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La recherche, moyen d’action pour une société plus égalitaire

Professeure à l’UL jusqu’en 2008, le Dr Azza Charara Baydoun a été primée cette année par le Conseil national de la recherche scientifique (CNRS), pour l’excellence de sa recherche en sociologie et en particulier sur l’égalité des sexes en relation avec le développement.

Le Dr Azza Charara Baydoun. Photo Marwan Assaf

Un coup d’œil sur quelques-unes de ses publications en dit long sur son travail dans la recherche portant sur la situation des femmes au Liban. Le genre, ce que vous en dites : la connaissance commune face à la réalité de la situation des femmes publié en 2012, Les cas de fémicide (meurtre de femmes) devant les tribunaux libanais en 2011, Les femmes face à la violence : études de terrain en 2010, L’éducation sexuelle au Liban : entre discours laïcs et religieux en 2008, La masculinité et les conditions changeantes des femmes : une étude de terrain en 2007.
Le Dr Baydoun, qui avait un peu plus de cinquante ans lorsqu’elle a obtenu en 1996 un doctorat en psychologie de l’UL, raconte : « L’intérêt que je porte à la situation des femmes au Liban remonte à très loin, aux années 60 et 70. Je venais alors de décrocher une licence en mathématiques de l’AUB. » La jeune étudiante fraîchement diplômée essayait alors à l’époque de comprendre, « avec un groupe de femmes, rassemblées au sein d’un comité, le mouvement d’émancipation de la femme en Occident ». De ce courant libérateur, elle dit : « Il nous a donné un vocabulaire nouveau et nous a permis de mettre un nom sur ce que nous éprouvions au Liban comme citoyennes de deuxième classe. » Le déclenchement de la guerre civile en 1975, avec son lot de peur, de colère et de frustration, était aussi porteur de déception pour la jeune femme qu’elle était. « Chacune des membres de notre comité a suivi sa confession et son parti, regrette-t-elle. Peu étaient comme Laure Moghaïzel. »
Professionnellement, elle choisit l’enseignement. Ce sera les mathématiques, durant trente ans, dans les écoles publiques. Mais, « après 15 ans, j’ai ressenti les limites de ce domaine, confie-t-elle. C’était la guerre et il n’y avait pas beaucoup de place pour la réforme. Je me suis alors intéressée à la psychologie ». Elle intègre l’UL et obtient d’abord une licence en psychologie en 1981, puis une maîtrise en 1988. La guerre la retarde dans son parcours universitaire sans toutefois l’empêcher de réaliser ses projets académiques. « Ça m’a pris dix-sept ans pour obtenir mon doctorat en psychologie, précise-t-elle. Nous avons quitté notre maison une dizaine de fois, sans cesse chassés par les évènements. » Sa thèse de doctorat, intitulée « La santé mentale des femmes libanaises entre les hommes de science et les hommes de religion », est une étude de terrain menée dans la région du Grand Beyrouth. « J’ai rencontré des hommes de religion de différentes confessions : sunnite, chiite, maronite, orthodoxe, protestante et druze. Leurs approches en ce qui concerne la santé psychologique des femmes diffèrent énormément », indique-t-elle.

Bahithat, l’Association des chercheuses libanaises
Aujourd’hui, le Dr Azza Charara Baydoun est consultante en genre, membre de l’Association libanaise de sociologie et membre de la Commission nationale pour la femme libanaise. Elle est également membre de la délégation officielle à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (Cedef) – Cedaw en anglais – auprès du comité de la Cedef des Nations unies. «Actuellement, nous préparons le 4e rapport. Il porte sur les progrès accomplis et les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de la Cedef. Nous communiquons nos observations dans tous les domaines : éducation, loi, milieu de travail, etc. Nous rapportons donc les mesures que prend le gouvernement et ce que fait la société civile pour répondre à chacun des points soulevés par la Cedef. Par exemple, en ce qui concerne la loi contre la violence domestique, elle a été vidée de son sens par la commission parlementaire chargée de l’étudier. Nous devons rapporter cela. Dans les rapports précédents, notre politique de transparence a été reconnue. Nous sommes le seul pays arabe qui n’a pas, dans son rapport, pris la défense de son gouvernement », se félicite le Dr Baydoun.
Au début des années 90, elle fonde, avec d’autres femmes de science, l’Association des chercheuses libanaises, Bahithat. « L’idée de cette organisation est née au cours de la guerre civile. Lorsque des femmes chercheuses de tout bord, refusant les divisions confessionnelles forcées et insistant sur l’unité du peuple libanais, se sont mises à se réunir régulièrement, malgré la violence qui faisait rage, pour discuter de questions d’intérêt intellectuel. »

La recherche est aussi un moyen d’action et de lutte
«Durant la conférence de Beijing, nous avons vu que la recherche était aussi un moyen de lutte. On ne peut pas comme activiste parler uniquement de sentiments. Il faut donner des informations», affirme-t-elle. D’ailleurs, deux de ses recherches sur la violence domestique ont été soutenues par l’association Kafa. « Nos études montrent la réalité du terrain. J’ai dit un jour à un responsable: quand un mari tue sa femme, le meurtre n’arrive pas d’un coup. C’est progressif. D’où l’importance d’avoir une loi contre la violence domestique. Cette loi préviendra donc les meurtres et sauvera des vies. Elle ne sera pas adoptée (uniquement) pour satisfaire les accords internationaux,mais pour sauver des vies », insiste le Dr Charara Baydoun.

R.A.D.
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