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Liban - Présidentielle

Le programme de Geagea pour une République forte, ou « le respect de la Constitution sans concession »

Rendant public son programme électoral hier, le leader des Forces libanaises a valorisé « les constantes nationales », en n'écartant aucune composante locale de son approche de l'exercice du pouvoir.

C’est en présence d’un large éventail de personnalités politiques, représentant toutes les composantes du 14 Mars, que le leader des Forces libanaises Samir Geagea a exposé son programme présidentiel. Photo Aldo Ayoub

Aux images du 14 Mars qui tapissent traditionnellement les murs de la salle de conférences à Maarab, se sont substitués hier des graphiques du drapeau libanais sur fond blanc.
Cette sobriété a encadré le discours ferme et concis prononcé par le leader des Forces libanaises, Samir Geagea, portant sur sa vision de « la république forte ».
Il a ainsi rendu public son programme pour la présidence de la République, devant une audience marquée par la présence du député Michel Moussa, représentant le président de la Chambre, Nabih Berry, et par une large participation des députés et ténors du courant du Futur, dont deux représentants des présidents Saad Hariri et Fouad Siniora. Toutes les composantes chrétiennes du 14 Mars, y compris le ministre Boutros Harb et le leader du PNL Dory Chamoun, étaient représentées. Les Kataëb ont délégué leur vice-président Chaker Aoun.


En attendant une entente entre les chrétiens du 14 Mars sur un candidat, que soutiendra le courant du Futur, le leader des FL a voulu apaiser toutes les parties, sans abandonner les constantes de son camp. Il a ainsi réfuté indirectement l'argument de l'incompatibilité d'un président fort avec la stabilisation de la situation sécuritaire dans un pays où le consensus reste l'option la plus sûre.
« Le grand défi que je vise à relever en posant ma candidature pour l'élection présidentielle est d'appliquer la Constitution et de veiller au respect des lois. » Ce sont donc les textes, y compris les accords de Taëf, qui constituent les outils d'une présidence forte, celle qui devra « permettre à l'État de recouvrer son pouvoir de décision et d'assurer le retour du mini-État dans le giron de l'État ».
« Je suis pleinement confiant du fait que la présidence, après l'accord de Taëf, est encore dotée de pouvoirs considérables (...) si tant est qu'elle est assumée par un président choisi par les Libanais, par le biais de leurs représentants », a-t-il déclaré d'emblée, renvoyant à la seule tutelle syrienne la responsabilité de « l'anéantissement, de la marginalisation et de la réduction du rôle de la présidence pendant plus d'un quart de siècle ».

 

Verbatim : le discours-programme de Geagea pour la présidence de la République

 

Constantes irréversibles
Aujourd'hui, deux nouvelles donnes ont émergé, censées définir le mandat du prochain président : « Les circonstances difficiles que traversent le Liban et la région » et « l'émergence d'une présidence qui récupère son prestige et son lustre d'antan, grâce aux honorables prises de position de l'actuel président de la République, le général Michel Sleiman ». Aucun président qui souhaite le maintien et le renforcement de ce prestige ne peut donc prétendre déroger aux principes assis par son prédécesseur, et que résument la déclaration de Baabda, évoquée d'ailleurs par Samir Geagea comme document de référence, et le mémoire de Bkerké. Ces documents sont garants des « constantes nationales », dont il retient notamment : « L'indépendance du Liban à l'ombre d'un État libre et fort qui impose sa souveraineté uniquement par ses institutions légitimes ; le respect de la Constitution dans son esprit comme dans sa lettre (...) sans concession, ni division sectaire ni tergiversation, quelles qu'en soient les justifications ; la neutralité du Liban. »
Néanmoins, ce n'est pas « par de simples souhaits et déclarations que les problèmes de l'État se règleront, mais par la prise de décisions et leur mise en application ».
L'on comprend que le cumul de ces décisions serait l'aboutissement d'un usage judicieux « des outils exécutifs dont dispose l'État pour traduire ses aspirations en décisions procédurales (...) sans craintes ni hésitations et sans répression ni intimidation ».
Ce processus n'admettrait pas « la modération », dénaturée par l'exercice politique. « Le slogan de la modération s'est transformé en position partiale mortelle engendrant une politique d'ambigüité, qui souffre d'un manque de décision et de positionnement ».
Plus encore, « le réalisme politique célébré par certains s'est transformé en situation de soumission, de reddition et de coexistence amère avec le fait accompli », a-t-il encore ajouté.
S'abstenir par exemple de confronter le Hezbollah sur des questions sensibles pour éviter soi-disant d'ébranler la stabilité, c'est subir une forme de chantage qui minerait l'État.

 

(Repère: Qui, quand, comment... Le manuel de l'élection présidentielle libanaise)

 

De l'exclusivité de l'usage des armes
Toutefois, le leader des FL n'a pas mentionné explicitement les armes du Hezbollah ni le triptyque controversé de la résistance. Ce sont des principes, puisés dans l'exercice démocratique normal, qu'il a invoqués, en les alliant à l'impératif de n'aliéner aucune partie. Il a ainsi établi un parallélisme entre sa propre lutte contre la tutelle syrienne « jusqu'à la mort et la détention », et « le combat de nos frères au Sud, où ils sont nés et ont vécu, jusqu'à la mort ou la détention dans les prisons israéliennes ». « Je sais et je ressens ce que vous ressentez », a-t-il souligné.
Sous le volet de « L'État et de l'exclusivité des armes », il a reconnu avant tout « la nécessité d'honorer les nobles sacrifices consentis (...) par les Libanais, quelles que soient leurs affiliations ». « Le calvaire longtemps enduré par le peuple libanais » serait donc un calvaire commun, « le prix qu'il paie pour son adhésion à l'indépendance, sa liberté et sa souveraineté ».
Mais la réalisation entière de cette indépendance ne saurait se détacher d'une autre nécessité, celle « d'imposer le concept de l'État ». « Toutes les catégories du peuple libanais doivent respecter l'État (...) et se conformer aux exigences de son édification. »

 

(Lire aussi : Une initiative de Sleiman : les armoiries de la présidence de la République)


Ainsi, sur la base d'un précepte élémentaire selon lequel « aucun pays n'acceptera de partager son pouvoir et la prise de décision avec un parti ou un mouvement politique ni n'acceptera que sa prise de décision soit soumise à l'autorité et à l'influence d'un certain groupe », Samir Geagea défend son intransigeance en ce qui concerne le monopole des armes. « Nous ne ferons pas preuve de clémence ni d'indulgence pour ce qui a trait à "l'exclusivité de l'usage des armes" par l'État libanais et sous son commandement », a-t-il asséné. Corollairement, « l'État libanais est le seul responsable de la protection du Liban et des Libanais et de la riposte aux attaques israéliennes de toutes sortes ».

 

(Lire aussi : Le rapprochement entre le CPL et le Futur modifie le paysage politique, l'éclairage de Scarlett Haddad)

 

« La responsabilité nationale nous oblige à nous unir »
Par le biais d'une rhétorique qui interpelle le malaise partagé des Libanais, le candidat à la présidence a également expliqué sa vision « de l'État et de l'identité ». « La responsabilité nationale nous oblige à nous unir tous, aujourd'hui, pour briser la peur, pour nous libérer de l'angoisse et pour sortir du chaos », entretenu par « les attaques directes et continues qui continuent d'asservir l'État et son entité ».
Cet appel à l'unité rejoint l'esprit du programme, qui déclare « le refus par l'État de tout ce qui sape son équilibre, viole son pacte (de 1943) et menace sa vie commune ».
Samir Geagea évoque dans ce cadre le « défi d'identité » auquel le pays est confronté. L'accord de Taëf devrait ainsi, selon lui, offrir « le cadre politique capable de concrétiser l'esprit du pacte (de 1943) et d'atteindre l'équilibre national ». Cet enjeu imposerait toutefois de « combler ensemble les lacunes de l'application de cet accord à la lumière des pratiques précédentes ».

 

(Lire aussi : La session parlementaire du 23 avril écartera les ténors de la course à Baabda, l'éclairage de Philippe Abi-Akl)


Revenant dans ce contexte sur la loi électorale, il a estimé que « la loi optimale doit assurer l'équilibre entre la coexistence et la bonne représentativité nationale ». Il a ainsi écarté, sans la désigner, la proposition de loi orthodoxe, en critiquant « les lois électorales faussées et fragmentées ayant marginalisé de larges catégories libanaises et attisé le fanatisme confessionnel et religieux ».
C'est dans cet esprit qu'il a condamné d'ailleurs, dans le cadre de son appui sans équivoque au printemps arabe, « le fondamentalisme sous toutes ses formes, le takfirisme et l'extrémisme, qui sont l'autre face de l'injustice et de la tyrannie ». Il a préconisé l'édification « d'une démocratie qui préserve la diversité en Syrie », seule solution pour une stabilité durable en Syrie, selon lui.

 

Pour mémoire
Le triple enjeu, libanais, arabe et occidental, de la candidature de Samir Geagea, l'analyse de Michel Touma

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Aux images du 14 Mars qui tapissent traditionnellement les murs de la salle de conférences à Maarab, se sont substitués hier des graphiques du drapeau libanais sur fond blanc.Cette sobriété a encadré le discours ferme et concis prononcé par le leader des Forces libanaises, Samir Geagea, portant sur sa vision de « la république forte ».Il a ainsi rendu public son programme pour la...

commentaires (4)

Bravo Samîr. Et merci.

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

14 h 15, le 18 avril 2014

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Commentaires (4)

  • Bravo Samîr. Et merci.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    14 h 15, le 18 avril 2014

  • DES VUES TRÈS JUSTES... APPLICATION ? QUI ? AVEC QUI ? ET COMMENT ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 44, le 17 avril 2014

  • Même stratégie de com. à 2 balles que le Hezbollah ...! plus l'ont répète ...le mot national sous toutes ses formes adaptables , plus la milice espère se crédibiliser et 'passer pour légale...! Là, c'est l'usage abusif du drapeau national ...plus l'ont empile les drapeaux plus l'on espère être crédible....! voir présidentiable ...vous dites république bananière aux abois ....?

    M.V.

    12 h 04, le 17 avril 2014

  • OHHHH quel homme !!! ce Geagix Zorro!!!!

    FRIK-A-FRAK

    10 h 43, le 17 avril 2014

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