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Économie - Liban - Social

Grille des salaires : entre implosion et bouleversement économique

La pression sociale semble avoir atteint un point de non-retour. Si la grille des salaires n'est pas adoptée dans quelques jours, les syndicats ont fait savoir qu'ils se dirigeaient vers une grève ouverte et le boycott des examens officiels. Et les instances économiques continuent de crier gare face aux moyens de financement.

Des centaines de manifestants ont accouru en masse hier matin vers le centre-ville de Beyrouth, à l’appel du Comité de coordination syndicale (CCS) pour protester contre le retard dans le transfert de la nouvelle grille des salaires du secteur public au Parlement. Photo Marwan Assaf

L'étau se resserre inexorablement autour des parlementaires concernant leur vote en faveur ou contre le projet de loi sur la grille des salaires des fonctionnaires. L'équation est simple. Ils ont affaire, d'un côté, à la colère grandissante des syndicats et de la rue qui attendent depuis deux ans et demi l'approbation de cette grille, et, d'un autre, aux mises en garde alarmistes des organismes économiques et des spécialistes du monde de l'économie et des finances qui assurent que les moyens proposés pour le financement de cette grille sont suicidaires. Et quelle que soit l'issue finale de ce feuilleton qui s'éternise, les présages ne sont pas bons.


Côté syndicat, la détermination est au plus haut. La « victoire » des journaliers d'Électricité du Liban (EDL), avec l'adoption hier au Parlement d'une proposition de loi modifiée sur leur intégration au cadre, a renforcé les fonctionnaires et enseignants grévistes dans leur conviction que « la bataille se gagne dans la rue ». Rappelons en effet que depuis trois jours, les journaliers manifestaient contre certaines clauses qu'ils jugeaient injustes, comme les conditions d'organisation du concours et le montant des indemnités pour ceux qui échoueraient, telles que prévues par le texte de loi. Ils avaient menacé de « plonger le Liban dans le noir » si rien n'était fait pour satisfaire leurs demandes. Ils ont finalement obtenu gain de cause.

 

(Lire aussi : Le projet de loi sur les journaliers d'EDL enfin approuvé par le Parlement)

 

Un volcan social bientôt incontrôlable
Ainsi, prenant appui sur le sort des journaliers, des centaines de manifestants ont accouru en masse hier matin vers le centre-ville de Beyrouth, à l'appel du Comité de coordination syndicale (CCS) pour protester contre le retard dans le transfert de la nouvelle grille des salaires du secteur public au Parlement. Des bus, venant de nombreuses régions libanaises, ont convergé vers les alentours du Parlement et les administrations publiques, les écoles et l'Université libanaise ont observé un jour de grève. Le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, Élias Bou Saab, s'est joint aux manifestants place Riad el-Solh, « car leurs demandes sont justes et il est de notre devoir de politiciens d'être aux côtés des citoyens dans leurs combats pour plus de justice sociale ».


Mais plus que le spectre d'une grève générale ouverte, c'est la menace de boycott des examens officiels lancée par le président du Comité de coordination syndicale (CCS), Hanna Gharib, qui est prise très au sérieux depuis plusieurs jours. Ainsi, après avoir affirmé qu'il ne céderait pas à la pression des manifestants, le président de la Chambre Nabih Berry a appelé hier à la tenue d'une nouvelle session parlementaire pour finaliser l'étude du projet de loi. « La grille des salaires du secteur public sera adoptée au Parlement la semaine prochaine », a affirmé hier, confiant, le président du syndicat des enseignants des écoles privées, Nehmé Mahfoud. « L'implosion sociale est encore plus grave que l'explosion sécuritaire. Nous ne pouvons pas supporter plus longuement cette situation », a-t-il déclaré, appelant les commissions parlementaires mixtes à finaliser l'étude du projet de loi et à le transférer demain au Parlement pour son adoption finale.

 

(Pour mémoire : Chammas qualifie d'« orgie fiscale » le financement de la grille des salaires )

 

Des conséquences économiques dramatiques ?
Face à cette grogne sociale, les voix qui s'élèvent depuis plusieurs mois pour dénoncer « l'improvisation et l'incohérence des moyens proposés pour financer la grille » ne faiblissent pas. Dans une entrevue accordée au quotidien al-Joumhouria, le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, a réitéré son soutien « à l'amélioration des conditions de vie des travailleurs, mais pas au détriment de la santé économique du pays ». « L'adoption de la grille risque de creuser davantage le déficit public, de faire augmenter les taux d'intérêt et de créer une inflation qui, sans augmentation de la productivité, plongera le pays dans une récession assurée », a-t-il indiqué. « Un tel bouleversement des comptes publics doit être accompagné de véritables réformes, et pas uniquement d'une augmentation des impôts, équivalant à 4 % du PIB », a opiné M. Salamé.


Lundi dernier, les organismes économiques avaient également tiré une énième fois la sonnette d'alarme en mettant le doigt sur « l'orgie fiscale que représente le financement de la grille des salaires ». Le président de l'Association des commerçants de Beyrouth (ACB), Nicolas Chammas, accusait la sous-commission d'avoir « trompé les citoyens avec des slogans comme les moyens de financement sont assurés », alors qu'en réalité ils ne le sont pas du tout, car 341 milliards de livres ont été ajoutés par rapport au texte initial rédigé par le gouvernement et 357 milliards de livres supplémentaires pour inclure un éventail encore plus large de bénéficiaires. Selon lui, la sous-commission a doublé les chiffres des prélèvements fiscaux par rapport à ce que proposait le texte initial du gouvernement, en les faisant passer de 1 300 milliards de livres à 2 294 milliards de livres sur une base constante, ajoutés à 1 200 milliards de livres sur base temporaire. « Ainsi, le total des recettes fiscales supplémentaires atteint 3 494 milliards de livres, soit 5 % du PIB, ce qui constitue un véritable choc fiscal pour l'ensemble des secteurs économiques du pays », avait-il déploré.
Tous les regards seront donc tournés demain vers les commissions parlementaires mixtes, qui auront pour mission de donner leur accord final sur le projet de loi et de le transférer au Parlement.

 

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L'étau se resserre inexorablement autour des parlementaires concernant leur vote en faveur ou contre le projet de loi sur la grille des salaires des fonctionnaires. L'équation est simple. Ils ont affaire, d'un côté, à la colère grandissante des syndicats et de la rue qui attendent depuis deux ans et demi l'approbation de cette grille, et, d'un autre, aux mises en garde alarmistes...

commentaires (2)

Les politiciens en "économie" ont une singulière manière de procéder. Il n'y a pour eux que deux sortes d'institutions, celles de l'art et celles de la nature. Les institutions publiques et donc anciennes, mahééék, sont des institutions artificielles ; celles du commerce et de l’industrie Mercantiles sont, par contre, des institutions naturelles. Ils ressemblent en ceci aux théologiens qui, eux aussi, établissent deux sortes de croyances ou de sectes. N’importe laquelle d’elles qui n'est pas la leur est une invention des hommes, tandis que la leur propre est une émanation d’un dieu quelconque. En disant que les rapports sociaux modernes actuels sont naturels, ces politiciens "penseurs" en économie font entendre que ce sont là des rapports dans lesquels se crée la richesse et se développent les technologies conformément aux lois de la nature. Donc ces rapports sont eux-mêmes des lois naturelles indépendantes de l'influence du temps. Ce sont des lois éternelles qui doivent toujours régir la société. Ainsi il y a eu de l'histoire, mais il n'y en a plus dorénavant ! Il y a eu de l'histoire, puisqu'il y a eu des institutions publiques donc anciennes, et que dans ces institutions archaïques publiques on trouve des rapports sociaux tout à fait différents de ceux de la société commerciale et industrielle nouvelle et donc Moudééérne, que ces "penseurs" veulent faire passer pour naturels et partant éternels !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

12 h 07, le 03 avril 2014

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Commentaires (2)

  • Les politiciens en "économie" ont une singulière manière de procéder. Il n'y a pour eux que deux sortes d'institutions, celles de l'art et celles de la nature. Les institutions publiques et donc anciennes, mahééék, sont des institutions artificielles ; celles du commerce et de l’industrie Mercantiles sont, par contre, des institutions naturelles. Ils ressemblent en ceci aux théologiens qui, eux aussi, établissent deux sortes de croyances ou de sectes. N’importe laquelle d’elles qui n'est pas la leur est une invention des hommes, tandis que la leur propre est une émanation d’un dieu quelconque. En disant que les rapports sociaux modernes actuels sont naturels, ces politiciens "penseurs" en économie font entendre que ce sont là des rapports dans lesquels se crée la richesse et se développent les technologies conformément aux lois de la nature. Donc ces rapports sont eux-mêmes des lois naturelles indépendantes de l'influence du temps. Ce sont des lois éternelles qui doivent toujours régir la société. Ainsi il y a eu de l'histoire, mais il n'y en a plus dorénavant ! Il y a eu de l'histoire, puisqu'il y a eu des institutions publiques donc anciennes, et que dans ces institutions archaïques publiques on trouve des rapports sociaux tout à fait différents de ceux de la société commerciale et industrielle nouvelle et donc Moudééérne, que ces "penseurs" veulent faire passer pour naturels et partant éternels !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    12 h 07, le 03 avril 2014

  • Hehehehe...on va rigoler. Pendant des mois ils ne foutent absolument rien, se jouent de nous et touchent des salaires mirobolants. Puis lorsque leur chef decide qu'il serait bon quand meme de travailler un peu , ils se réunissent et c'est la foire aux cancres. Des lois médiocres sont votées, les fumisteries sont legion, et tout va le meilleur du monde dans ce bas monde. A quand le grand balai ?

    Tabet Karim

    09 h 19, le 03 avril 2014

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