En dépit de certaines déclarations qui se veulent optimistes et de la visite d’appui au dialogue, initié par le président Michel Sleiman, effectuée hier par le chef de l’État français, la situation interne reste bloquée. Le refus du 14 Mars de tout dialogue avant la démission du gouvernement et l’identification des assassins du général Wissam el-Hassan place toutes les composantes libanaises dans l’impasse. Si on pourrait à la limite comprendre la décision du 14 Mars de boycotter les réunions parlementaires en présence du gouvernement, on comprend moins son refus de participer aux réunions des commissions parlementaires qui se consacrent à la législation. Une source de la majorité précise à cet égard que le véritable objectif du 14 Mars serait non pas de faire chuter le gouvernement, mais plutôt de gagner du temps pour éviter l’adoption d’une nouvelle loi électorale et mettre ainsi le pays devant l’obligation de tenir des élections au printemps 2013 sur la base de la loi de 2009. D’autant que le ministre de l’Intérieur a répété à plusieurs reprises que s’il doit organiser des élections sur la base d’une nouvelle loi, celle-ci doit être adoptée par le Parlement au début de 2013.
Si cette attitude du 14 Mars devait se poursuivre, la majorité actuelle se trouverait dans de beaux draps et devrait choisir entre deux maux tout aussi détestables : soit accepter la tenue des élections sur la base de la loi de 2009, qui, selon les différents instituts de sondage, est en faveur du 14 Mars et en particulier du courant du Futur ; soit décider de reporter le scrutin législatif avec toutes les conséquences négatives que cela pourrait avoir sur le pays et sur son image à la fois interne, régionale et internationale.
Pour cette raison, confie la source de la majorité, les différentes composantes du 8 Mars réfléchissent sur les moyens de sortir de cette impasse, sans pour autant céder à la volonté du 14 Mars de tenir les élections sur la base de l’actuelle loi électorale. D’autant que le 8 Mars, qui affirme appuyer la vision du patriarche maronite le cardinal Béchara Raï, ne peut pas accepter d’en rester à la loi actuelle, rejetée clairement par Bkerké.
Dans le contexte actuel, les options ne sont pas nombreuses et le 8 Mars se trouve devant deux choix : soit il cherche un compromis avec Walid Joumblatt, lequel a clairement affirmé son appui au maintien de la loi actuelle, soit il tente une ouverture en direction du courant du Futur. En théorie, l’ouverture en direction de Walid Joumblatt semble plus facile et plus logique, d’autant que les dernières positions du leader druze semblent en faveur des orientations du 8 Mars. Elle est même pratiquement amorcée avec les échanges de louanges entre le chef du PSP et le président de la Chambre Nabih Berry. Mais elle bute sur un point essentiel : Joumblatt ne veut pas entendre parler d’une autre loi que celle qui est actuellement en vigueur, et s’il retire ses voix à la majorité parlementaire actuelle, celle-ci n’en sera plus une. Les tractations ne seront donc pas simples, d’autant que Joumblatt a une grande influence dans trois circonscriptions vitales : Aley, le Chouf et Baabda, sans parler de la Békaa-Ouest et de Beyrouth.
La seconde option qui consiste à tenter une ouverture en direction du courant du Futur peut paraître prématurée, mais elle n’est pas exclue par certaines composantes du 8 Mars. L’idée serait de rééditer en quelque sorte l’accord quadripartite de 2005, sans pour autant exclure le général Aoun, pour éviter au pays le report du scrutin législatif. Le président de la Chambre, qui reste l’homme du compromis par excellence, et qui n’a jamais rompu le contact avec le courant du Futur et avec le chef de son bloc parlementaire Fouad Siniora, pourrait donc être mis à contribution pour faire une de ses propositions magiques. Mais il faudrait pour cela que le courant du Futur rabaisse le plafond de ses revendications et ne comprenne pas cette initiative comme un signe de faiblesse, annonciateur de la fin proche du régime syrien et par conséquent de celle de ses alliés libanais. Il s’agirait plutôt d’une initiative pour sortir le pays de l’impasse et lui assurer un minimum de stabilité dans cette période assez délicate.
Les prochaines semaines devraient être déterminantes à ce sujet. Soit le Liban saisit la chance qui lui est offerte, par l’appui clair de la communauté internationale à sa stabilité, de se mettre à l’abri des développements en Syrie, soit, au contraire, il continue de lier son sort à cette crise qui semble appelée à se prolonger. Et dans ce dernier cas, la tenue des législatives de 2013 pourrait bien être compromise.
Lire aussi, la situation : Hollande au Liban, une visite riche en symboles
Pour le 8 Mars, le dialogue avant tout !
commentaires (7)
"Le choix du PIRE", uniquement pour CEUX qui ne Recherchent que LE PIRE !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
06 h 40, le 05 novembre 2012