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Liban - Décryptage

La bataille du changement et de la réforme, la plus dure à mener !

Pendant deux ans et demi, la classe politique et avec elle les chancelleries arabes et occidentales n'ont cessé de réclamer l'élection d'un président de la République au Liban. Cette échéance était présentée comme la clé de la solution au Liban et le début d'un processus de relance des institutions publiques. Le président de la République a été élu il y a un mois et les problèmes restent les mêmes. Même le vent d'espoir soulevé par l'arrivée du général Michel Aoun à Baabda est en train de se dissiper, la personnalité hors normes du nouveau chef de l'État n'étant pas en mesure, à elle seule, d'aplanir tous les obstacles qui se dressent face à la normalisation de la situation libanaise.

Certes, les plus optimistes continuent à rappeler que la formation du gouvernement n'a pas encore atteint la ligne rouge du délai devenu habituel depuis 2005, mais les Libanais avaient espéré une naissance plus rapide tant l'espoir du changement était grand. Jusqu'à présent, nul n'est en mesure de dire quel est le nœud véritable car aucun esprit sain ne peut croire que le seul froid dans les relations entre le chef de l'État et celui des Marada est de nature à paralyser la formation du gouvernement. Les spéculations vont bon train, sur fond de multiplication des accusations et des contre-accusations.
Pour certains, le vrai problème réside dans le fait de la volonté du président de la Chambre de régler ses comptes à la fois avec le nouveau président et avec le Premier ministre désigné. Le premier n'a pas, selon les sources proches de Aïn el-Tiné, tenu compte du rôle-clé de Nabih Berry dans la gestion des affaires publiques et le second n'ayant pas, toujours selon les mêmes sources, pris soin de consulter le président de la Chambre qui l'a pourtant toujours ménagé, avant de prendre sa décision d'appuyer la candidature de Michel Aoun à la présidence. En refusant de jouer le rôle de médiateur et en se cachant derrière des exigences et des lignes rouges, Nabih Berry souhaiterait donc montrer qu'il reste l'homme fort du pays et l'incontournable passage obligé de toutes les solutions. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le président de la Chambre, qui donne exceptionnellement des entretiens aux médias, multiplie ces derniers temps ses rencontres informelles avec les journalistes, au point que ces déclarations officielles ou non font régulièrement la une des médias dans une actualité locale assez pauvre. Selon cette thèse, en ne contribuant pas véritablement à aplanir les difficultés, préférant jeter la balle dans le camp du président et dans celui du Premier ministre désigné, Berry voudrait donc redéfinir son rôle dans la nouvelle période qui a commencé avec l'élection de Michel Aoun et, en même temps, donner une leçon à tous ceux qui ont cru pouvoir l'ignorer.

Dans une autre version, le véritable responsable du retard dans la formation du gouvernement serait le chef des Marada et son insistance à faire plier le président en se cachant derrière « l'appui gêné » dont il bénéficie de la part du Hezbollah et de ses alliés. En se considérant comme un partenaire de la victoire puisqu'il appartient au même camp stratégique du nouveau chef de l'État, sachant qu'il a fait un grand sacrifice en refusant de se rendre aux séances d'élection présidentielle après l'appui de Saad Hariri à sa candidature, Frangié souhaite faire pression sur le chef de l'État en le poussant à lui donner un portefeuille de poids de sa propre part. Selon les sources proches des Marada, les réticences du camp présidentiel alimentent les doutes sur un accord secret entre le CPL et les Forces libanaises qui font de celles-ci le partenaire privilégié du nouveau régime.

Dans une troisième version, ce seraient plutôt les Forces libanaises qui seraient à l'origine du blocage en augmentant leurs exigences dans le dossier de la formation du gouvernement. Selon cette version, les Forces libanaises chercheraient à créer rapidement un fait accompli en se taillant une part plus importante que leur représentation réelle au sein du gouvernement pour devenir à leur tour incontournables dans le paysage politique des six prochaines années.
Mais au-delà de ces trois versions, toutes plausibles, il en existe deux autres qui sont tout aussi logiques. La première, c'est que la véritable entrave vient de la classe politique dans son ensemble réfractaire à tout changement, ce dernier, quel qu'il soit, mettant en cause le système de privilèges qu'elle a établi. L'objectif des négociations byzantines pour la formation du gouvernement est de couper l'élan de changement et de réforme qui a accompagné l'élection de Michel Aoun à la présidence. Derrière ce procédé, il y aurait donc la volonté d'empêcher tout changement significatif dans le prochain paysage politique à la suite des élections législatives. Il s'agit soit de maintenir le rendez-vous électoral à la date initialement prévue (mai 2017) sur la base de l'actuelle loi, soit de le reporter pour pouvoir adopter une nouvelle loi. Dans les deux cas, il s'agit de porter un coup à la crédibilité du nouveau régime qui avait bâti tout son programme politique sur la réforme et le changement. C'est d'ailleurs ce qui avait tellement fait peur à la classe politique au point de la pousser à accepter le chef des Marada pourtant plus marqué politiquement selon le principe « Tout sauf Michel Aoun » ! Le président continue de promettre aux Libanais que le changement et la réforme sont inéluctables. Mais la bataille sera sans doute l'une des plus dures à mener.

 

 

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commentaires (3)

"La personnalité hors normes de Michel Aoun" Signé : Scarlett Haddad Effaçons de l'Histoire du Monde, Alexandre-le-Grand, Charlemagne, Napoléon Bonaparte, Churchill, Charles de Gaulle etc...

Un Libanais

18 h 02, le 06 décembre 2016

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Commentaires (3)

  • "La personnalité hors normes de Michel Aoun" Signé : Scarlett Haddad Effaçons de l'Histoire du Monde, Alexandre-le-Grand, Charlemagne, Napoléon Bonaparte, Churchill, Charles de Gaulle etc...

    Un Libanais

    18 h 02, le 06 décembre 2016

  • Je remercie Scarlett pour cet éclairage. Et dit comme ça on publie au moins ?

    FRIK-A-FRAK

    13 h 41, le 06 décembre 2016

  • ON NOUS RACONTE ET ON TROUVE NORMAL QUE CE SOIT DES REGLEMENTS DE COMPTES PERSONNELS DES ETERNELS BOYCOTTEURS A L,APPARTENANCE NON NATIONALE AVEC LES AUTRES LIBANAIS QUITTE A ENVENIMER DE NOUVEAU LA VIE DES CITOYENS DE CE PAUVRE PAYS QU,ILS ONT OTAGE DE LEURS MAITRES PERCES... DU BARATIN !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 33, le 06 décembre 2016

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