Le président Obama et sa « plume » Cody Keenan : une énième lecture du discours sur l’état de l’Union.
Le président des États-Unis ne peut entrer au Congrès sans la permission explicite de celui-ci. Le discours annuel sur l'état de l'Union est donc une occasion exceptionnelle pour le chef de l'État de s'adresser directement aux deux Chambres (celle des représentants et le Sénat). Ce discours lui permet d'exposer clairement les accomplissements de son administration et son agenda pour l'année à venir. Une politique à multiples volets et chiffres qu'il faut présenter en un temps limité. C'est ainsi une tâche rédactionnelle de titans qui se fait avec une équipe de spécialistes et un bureau de rédaction.
Depuis deux ans, ce bureau est dirigé par une plume de 33 ans : Cody Keenan. Ce dernier a débuté sa carrière en travaillant avec le défunt sénateur Edward Kennedy, après des études à l'université de Harvard. S'il maîtrise l'art de transcrire et résumer la pensée d'un autre, cet exercice, a-t-il dit un jour, est plus délicat lorsque l'on a affaire à un écrivain accompli ; en l'occurrence Barack Obama. Cultivant humour et malice, M. Keenan avait posté à l'avance sur son site Instagram la photo du manuscrit du discours présidentiel, complètement floue... Bien malin qui aurait pu y déceler une lettre. Il définit ainsi son travail : « Nous sommes pareils à des étudiants qui, après des nuits de veille, présentent leur texte rédigé à leur professeur et attendent son verdict. Ce qui est bien avec le président Obama, c'est qu'il opère, quand il le désire, des changements détaillés. De plus, il est généreux de son temps et nous dirige vers sa pensée. »
Le discours est presque cent fois remis sur le métier, jusqu'à quelques jours avant qu'il ne soit publiquement prononcé. Le président Obama aime utiliser des blocs de papier jaune pour y transcrire ajouts ou biffages. Pour son dernier discours, le travail d'écriture a commencé il y a plusieurs mois avec une équipe de chercheurs spécialisés dans différents domaines. Cody Keenan, passionné par son travail et carburant au café, a été qualifié de « sans peur » par l'un de ses professeurs universitaires. Il avoue qu'il n'hésite pas à argumenter avec le président, mais admet aussi qu'il a rarement gain de cause.
Si pour cette toute jeune plume ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, c'est avant tout grâce à son profond travail de gestation à divers degrés. Il considère que la rédaction d'un discours n'est pas uniquement une question d'écriture, mais également de connaissance de la voix. Ainsi, il a commencé par se concentrer sur deux livres audio de M. Obama et ses discours diffusés en vidéos sur YouTube ; pour mieux capter les schémas de sa phraséologie et sa cadence vocale. Puis il a suivi l'impact politique du mot, non seulement pour provoquer l'émotion mais pour faire bouger, dans la direction voulue, le poids lourd du Congrès. Qui compte en son sein autant (si ce n'est plus) d'ennemis que de partisans du président.
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