À la Salle de Verre du ministère du Tourisme à Hamra*, 55 œuvres réalisées en diverses techniques (huile, acrylique, dessin, collages, photomontages ou encore installations) déclinent les rêves et les obsessions de Mona Jabbour. Ses regrets et ses colères aussi.
Tout un faisceau de ressentis que cette artiste qui questionne sans cesse son existence, son entourage et ses émotions traduit en lignes et couleurs, en paysages architecturaux superposés de fleurs géantes, ou encore en compositions mixant lettres et personnages phéniciens sur fond d'immeubles contemporains enchevêtrés...
Réunies sous l'intitulé Cont'd, abréviation de Continued, « parce que les idées et les thèmes que je développe dans cette exposition sont la continuation de ceux que j'ai précédemment abordés », indique-t-elle, les toiles de Mona Jabbour sont l'expression de son regard à la fois critique et inquiet sur le pays du Cèdre. « Vers quoi s'achemine ce pays où l'obsession de construire bouche progressivement l'horizon ; où le vacarme et le chaos sont devenus facteurs de stress et de laideur ; où une mondialisation anarchique a fomenté les aliénations des uns aux autres et où la corruption et le mercantilisme avide dénaturent, chaque jour un peu plus, le paysage méditerranéen pour en faire une terre de détritus ? », lance-t-elle en une diatribe rageusement questionneuse.
Retrouver la beauté et se débarrasser du stress
« Où est le respect de la terre, de nos coutumes, de notre culture millénaire ? poursuit-elle. Que sont devenus les descendants des Phéniciens qui ont apporté au monde l'alphabet ? Comment préserve-t-on leur héritage en vivant dans des cités coupées de l'horizon marin, et en érigeant des constructions toujours plus hautes, plus impersonnelles et plus étrangères à notre mode de vie ? »
C'est le sentiment que la guerre persiste, sous une forme différente, dans ce pays qui perd chaque jour un peu plus son âme et son identité, qui alimente aussi l'inspiration de Mona Jabbour. D'où ces personnages phéniciens qui semblent errer entre les immeubles de ses paysages beyrouthins... Comme autant de symboliques rappels d'un nécessaire retour aux racines. Des représentations urbaines auxquelles elle superpose aussi parfois des fleurs géantes, comme « un appel à retrouver le goût de la beauté ».
Et si l'une de ses installations, composée d'un drapeau écrasé par les détritus, se fait l'écho d'un sentiment de lassitude face à la décrépitude d'un État comme d'un sentiment national, l'artiste ne baisse pas les bras pour autant. Et, à travers une autre installation, interactive cette fois, composée de chaises noires quadrillant le fond de la salle d'exposition, elle invite les visiteurs à s'asseoir et à suivre toute une série d'injonctions affichées sur posters, censés les aider à se débarrasser du stress et retrouver leur positivisme !
*Jusqu'au jeudi 1er septembre. Horaires d'ouverture : ce week-end de 15h à 19h et en semaine de 10h à 19h.
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Carte de visite
Des études de publicité et de beaux-arts à la BUC suivies d'une maîtrise en 1990 en peinture de la Pratt Institute de New York, Mona Jabbour mène depuis une double carrière d'artiste et de professeur à la LAU. Influencée par les courants récents et les développements dans le monde de l'art contemporain, elle exprime et communique ses valeurs à travers son art qui, sous un abord parfois bigarré et disparate, véhicule un fort engagement social et politique.
Pour mémoire
Sous les pavés... les fleurs de Mona Jabbour
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