on constatera au passage que la binsaoudie , qu'on veut mettre à la tête d'une coalition anti daech (ses propres disciples)(???) alors qu'elle est à la tête du complot anti état syrien, n'accueille aucun , comment vous dites Scarlett ? ah oui ,déplacé !

    FRIK-A-FRAK

    10 h 59, le 16 septembre 2014

  • Excellent article! Ca c'est de l'information. On devrait payer double ou triple à Mme Haddad.. quand on voit ce qu'on lit de tordu par la très vieille garde parfois! Et puisqu'on parle de réorientation... SUPER! Etant donné la nulleté notoire de nos gouvernants hétéroclytes et surement incompatibles, que l'on boucle difficilement chaque fois comme une valise trop pleine de bibelots inutiles pour le voyage, je vais donc leur filer mon numéro de compte bancaire en promettant avec un sourir à 36 dents d'en faire meilleur usage.. bon, vous me direz que c'est facile, évidemment! (un dividende mérité irait bien sur à Scarlett qui a dégoter le tuyau.. si si madame, j'insiste!)

    Ali Farhat

    10 h 57, le 16 septembre 2014

  • TRÈS BON ARTICLE. DU CHARABIA ABRUTIQUE ! PAS VOTRE ARTICLE MADAME SCARLETT HADDAD... MAIS LES ASSERTIONS DE CERTAINS QUE SI LES SYRIENS ÉTABLISSENT AUSSI LEURS FAMILLES LES RENTRÉES SERAIENT DÉPENSÉES AU LIBAN. AU CONTRAIRE... TOUTE LA FAMILLE TRAVAILLERAIT ET ÉCONOMISERAIT ( ET ILS SAVENT ÉCONOMISER, NON COMME LES LIBANAIS ) POUR PRENDRE CET ARGENT UN JOUR AVEC EUX... CHEZ EUX. MESSIEURS, DE GRACE, ARRÊTEZ VOS FANTASMAGORIES DANS TOUS LES DOMAINES !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 26, le 16 septembre 2014

  • "Certaines parties au sein du gouvernement vont jusqu'à proposer à ceux-là d'installer leurs familles au Liban en tenant le raisonnement suivant (...): "Ce raisonnement ne tient pas debout: ce que gagne un ouvrier syrien ne lui permet certainement pas de faire vivre sa famille au Liban, où le niveau de vie est bien plus élevé qu'en Syrie. Il faudra encore les nourrir, les soigner, les éduquer... Qui va payer pour ça???? Nous? Et continuer à vivre dans la peur et la menace en se demandant qui d'entre eux, est un terroriste, se terrer chez soi pour leur laisser la place? Ca suffit!!! De plus, il n'y a que l'appât d'un éventuel gain qui intéresse nos dirigeants? Et notre confort et notre sécurité alors??? Une seule solution au problème des réfugiés: les renvoyer chez eux...

    NAUFAL SORAYA

    08 h 06, le 16 septembre 2014

  • Des projets, des projets et des projets ! Dont aucun n'arrive à exécution. Et la dictature nazie frérote (tant chérie par Haret Hraik et Rabieh) continue à refouler des milliers de réfugiés syriens au Liban -pardon, des déplacés, car déplacés ça consomme moins de pain, moins d'électricité, moins d'eau subventionnés par l'Etat ! Laditeee mauditeee dictaure fréroteee a juré de détruire ce pays. Elle y arrive cette fois ! Et toujours avec l'aide de sots du pays !

    Halim Abou Chacra

    03 h 18, le 16 septembre 2014

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