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À La Une - Collection

La Folger Library, le plus grand temple shakespearien

Qu’y a-t-il de commun entre William Shakespeare et Nelson Mandela ? La prison sud-africaine de Robben Island, comme en témoigne la Folger Library à Washington, la plus grande bibliothèque au monde dédiée à l’auteur de « Hamlet ».

Les œuvres complètes de Shakespeare « déguisées ».

Cette bibliothèque, qui s’est doublée d’un espace culturel à diverses vocations (conférences, symposiums, concerts, expositions), vient d’offrir au public une vision rare : « Un livre derrière les barreaux, ou la bible Shakespeare de Robben Island ». Robben Island était, dans les années 60, une prison de sécurité maximale pour des condamnés à de longues peines (de dix ans à perpétuité), notamment pour les membres de l’ANC et les mouvements de lutte contre l’apartheid. Nelson Mandela y fut détenu pendant près de 18 ans, à partir de 1964, avant d’être transféré à la prison Victor Verster, près de Paarl. Le futur président Jacob Zuma, actuellement en fonctions, y fut emprisonné dix ans. Avec eux se trouvait un activiste nommé Sonny Venkatrathnam (d’origine indienne), qui avait demandé à ses gardes d’avoir de la lecture. On lui avait répondu qu’il devait s’en tenir à un seul livre. Il choisit Les œuvres complètes de William Shakespeare que son épouse lui apporte.

 

Mais les conditions carcérales s’étant faites plus restrictives, il se voit confisquer l’ouvrage et, à l’office religieux du dimanche, il est prié d’avoir sa Bible la prochaine fois. Arguant l’avoir oubliée dans le dépôt d’objets, il s’y rend et reprend son livre favori. Il a alors l’idée de couvrir complètement la jaquette avec des cartes de vœux représentant des dieux hindous, qu’il se fait envoyer par sa famille, et fait passer les œuvres de Shakespeare pour un ouvrage sacré car, à ses dires, « pour les Afrikaners, seuls Dieu et les avocats sont sacrés ». Se ressourçant lui-même dans les écrits du grand poète et dramaturge anglais, il fait circuler l’ouvrage parmi ses camarades de prison, leur demandant de noter leurs passages favoris. Ce qu’a notamment fait Nelson Mandela en marquant, le 16 décembre 1979, ces vers de la pièce de Shakespeare Jules César, qu’il a souvent citée dans ses discours :


« Les lâches meurent plusieurs fois avant leur mort
Les vaillants ne goûtent à la mort qu’une seule fois.
De toutes les merveilles dont j’ai entendu parler,
Il me semble que la plus étrange est que les hommes devraient craindre,
Voyant que la mort est une fin nécessaire,
Qu’elle viendra quand elle viendra. »

 


Plus d’un million de livres et témoignages précieux
C’est toute la grande valeur de ce Shakespeare « déguisé » qui comporte 31 autres signatures de détenus politiques. Pour son possesseur, Sonny Venkatrathnam, il n’a pas de prix. D’où son quasi-refus de le vendre malgré les multiples offres venant de prestigieux collectionneurs. Il le conserve précieusement, mais sait rendre son dû à son auteur qu’il adule. Il a ainsi emmené cet ouvrage unique dans la ville natale de Shakespeare, Stratford Upon Avon, où il a lu des extraits de cette « bible », faisant surgir à volonté tout le monde du barde. Aujourd’hui, il trône dans un lieu qui lui sied tout aussi bien : la Folger Library à Washington, la plus grande libraire au monde dédiée à Shakespeare. Inaugurée le 23 avril 1932 (jour de l’anniversaire du célèbre dramaturge), elle a été fondée par Henry Clay Folger et son épouse Emily. Folger, alors doyen de la Standard Oil Company (plus tard Mobil), avait commencé par acquérir des ouvrages de Shakespeare lorsqu’il était étudiant au Amherst College.

 

Aujourd’hui, elle se chiffre ainsi :
82 folios – les premières œuvres imprimées de Shakespeare – représentant un tiers des copies existant dans le monde, et la plus grande collection du genre ; 255 000 livres, dont la 3e plus grande collection des premiers ouvrages anglais (1475-1640), la 6e des titres sortis entre 1640 et 1700 ; 55 000 manuscrits datant du XIIIe au XXe siècle ; 27 000 peintures, gravures, dessins, affiches et des programmes de spectacles dramatiques ; une grande collection d’instruments de musique de la Renaissance ; des costumes de théâtre et des archives cinématographiques sur Shakespeare.

 

Car la Folger Library offre aussi et toujours, pour cerner l’environnement shakespearien, une plus grande connaissance de l’Angleterre « élisabéthaine » et de la Renaissance. Au total, plus d’un million d’ouvrages et d’objets.


Des milliers de chercheurs du monde entier transitent régulièrement dans ce grand temple shakespearien, de même qu’un public qui, à longueur d’année, n’en finit pas de découvrir, par le biais de conférences, expositions, concerts et autres manifestations, l’immense talent de l’auteur de Hamlet qui n’a rien perdu de son surnom de « barde » ou celui qui a la passion d’écrire en anglais et dont les œuvres sont reconnues à travers le monde.

Cette bibliothèque, qui s’est doublée d’un espace culturel à diverses vocations (conférences, symposiums, concerts, expositions), vient d’offrir au public une vision rare : « Un livre derrière les barreaux, ou la bible Shakespeare de Robben Island ». Robben Island était, dans les années 60, une prison de sécurité maximale pour des condamnés à de longues peines (de dix ans à...
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