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Culture - Vient de paraître

Bouquet garni pour des senteurs orientales...

Senteurs variées, réflexions diverses, expressions de tous crins, propos de voyageurs ou de poètes, images et mots entrelacés, souvenirs et témoignages, impressions et sensations, trilinguisme bien libanais (français, anglais et arabe), autant de moyens pour cerner de nouveaux livres en librairie.

Les chevaux de Hrair.

On commence par la peinture qui, à Beyrouth, reste d’une activité frénétique, vu la cascade d’expositions dans une capitale qui étouffe pourtant dans ses embouteillages, sa délirante inflation cernée par une effarante paupérisation, et le vernis d’une culture plus mondaine que fédératrice de vraie création... Dans cette orchestration chaotique et criarde, un gros pavé, supposé être un luxueux livre d’art. Pour parler des toiles ultradécoratives et maniéristes de Hrair. Une couverture cartonnée pour 200 pages de photos et beaucoup de noir pour des pages vides, avec une presque totale absence de textes analytiques, usant d’un indécis trilinguisme, au demeurant ici chétifs et crayeux, avec des exergues bateaux et une impression peu soignée. La notice biographique, déjà surmédiatisée sur une période de plus d’un demi-siècle, décrit le parcours d’un peintre qui s’est illustré par la représentation, tout en joliesse et en panache, des icônes et des chevaux en cavalcade.
À plus de soixante-quatre ans, Hrair offre, à travers un album d’images léchées, avec influences diverses (très ouvertement «van goghiennes» ses fleurs), les diverses facettes d’une palette qui ne boude guère les dorures, aux teintes d’un carnaval vénitien orientalisant, exubérant et chamarré de couleurs.

À travers les arcades d’une fenêtre libanaise
Récit amusant d’une lady Esther Stanhope des temps actuels... Elizabeth Thorneycroft Smith, Écossaise d’origine, venue en 1994 pour un festival au pays du Cèdre, est tombée en amour devant les rives phéniciennes, le soleil, les mezzés et la dolce vita libanaise. Mais en ce temps-là, il y avait aussi des éclats de guerre et l’angoisse des couvre-feux. Qu’à cela ne tienne, l’intrépide Anglaise, dotée d’un joli brin de plume bien entendu british, lauréate d’un concours épistolaire à travers la BBC, non contente seulement de bien s’installer à Byblos (cossus «Peeling blue Shutters», «Banana house» et «Fishermans’s chalet» avec photos à l’appui), décide aussi de publier des lettres qui en disent long sur ses émotions, sensations et bonheur de se trouver, les pieds dans l’eau, au cœur de l’Orient.
Et en témoigne cet ouvrage, véritable hymne d’amour à Byblos et aussi pour tous les coins découverts en randonnées, en un anglais ciselé et d’une sensibilité un peu fleur bleue, frisant avec un brin de naïveté, l’appartenance à une classe privilégiée, soucieuse de ses sorties en plein air, de ses chats et chiens (là aussi photos à l’appui avec pose de l’auteure en chapeau, en digne héritière des valeurs vestimentaires féminines britanniques!) qu’on se doit de bien traiter... Tout cela dans un pays où la dignité humaine est copieusement piétinée, mais cela on en parle peu ou prou, car on a d’autres chats à fouetter...
Cet ouvrage, intitulé Throug a Lebanese window (147 pages, éditions Dergham), mi-journal, mi-carnet de notes, regard d’une étrangère amie du Liban, ou commentaires et réflexions sur un mode de vie oriental sans oublier, en douce, la comparaison avec l’Occident, ces pages respirent de charmantes anecdotes, l’amour des paysages baignés de soleil et le désir d’une femme de vivre seule, loin de son «home land», tradition aventurière britannique perpétrée par de grandes dames qui ont contribué à l’histoire, au prestige et à la libération de la femme.

«Eau-de-vice», source de Parnasse pour Béchara Maroun...
Sur la pochette de la couverture du livre, telle une ondine s’échappant de l’eau, un jeune éphèbe, barbe en collier, torse nu, regard dragueur et toisant le lecteur, sort en toute coquine nonchalance des eaux cristallines d’une source... Image de fausse transparence qui se greffe sur le titre du premier recueil, en langue française, Eau-de-vice de Béchara Maroun (éditions World Book Publishing, 138 pages) avec des textes écrits entre 2008 et 2011. Précision de dates pour cerner la précocité et l’urgence de l’inspiration...
Jeune poète de vingt et un printemps, Béchara Maroun taquine les muses et versifie, en rimes et métriques ordonnées, en plus d’une centaine de «poèmes marécageux», le chaos «systématique» qui l’habite (comment en serait-il autrement puisqu’il aime Rimbaud?) avec des mots, des images et des associations verbales qui ont tous les attributs et le lyrisme d’une fiévreuse poésie. Si Joumana Haddad, dans sa narcissique préface du recueil, salue et flaire en lui un jeune pair du Parnasse de sa trempe, c’est que le futur le prouvera sans doute, car tout jeune homme, en principe, est empli d’une certaine essence à la Musset...
Romantisme moderne, révolte douce ou vitriolée, acerbe critique sociale, besoin de s’exprimer, de se confier et de s’épancher, dépassement d’une certaine introspection, se retrouver et s’assumer, voilà les préoccupations, toujours en demi-teintes, de la plume d’un poète qui écrit dans l’espace de la langue de Racine tout en n’ignorant rien de sa native langue arabe.
Avec des mots parfois recherchés (uranisme jésuite, catharsis), une certaine emphase, la profusion de citations de noms (Ganymède, entre autres), une amusante complaisance pour la poisse, la poésie ici pousse en terrain marécageux (mais chic et cultivé, par-delà ses allures bravaches) et élégamment bouseux. On retient certaines subtiles trouvailles littéraires, don d’authentique poète, et on conclut sur ces charmants vers à la limpide sonorité d’une innocence qui ne manque pas de narquoise malice:
«Un biscuit rose a chanté toute la nuit
Sous une fenêtre, sérénade de minuit
Au petit matin, suicidaire, est allé se tremper
Dans un grand bol de café au lait.»
On commence par la peinture qui, à Beyrouth, reste d’une activité frénétique, vu la cascade d’expositions dans une capitale qui étouffe pourtant dans ses embouteillages, sa délirante inflation cernée par une effarante paupérisation, et le vernis d’une culture plus mondaine que fédératrice de vraie création... Dans cette orchestration chaotique et criarde, un gros pavé, supposé...

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