Sur le net, on débat de la culture tous azimuts

Que faire de Proust cent ans après? Comment expliquer l’éclipse des intellectuels? Mais aussi : le jeu vidéo fait-il peur ? Wikipedia est-elle encore crédible? Ou encore: Tintin mérite-t-il d’être la bande dessinée la plus chère du monde? Autant de questions et bien d’autres, certaines sérieuses d’autres plus farfelues, mais toutes traitées avec une rigueur égale par les intervenants – dont la plupart sont des journalistes, des historiens, des philosophes et autres penseurs. Sur grandsdébats.fr, le site des «discussions culturelles en lien avec l’actualité, initiées par des experts».
Le débat est donc lancé, sur des sujets aussi divers que les arts, la littérature, l’histoire, les sciences, la société et le web/numérique.
Placé sous la direction du romancier, chroniqueur et journaliste Pierre Assouline et de Philippe Clerget (président du groupe de la presse culturelle au sein du syndicat français de la presse magazine), ce site a pour vocation de « porter sur la place publique et de susciter des débats culturels en lien avec l’actualité ». C’est un lieu d’échange donc, entre les contributeurs qui apportent leur expertise et les internautes qui interviennent dans le débat grâce aux commentaires. Un peu comme si l’on assistait à un débat télévisé ou encore à une table ronde. En direct. Avec possibilité de commenter, retwitter et même « liker » sur les réseaux sociaux où le site a ouvert des succursales...
Un espace de réflexion, donc, apparu comme l’émanation d’un milieu intellectuel typiquement et purement français (franchouille a-t-on envie de dire). Qui maintien un espace de discussion publique, ouvert à toute la sphère des « intervenautes » (pour reprendre l’expression consacrée par Assouline). Sur des sujets qui occupent le devant de la scène médiatique. Et permettent de mieux comprendre le monde contemporain.
L’intellectuel du XXIe siècle n’est plus à l’image de celui qui cogitait, dans sa tour d’ivoire, cigarette au bec. L’intello 2.2 intervient sur le net et y a même planté ses pénates. Où il intervient, fort de ses connaissances, avec beaucoup d’esprit, parfois.
Dans la section consacrée aux débats sur l’art, le dernier en date s’intéresse aux séries télévisées. Une affirmation, lancée par le journaliste Nils C. Ahl : les séries télé sont bien le 10e art, dit-il. Son argument : « La télévision a déjà ses premiers chefs-d’œuvre, les séries comme Les Sopranos, Prison Break, la Maison-Blanche, ou Twin Peaks qui doit autant au soap opera qu’au théâtre absurde – ou qu’au cinéma de David Lynch, son créateur. Un authentique chef-d’œuvre. Inclassable, dit-on souvent, car on n’ose avouer que la télévision est un huitième ou un dixième art. »
Le journaliste Pierre Serisier renchérit : « Il est toujours difficile de dire ce qu’est une œuvre d’art, sinon qu’elle nous propose un monde dont notre imagination finit par avoir besoin. Les séries n’offrent rien de plus, mais rien de moins. »
Et Martin Winckler de faire également son petit éloge des séries télé. Avis parfaitement partagé par l’écrivain Vincent Colonna selon lequel nous assistons aujourd’hui à la naissance d’un nouvel art. Donc, côté série télé, pas de débats venimeux, mais plutôt consensus mou.
Si le débat tourne en rond, parfois. Il vire d’autres fois à l’aigre. Comme lorsque les intellectuels français se demandent pour leurs confrères intellectuels français gardent le silence face aux horreurs commises en Syrie. Ou, en littérature, lorsqu’ils se posent des questions sur la nécessité de retraduire les classiques. Mais, dans un cas comme dans l’autre, il défend et illustre un travail intellectuel de réflexion et de critique qu’il convient de saluer. Et pourquoi pas à y participer.
Histoire de questionner le futur en pensant le présent. Ou vice versa.