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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

L’hystérie et la maternité, mystère majeur de la féminité

Comme toujours, il faut remarquer qu'on parle de l'hystérique au féminin. La question posée aux psychanalystes paraît ainsi anodine : l'hystérie se trouve seulement chez la femme ?

L'hystérie se rencontre beaucoup plus souvent chez la femme que chez l'homme qui est plus proche de la stratégie de l'obsessionnel. Ce qui ne signifie pas qu'il n'y a pas d'hommes hystériques ou de femmes obsessionnelles comme on le verra plus loin. Seulement, si l'hystérie est « une maladie de la féminité », c'est aussi une « maladie de la maternité ». Depuis l'Antiquité, l'hystérie désigne l'utérus (hustéra, matrice ou utérus) et interroge donc l'autre figure de la féminité qui est la maternité.

Le mythe de « l'utérus baladeur » qu'on a vu précédemment, mythe qui remonte environ à 2 500 ans, suppose que l'utérus se balade dans le corps à la recherche de sperme, comprime les différents organes et pousse l'hystérique à souffrir en différents endroits de son corps. Si l'utérus se balade à la recherche de sperme, c'est bien parce que la femme hystérique souffre d'insatisfaction sexuelle. Mais ce manque de sperme indique aussi que l'hystérique est à la recherche de maternité. La vérité cachée dans ce mythe se vérifiera par la suite. Depuis longtemps, les milieux médicaux remarquent que lorsque la femme hystérique tombe enceinte et accouche, ses symptômes disparaissent.

Ce qui nous a mis sur cette piste de l'importance de la maternité chez l'hystérique, ce sont ses fantasmes fréquents d'infanticide. Évidemment, ces fantasmes sont terrifiants. Mais il suffit de les analyser pour réaliser que le fantasme d'infanticide est la solution trouvée par l'hystérique pour rejeter sa maternité et préserver ainsi sa féminité. Que de fois les femmes sont rejetées par leurs époux simplement parce qu'elles sont devenues mères.

La jeune patiente de Freud, Dora, était fascinée par Mme K., la maîtresse de son père. Elle ne comprenait pas pourquoi son père était amoureux de cette femme qu'il préférait à sa mère. Dans son analyse du cas, devenue célèbre, Freud s'est trompé deux fois. En 1905, il pensait que Dora était amoureuse de son père puis, par substitution, de Mme K. et enfin de lui dans le transfert. Or les hommes ne l'intéressaient pas, et pas parce qu'elle était homosexuelle comme l'a pensé Freud en 1923, rectifiant ainsi sa première interprétation.

Le rapport de Dora à Mme K., fait d'adoration et de contemplation, ne peut être réduit à l'homosexualité. Il est classique de considérer que dans le jeu de ses identifications, la femme hystérique adopte la position de l'homme, particulièrement dans les relations sexuelles, réelles ou fantasmées. Mais ce n'est pas dans un désir homosexuel. La femme hystérique veut sonder la femme en son mystère, le mystère de sa jouissance, la jouissance féminine, et celui de la maternité. Si dans son rapport à un couple l'hystérique est toujours intéressée par la femme de l'homme qui l'attire, d'où la fréquence « des scènes à trois » dans ses fantasmes, c'est parce qu'elle est à la recherche des deux mystères de la jouissance féminine et de la maternité. C'est pour cette raison qu'elle s'identifie à l'homme, car ainsi elle peut, par cette identification, sonder le mystère féminin.

Avant de clore ce chapitre sur l'hystérie, il faut remarquer avec François Perrier que si le mot hystérie provoque toujours autant de réactions hostiles, c'est parce que « l'hystérie mobilise les défenses inconscientes contre le mystère toujours redoutable de la sexualité féminine ». Et quelle que soit l'époque, on se ligue toujours contre elle « pour dénoncer l'hystérie comme impudique imago de la mauvaise mère et, tout autant, comme ambigu désordre d'une chair androgyne ». Depuis les années 80, c'est la psychiatrie américaine qui s'est liguée contre l'hystérie : sa disparition comme entité nosologique de la psychiatrie américaine d'aujourd'hui ne répond à rien d'autre que cela.

Avec le mot hystérie, la psychiatrie américaine a banni du DSM IV puis du DSM V les mots psychanalyse et symptôme, substituant au concept de symptôme celui de trouble et multipliant les troubles à l'infini pour en faire autant de maladies à traiter. Le mot trouble indique un dérèglement mécanique, alors que le mot symptôme désigne le sujet qui souffre. Dans cette logique mécaniste, la femme hystérique peut passer encore par la table d'opération des chirurgiens. En effet, nous constatons toujours sur le corps de certaines hystériques insensibles, indifférentes à leurs symptômes, les cicatrices de ces interventions. On les appelle « Les balafrées de l'abdomen », à cause des cicatrices propres aux poly-opérés que l'on observe sur leur abdomen. Avec le mythe de l'utérus baladeur, il faut dire que les anciens ont compris, il y a 2 500 ans, le mystère de l'hystérie. Alors qu'à notre époque, elle est tout simplement rejetée, annulée, déniée.

 

 

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