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Moyen Orient et Monde - Eclairage

Islamisme ou autoritarisme ? Ni pile ni face !

Que reste-t-il, trois ans après, des « printemps arabes » ? Que reste-t-il à part la dérangeante impression de s'être fait dupé ? S'il semblait désormais admis que les peuples arabes n'était pas condamnés à être gouvernés par des régimes autoritaires, comment expliquer que, dans la seule année 2014, ces mêmes peuples aient élu ou réélu Abdelaziz Bouteflika, Abdel Fattah al-Sissi et Bachar el-Assad ?


Le premier, à la tête de l'Algérie depuis 1999, vient de briguer, à 77 ans et malgré un état de santé précaire, un quatrième mandat d'affilée en obtenant dès le premier tour plus de 80 % des suffrages. Le deuxième, qui tellement désireux d'obtenir son plébiscite, au point de violer la loi électorale en prolongeant le scrutin d'une journée supplémentaire, incarne consciencieusement le retour de l'ordre militaire en Égypte et n'hésite pas à déclarer publiquement, non sans un certain cynisme, que le monde arabe n'est pas prêt pour la démocratie ! Enfin, le troisième, imperturbable malgré les 180 000 morts syriens, profite de la cacophonie régionale pour se positionner comme le moindre mal.


Chacune de ces trois élections nécessite une analyse précise prenant en compte les facteurs conjoncturels et structurels qui lui sont propres. Néanmoins, il est difficile de nier la symbolique générale qu'elles dégagent, à contre-courant de l'histoire impulsée par les révoltes arabes : celle d'une victoire du bloc de l'autoritarisme.
Une victoire fondée à partir d'une rhétorique populiste et efficace : la nécessité d'endiguer la menace islamiste. De ce fait, à bien des égards, l'autoritarisme se renforce en se présentant comme la seule alternative au sentiment de peur qui accompagne, à tort ou à raison, le terme d'islamisme. Ce dernier permet ainsi de justifier, entre autres, la militarisation des régimes, les procès de masse et les atteintes aux libertés individuelles et collectives. Toutefois, loin d'être nouvelle, cette histoire se répète depuis plus d'une cinquantaine d'années. En effet, le colonel Gamal Abdel Nasser, pourtant ancien membre des Frères musulmans, envoya un nombre conséquent des cadres de cette confrérie en camps de travaux forcés. Cette politique s'avéra payante pour museler une potentielle opposition, sans que personne n'y trouve rien à redire. La méthode fut également utilisée par les régimes baassistes syriens et irakiens. Ces derniers y ajoutèrent même une nuance en libérant les mouvements islamistes au gré de leurs stratégies locales et régionales. Pour autant, malgré leur longévité et leur marge de manœuvre, ces régimes ne peuvent, en aucune façon, se prévaloir d'avoir endigué l'islamisme. Bien au contraire, leur politique répressive a permis d'alimenter la rhétorique du martyre, dont ses mouvements usent et abusent. Aussi, l'autoritarisme a fait le lit de la radicalisation de l'islamisme. En clair, les deux mouvements se sont nourris de la haine que leur inspirait l'autre, entraînant au fur et à mesure un cercle vicieux et infernal de radicalisation.

 

(Lire aussi : Syriens et Irakiens pris en otage entre « la tyrannie de l'ordre et la tyrannie du chaos »)


Aujourd'hui, plus que jamais, ces deux mouvements, dans la multiplicité de leurs formes respectives, animent, ou plutôt encagent, l'actualité politique dans le monde arabe. L'exemple le plus frappant est vraisemblablement celui de l'opposition modérée syrienne prise au piège entre deux barbaries. À ces deux mouvements, mais aussi à l'incohérence des politiques occidentales à leurs égards, il est possible de reprocher bien des maux qui ont frappé le monde arabe ces cinquante dernières années. Le dernier, et sans doute le plus symbolique d'entre eux, étant l'exode massif des minorités d'Orient sur fond de tensions eschatologiques entre une partie des populations appartenant aux deux grandes branches de l'islam.


S'il est nécessaire de se méfier de l'utilisation systématique d'exemple historique, ces derniers permettent tout de même de prendre un certain recul sur l'histoire immédiate et de dégager des zones d'espoirs. Ainsi, il n'est pas inutile de rappeler que la Révolution française fut suivie d'une longue période de troubles, notamment marquée par la période de la Terreur puis, plus tard, par l'isolement de la France sur la scène européenne à la suite des défaites napoléoniennes. À ce titre, il est encore permis de penser que l'avenir du monde arabe peut se développer en dehors de la fatale infortune qui découle de ce sordide pile ou face. Et que de cet interminable hiver naîtront les fleurs du printemps.

 

 

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LES DEUX FACES DE LA MÊME MONNAIE !!!

LA LIBRE EXPRESSION

06 h 44, le 23 août 2014

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Commentaires (1)

  • LES DEUX FACES DE LA MÊME MONNAIE !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    06 h 44, le 23 août 2014

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