L’introduction au Liban des bonbonnes de gaz composites fait polémique

Faut-il autoriser l'importation de bonbonnes de gaz domestique fabriquées avec des matériaux composites – fibres de carbone, d'aramide ou de verre enrobées dans une matrice de résine – au Liban? « Le Conseil des ministres a examiné jeudi un projet de décret présenté en mai par le ministère de l'Énergie et de l'Eau et qui autorise les sociétés privées à importer et distribuer ces récipients », explique à L'Orient-Le Jour la directrice générale du Pétrole au ministère de l'Énergie et de l'Eau, Aurore Feghali. « Mais les débats autour de cette mesure n'ont pas permis au gouvernement de donner son feu vert à cette mesure dans l'immédiat » , ajoute-t-elle.

Des débats qui résultent sans doute d'abord de l'opposition des distributeurs de bonbonnes de gaz à l'adoption de ce décret, révélée par le quotidien an-Nahar dans son édition de mercredi. « Nous sommes opposés à l'introduction de ces bouteilles qui ne sont pas adaptées au marché libanais », confirme à L'Orient-Le Jour le président du syndicat des distributeurs de bonbonnes de gaz, Jean Hatem. « Ces professionnels ne veulent simplement pas voir arriver de nouveaux concurrents sur le marché », commente Mme Feghali.

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Quatre fois plus cher
Les bouteilles composites ne sont pas commercialisées au Liban alors que les normes relatives à leur fabrication, leur entretien et leurs conditions de stockage ont été arrêtées par l'Institut libanais des normes et des spécifications (Libnor) en 2012. « Trois fois plus légères, elles sont toutefois quatre fois plus chères que leurs équivalents en métal, pour un prix qui gravite à 120 dollars pour une bonbonne de 10 kg », indique Mme Feghali. « Le ministère de l'Énergie ne s'attend pas à une explosion des ventes de ce type de bonbonnes si le Conseil des ministres autorise leur importation, pas plus qu'il ne compte l'imposer aux usagers », souligne-t-elle encore.

Pour Mme Feghali, les caractéristiques techniques des bonbonnes composites plaident en faveur de leur commercialisation au Liban. « Elles sont aussi plus résistantes que les bonbonnes en métal, ont une durée de vie plus élevée et limitent les risques d'explosion », ajoute-t-elle. De leur côté, les distributeurs de bonbonnes de gaz affirment que ces bouteilles composites « ne sont pas adaptées aux pays chauds » et ont été « interdites dans certains pays arabes, comme l'Arabie saoudite ». Un argument contesté par Rock Chlela, représentant au Liban d'Hexagon Ragasco, un fabricant norvégien de ce type de contenants, qui espère voir le dossier débloqué. « L'importation de ces récipients a été autorisée en 2015 en Arabie saoudite après avoir été suspendue pendant quelques années en raison d'un différend entre l'administration saoudienne et un importateur », expose-t-il.

M. Hatem invoque ensuite le fait que l'introduction des bonbonnes composites va obliger les distributeurs libanais à investir « des dizaines de milliers de dollars » pour adapter leurs équipements pour pouvoir transporter, stocker et entretenir ces récipients. « Faux », répond M. Chlela, pour qui « les différences entre les procédures pour chaque type de contenants sont minimes ». « Chaque type de bonbonnes est régi par des normes distinctes, ce qui suppose que les distributeurs devront également former leurs employés et informer leurs clients des règles propres à l'utilisation des bonbonnes composites », rétorque M. Hatem.

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Le syndicat des distributeurs estime enfin que l'introduction des bonbonnes composites, si elle devait s'avérer inéluctable, ne devrait pas être actée avant la fin de la campagne de renouvellement du parc libanais de bonbonnes de gaz lancé en début d'année par le ministère de l'Énergie. « Introduire les nouvelles bouteilles pendant l'opération va créer des disparités entre les consommateurs et compliquer la gestion des opérations de remplacement pour les distributeurs », affirme M. Hatem. Un avis que ne partage pas le président de l'Association de protection des consommateurs (APC), Zouhair Berro, dont l'organisation s'est prononcée en faveur de l'introduction des nouvelles bonbonnes. « L'APC n'y est pas opposé, tant que les consommateurs conservent le droit de choisir la solution qui leur convient », indique-t-il.

Pour rappel, la campagne de remplacement porte sur environ 4 millions de bonbonnes – de 10 et 35 kg – sur 5 ans. Quelque 350 500 bouteilles de 10 kg et 8 940 bonbonnes de 35 kg ont déjà été remplacées à ce jour, selon Mme Feghali, une opération qui est facturée 1 500 livres sur le prix de chaque bonbonne au consommateur. M. Hatem fait, lui, part d'un remplacement effectif de 480 000 bouteilles, expliquant la différence par un décalage dans la transmission des données.

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