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Liban - Censure

Ziad Doueiri, attaqué de l’intérieur...

Nul n’est prophète en son pays. Encore un exemple qui confirme ce proverbe : un des nombreux talents libanais qui trouvent la reconnaissance ailleurs alors qu’on la leur refuse sur leur propre territoire.

En ce 24 février 2013, nuit prestigieuse des oscars, on aurait pu, il faut le préciser, on aurait pu, voir le cinéaste Ziad Doueiri aligné parmi les nominés à l’oscar du meilleur film étranger et aspirer à tenir dans ses mains la statuette effilée en or. On aurait pu voir ce talentueux cinéaste qui a ressuscité le cinéma libanais contemporain avec West Beirut couronné pour son récent film The Attack. On aurait pu... Sauf que les décideurs de ce pays en ont décidé autrement.
Le public aurait pu être fier de ce prodige qui, après six ans de travail et de dur labeur, de récoltes de fonds, d’appel aux producteurs, a réussi à adapter avec finesse et maîtrise totale du sujet le roman tant acclamé de Yasmina Khadra. Certes, le sujet n’était pas facile, voire ardu. D’ailleurs, Ziad Doueiri avoue lui-même que Focus Features, une subdivision de Universal Studios, avait trouvé son œuvre « trop propalestinienne pour les Américains et trop pro-israélienne pour les Européens ». Le projet rejeté, il a été vite récupéré par les producteurs Jean Brehat and Rachid Bouchareb. Doueiri ajoute à ce propos : « En tant que cinéaste, j’aimerais être jugé pour mes qualités artistiques, et non pour des prises de position politiques. » À noter que le cinéaste libanais ne prend aucune position vis-à-vis du drame narré dans le film.
L’Attaque raconte en effet l’histoire d’un chirurgien palestinien bien adapté à la communauté médicale à Tel-Aviv et dont la vie se retrouve bouleversée lorsque sa femme meurt au cours d’une attaque terroriste, car il sera prouvé par la suite qu’elle se trouve incriminée et responsable de cette attaque.

Identité
Le film de Ziad Doueiri, librement adapté de Khadra, a été acclamé aux Festivals du film Telluride et international de Toronto. Il a réussi à décrocher le prix spécial du jury au Festival du film à San Sebastian (Espagne) et l’Étoile d’or à celui de Marrakech. Projeté et ovationné récemment au Festival international de Dubaï (premier pays arabe à l’avoir projeté), The Attack aurait pu au moins être nominé pour le prix du meilleur film étranger par l’Académie des oscars. Mais pour être admis à la sélection officielle, il fallait que le pays d’origine le soumette. C’est-à-dire le Liban. Et c’est là que le bât blesse.


Lorsqu’en octobre 2012, Doueiri présente son film au ministre de la Culture Gaby Layoun, ce dernier le remet à un comité du cinéma pour étudier le cas. Ce comité s’empressera de rejeter le film, prétendant que The Attack n’était pas « assez libanais ». Interrogé par le site électronique nowlebanon, Ziad Doueiri précise : « D’abord, le comité a prétendu qu’il n’était pas assez libanais. Ensuite, qu’il n’avait pas été tourné au Liban et que certains acteurs du film sont israéliens. » Selon Doueiri encore, « aucune clause inscrite dans le règlement de l’académie n’oblige le metteur en scène à tourner dans son pays d’origine, ni à avoir un sujet strictement local. Pour le comité donc, il a été jugé non nécessaire d’envoyer aux oscars un film qui n’avait rien de “libanais”».


Qu’en est-il alors de l’Autrichien Michael Haneke ? Son film Amour concourt au prix du meilleur film étranger en tant qu’autrichien, alors que ses deux interprètes sont français et que le lieu de tournage est Paris !
Rappelons que Ziad Doueiri et sa scénariste Joëlle Touma sont tous deux de nationalité libanaise. Quant au fait d’avoir fait jouer des acteurs de nationalité israélienne, le metteur en scène libanais rétorque : « Je me dois d’être sincère et authentique avec mon public. Je ne peux me moquer de lui et engager des Égyptiens, et prétendre qu’ils sont israéliens alors que l’action du film se déroule en Israël. » « De plus, ajoute-t-il, certains Palestiniens cohabitent avec les Israéliens. Doit-on être plus royaliste que le roi? » « Si on m’avait dit que mon film ne valait rien, conclut Ziad Doueiri, je me serais rendu à l’évidence alors que, là, le Liban rate une occasion de gagner une reconnaissance internationale, non dans mon intérêt, mais dans l’intérêt de l’industrie cinématographique qui ne reçoit aucune aide de la part des dirigeants libanais. »

 

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En ce 24 février 2013, nuit prestigieuse des oscars, on aurait pu, il faut le préciser, on aurait pu, voir le cinéaste Ziad Doueiri aligné parmi les nominés à l’oscar du meilleur film étranger et aspirer à tenir dans ses mains la statuette effilée en or. On aurait pu voir ce talentueux cinéaste qui a ressuscité le cinéma libanais contemporain avec West Beirut couronné pour son...

commentaires (1)

Si le ministre Layyoun avait accepté de parrainer le film une autre cabale aurait été déclenchée mais cette fois a cause de la présence des israéliens dans le film. "Hterna ya 2ar3a m'en wen nboussek".

Chadarev

02 h 07, le 25 février 2013

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Commentaires (1)

  • Si le ministre Layyoun avait accepté de parrainer le film une autre cabale aurait été déclenchée mais cette fois a cause de la présence des israéliens dans le film. "Hterna ya 2ar3a m'en wen nboussek".

    Chadarev

    02 h 07, le 25 février 2013

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