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Liban - En dents de scie

Cosmétique de l’ennemi

Treizième semaine de 2013.
Abdallah II de Jordanie aura beau la chercher partout, il ne trouvera jamais l’intelligence de son père défunt, le roi Hussein. Ni, naturellement, sa capacité à regarder, écouter, voir, entendre et analyser avec une rapidité et une efficacité redoutables. Mais le jeune monarque hachémite, entre deux virées jet-set, deux bloody-maries sur les bords de la mer Morte, deux dissolutions et deux embryons de miniprintemps populaire, a eu, c’était déjà en 2002, ce que les vrais-faux experts appellent une vision. Une divination. Un éclair d’intuition. Absolument génial. Cela arrive une fois dans une vie : à l’époque, Abdallah II, pratiquement seul au monde, ex abrupto et discrètement, avait mis en garde contre les ravages à venir de la wilayet el-faqih. De ce que les ayatollahs iraniens, au grand dam de leur propre peuple, tricotaient dans le secret des alcôves téhéranaises. De cet Anschluss sainte-nitouche qu’ils entendaient effectuer. Le roi de Jordanie avait, le premier, énoncé haut et fort ce qui se murmurait tout bas, bouleversé, virtuellement certes, la géopolitique proche-orientale, dit deux mots : croissant chiite.
Depuis quelques années, trois ans après la prémonition Abdallah, en 2005, en février exactement, s’est posée (ou a été posée – mais par qui ? ) dans la région en général, et au Liban en particulier, avec le bruit assourdissant de l’explosion de mille kilogrammes de TNT, la question sunnite. Au Liban en particulier.
Épisode un : l’assassinat physique de Rafic Hariri, qui avait centuplé de gestes et d’efforts pour devenir le sigma de tous les sunnismes, arabes soient-ils ou pas – leur plus petit dénominateur commun, du Pakistan, où il entretenait de très étroites relations avec Pervez Musharraf, au Maroc, en passant par la Turquie d’Erdogan, la Syrie sunnite, l’Égypte moubarakisée encore jusqu’à la moelle et, naturellement, l’épicentre saoudien.
Épisode deux : mai 2008 et le blitzkrieg du Hezbollah sur le Beyrouth übersunnite, stoppé net par les druzes de la Montagne et l’accord, scélérat et hypocrite comme rarement, de Doha.
Épisode trois : l’assassinat politique de son héritier-malgré-lui, Saad Hariri, début 2011, et le retour, sous le couvert légèrement tartufe de centrisme, du sunnisme un peu m’enfichiste, plutôt spectateur, plutôt joueur de trictrac et particulièrement non aligné de la guerre civile libanaise – un sunnisme originel un peu génétiquement modifié par un homme légitimement arriviste et pickpocket politique, c’est de bonne guerre... : Nagib Mikati. Personnage finalement beaucoup moins lisse, moins prévisible, moins monochrome que prévu...
Épisode quatre : la volonté de plusieurs factions libanaises et étrangères de transformer (de nouveau...) la toujours éminemment sunnite Tripoli en Fukushima libanais via les furoncles métastasés de Jabal Mohsen et de Bab el-Tebbaneh ; de convaincre les Libanais et le monde que tous les salafistes sont d’immondes terroristes extrémistes nourris dès le biberon aux préceptes d’Oussama Ben Laden, les convaincre que tous les excités religieux (et armés) sunnites sont plus dangereux et plus fondamentalistes que les tee-shirts noirs du Hezbollah, épitomés absolus, pourtant, du milicien parfait.
Épisode quatre bis : l’éclosion-miracle, comme par parthénogénèse, d’un (épi)phénomène aux frontières du réel, d’un doux-dingue entre électron libéré et poupée télécommandée, capable du pire comme du meilleur : Ahmad el-Assir.
Épisode cinq : l’assassinat en octobre 2012 du chef des renseignements des FSI, l’ennemi n° 2 du Hezbollah, du CPL et de tout ce que le Liban compte de boutiques encore inféodées au gang Assad : Wissam el-Hassan. Épisode cinq bis : le refus catégorique de ces mêmes prosyriens, pourtant champions toutes catégories des prorogations de mandat, de donner deux ans de plus à la tête des FSI au patron et ami intime d’el-Hassan, Achraf Rifi. Épisode cinq ter : Nagib Mikati démissionne, en (grande) partie à cause de l’affaire Rifi.
Bien sûr, l’homme d’affaires milliardaire n’est pas Mère Teresa : s’il a claqué la porte au nez du 8 Mars à qui il doit pourtant son carnavalesque retour au Sérail, c’est avant toute chose pour des raisons éminemment politiques, tactiques soient-elles ou stratégiques : Nagib Mikati est loin d’être un bleu. Mais cette démission à cet exact moment-là a quelque chose d’assez énorme.
Ou du moins, peut redistribuer totalement la donne. À l’heure où l’on parle de timides, de presque honteux retours de langue entre le Futur et le Hezbollah, à l’heure où ce brave Michel Aoun ne sait plus à quel turban se vouer, à l’heure où Michel Sleiman joue une gigantesque partie de poker, que Walid Joumblatt se prépare de nouveau à jouer le faiseur de prince et que Nabih Berry pense plus que jamais à son futur politique, cette espèce d’union sacrée, désintéressée ou furieusement opportuniste, qui regroupe, bon gré mal gré, à visage découvert ou dans le placard, 99 % des sunnites libanais autour d’Achraf Rifi a quelque chose d’incroyablement inédit.
La question sunnite transmute chaque instant. Pour la première fois depuis 2005, ce ne sont plus les autres qui la gèrent, qui en jouent, qui l’habillent et la déshabillent. Pour la première fois depuis 2005, les sunnites eux-mêmes se retrouvent au cœur de la salle des commandes de leur communauté. Presque seuls. Ce serait bien bête de ne pas en profiter. Et, surtout, ensuite, d’en faire bon usage au service de l’État. Et de la nation.
L’occasion est en platine : ce n’est (surement) pas un hasard si le catalyseur de cette évolution est l’un des hommes les plus nécessaires, les plus nobles et les plus entiers que le Liban contemporain ait connus : Achraf Rifi.
(Sûrement) pas un hasard si cet homme est la bête noire ultime et définitive du Hezb et du CPL.
Treizième semaine de 2013.Abdallah II de Jordanie aura beau la chercher partout, il ne trouvera jamais l’intelligence de son père défunt, le roi Hussein. Ni, naturellement, sa capacité à regarder, écouter, voir, entendre et analyser avec une rapidité et une efficacité redoutables. Mais le jeune monarque hachémite, entre deux virées jet-set, deux bloody-maries sur les bords de la mer...

commentaires (5)

On est toujours dans les descendances ou fils de .....Abdallah decrit comme loin d'etre aussi intelligent que son pere a eu un eclair de genie en decouvrant, tout seul comme un grand le rayon du croissant chiite ?? ca serait pas plutot qu'on le lui aurait souffle au typan ?? le second heritier , lui aussi tres loin de l'aura de son defunt de pere, subitement apres une traversee de desert intellectuel avere, revient au centre d'une reprise en main de la communaute sunnite , comme le messie ( pas le footballeur ) a travers son employe Achraf Rifi ??? ne serait ce pas plutot pour chouraffer la mise au clown de saida qui devenait la honte de la famille sunnite prise a son propre piege ?? Que la communaute sunnite se ressaisisse , c'est le souhait de tout bon libanais, mais leur donner comme le fait Ziad, l'absolution sur une injection d'eau benite, la , il y va un peu trop fort, en besogne.

Jaber Kamel

13 h 22, le 01 avril 2013

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Commentaires (5)

  • On est toujours dans les descendances ou fils de .....Abdallah decrit comme loin d'etre aussi intelligent que son pere a eu un eclair de genie en decouvrant, tout seul comme un grand le rayon du croissant chiite ?? ca serait pas plutot qu'on le lui aurait souffle au typan ?? le second heritier , lui aussi tres loin de l'aura de son defunt de pere, subitement apres une traversee de desert intellectuel avere, revient au centre d'une reprise en main de la communaute sunnite , comme le messie ( pas le footballeur ) a travers son employe Achraf Rifi ??? ne serait ce pas plutot pour chouraffer la mise au clown de saida qui devenait la honte de la famille sunnite prise a son propre piege ?? Que la communaute sunnite se ressaisisse , c'est le souhait de tout bon libanais, mais leur donner comme le fait Ziad, l'absolution sur une injection d'eau benite, la , il y va un peu trop fort, en besogne.

    Jaber Kamel

    13 h 22, le 01 avril 2013

  • Des forces occultes à l'oeuvre. Elles sont régionales, mais coiffées les unes par des trans-sibériens kagébistes et aveugles Maotistes, et les autres par des trans-atlantiques au chromosome yankiste et des Européanistes déchus...

    SAKR LEBNAN

    20 h 55, le 30 mars 2013

  • Mais vraiment du n'importe quoi!! du-n'importe-quoi! La vraie vérité c'est que le hariri fils l'héritier n'a rien de l'étoffe de son père.. Najib Mikati est un artiste jongleur, il est sorti de scène après son numéro et s'il est très applaudit il reviendra pour bis ou le tris. Le problème de nos frères sunnites qu'ils soient au Liban ou ailleurs c'est qu'ils sont compréhensiblement très désunis surtout autour de la question du terrorisme djihadiste. Alors on voit leurs rois, émirs tituber partout comme le king hachémite qui souffle le chaud et froid à cadence quotidienne; c'est le plus mal barré de tous car belle gueule certes (relativement), bbc english, mais un roi sans argent ni naft (2id min 2iddém w 2id min warà".. Alors Pourquoi?? ahhh, c'est parce que il est menacé d'un coté par l'alliance salafo-wahhabo-amérosioniste afin qu'il les aide à faire toutes les injustices contre la Syrie voisine ou alors que sa couronne ira conter fleurette in ingliche à la reine d'Angleterre, remplacée par un morsi mords-ça du terroire jourdain à l'instar de l'Egypte et de la Libye... Le bon croissant et l'étoile des autres ont pointé la boussole sur al-qods.

    Ali Farhat

    16 h 54, le 30 mars 2013

  • Trés intéressant cet article en 3D ... par son coté °Alamutien façon Vladimir Bartol... merci pour sa mise à jour innattendue ...!

    M.V.

    12 h 19, le 30 mars 2013

  • Dans cette longue phase de l'histoire du maudit Moyen-Orient, le "croissant chiite" dénoncé et entendu par le roi Abdallah de Jordanie c'est tout simplement l'impérialsme iranien enduit de chiisme perse. Tous ceux qui entravent le projet de cet impérialisme sont éliminés, même s'ils sont des Rafic Hariri. Le Liban est au centre de cette tourmente sans fin. Des aveugles, des sourds, des profiteurs et des déséquilibrés contribuent à l'y enfoncer.

    Halim Abou Chacra

    04 h 48, le 30 mars 2013

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