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Liban - Feuille de route

Sainte-Alliance

Une fois que les enfants de chœur de la République auront terminé leur chapelet de pater noster et d’ave maria à la mémoire de la défunte porte du domicile metniote de Michel Samaha, sauvagement exécutée, il est vrai, par le commando des services de renseignements des FSI, ils pourront aller créer une association de défense des droits du mobilier. Eux qui étaient à court de mots, ces dernières années, pour dénoncer toutes les agressions commises contre des institutions médiatiques ou des journalistes, entre autres, sont enfin sur le droit chemin. Les droits des portes, et des chambres à coucher, c’est déjà un bon début. Après tout, on ne s’humanise pas en un jour. Autant donc commencer quelque part.
Cette cacophonie minimaliste légaliste de bas étage ne saurait faire oublier l’immense exploit réalisé la semaine dernière au plan libanais. Et quel exploit ! D’abord de la paire Achraf Rifi-Wissam el-Hassan, dont le talent et le flair policier ont sauvé le pays d’un complot terroriste cataclysmique ; mais aussi du chef de l’État, Michel Sleiman, qui a agi souverainement, notamment en coupant court aux tentatives de Bachar el-Assad d’obtenir la libération de son nouveau pyromane privé.
L’exploit, le principal, cependant, dépasse le cadre sécuritaire.
Sans le savoir, Michel Samaha vient en effet de donner le coup d’envoi, à travers ses aveux, d’une nouvelle phase de l’histoire du Liban, sinon d’insuffler une âme nouvelle à la révolution du Cèdre, actuellement en état de cryogénie avancée en attendant la chute du tyran alaouite. L’histoire, cette gueuse, n’est jamais tendre, il faut le reconnaître, avec les traîtres, qui aident tant, pourtant, à la façonner... Dante a d’ailleurs tort de leur réserver le dernier cercle de l’Enfer dans sa Divine Comédie. Car en acceptant de devenir rien de plus qu’un artificier du régime, Michel Samaha, pris la main dans le sac, vient de contribuer à retracer un périmètre de souveraineté et d’indépendance à l’État libanais par rapport au régime de Damas. Les poursuites sont engagées contre Ali Mamlouk, le chef de la sécurité du régime syrien. C’est-à-dire, en d’autres termes, contre Bachar el-Assad, si la loi libanaise permettait de poursuivre le président syrien. Il reste évidemment à la justice, et militaire de surcroît, de recouvrer son prestige en repoussant toutes les pressions qui pourraient être exercées contre elle par le régime syrien et ses sbires locaux.
L’on peut donc sans complexes reconnaître déjà en Michel Samaha celui par qui la dé-assadisation est enfin devenue possible au Liban. Celui par qui tous les acolytes du régime tomberont les uns après les autres, comme un jeu de dominos : autant les Ponce Pilate qui se lavent déjà les mains en espérant qu’ils seront de cette manière à l’abri de la justice, que ceux qui continuent leurs gesticulations médiatiques en hurlant à la machination cosmique.
Or c’est justement en dehors du simple cadre politico-sécuritaire, et surtout en dehors de l’instantanéité, qu’il faut comprendre l’importance mégalithique de l’affaire Samaha. Car ce que l’homme de main de Bouthayna Chaabane a fait voler en éclats en quelques secondes, à travers ses aveux, c’est rien moins que le mythe sordide de l’Alliance des Minorités. À en croire les fuites des milieux de l’enquête à la presse, qui seront ou pas avalisés par la justice, Samaha cherchait notamment à fomenter des attentats à l’encontre de certaines régions et personnalités-clefs, notamment le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï – plutôt séduit jusqu’à présent, pourtant, par la rhétorique minoritariste – afin de créer une discorde sectaire entre les différentes communautés libanaises. Pour qui connaît bien la politique du régime Assad au Liban depuis le début des années 1970, il n’y a là rien de nouveau : il s’agit bien de la tactique du « pompier-pyromane », celle que dénonçait autrefois avec virulence Michel Aoun lorsqu’il voulait placer « le régime terroriste syrien en quarantaine »... Autres temps, pour toujours révolus...
Opérant directement sous les ordres de Bachar el-Assad, Michel Samaha était devenu, depuis un certain temps, le théoricien acharné de cette invention des services de renseignements syriens, défendant sur tous les plateaux de télévision ces « minorités victimes » contre le « grand méchant loup sunnite » et mettant en garde contre des attentats d’el-Qaëda et des salafistes. Toute une armada de propagande médiatique avait été mise à sa disposition, visant à abattre tous ceux – politiques, religieux, journalistes – qui pouvaient se mettre en travers des objectifs de la « Sainte-Alliance ». Surtout le patriarche maronite, Mgr Nasrallah Sfeir, victime d’une cabale impossible durant les dernières années de son règne, cabale au demeurant largement reprise par les milieux aounistes, pour le simple crime d’avoir fait de Bkerké durant un quart de siècle le bastion de la lutte contre l’Alliance des Minorités.
Il s’avère aujourd’hui que cette « Sainte-Alliance » des minorités n’est, preuves à l’appui, qu’un slogan retentissant masquant des attentats terroristes et des actes criminels à n’en plus finir dans le but de semer une nouvelle fois une sanglante zizanie au Liban et détourner, ce faisant, les regards du massacre interminable auxquels se livrent les Assad contre le peuple syrien.
Désormais, de quelle politique de « dissociation » ou de « distanciation » peut-on encore parler ? La seule voie à suivre pour le Liban, tracée bien malgré lui par l’extraordinaire Michel Samaha, est d’expulser l’ambassadeur du régime syrien du Liban, et avec lui son ministre des Affaires étrangères, Adnane Mansour, de rappeler l’ambassadeur libanais, d’abolir illico presto le Traité de fraternité et de coopération, de dissoudre le Conseil supérieur libano-syrien, en envoyant son secrétaire général, Nasri Khoury, à des tâches plus nobles. Et surtout, de laisser enfin les coudées franches à la justice libanaise et aux services de renseignements des FSI pour démasquer enfin le véritable complot fomenté contre le Liban, ses communautés, son tissu social et son élite politique et culturelle depuis près de 40 ans.
Il en est grand temps.
Une fois que les enfants de chœur de la République auront terminé leur chapelet de pater noster et d’ave maria à la mémoire de la défunte porte du domicile metniote de Michel Samaha, sauvagement exécutée, il est vrai, par le commando des services de renseignements des FSI, ils pourront aller créer une association de défense des droits du mobilier. Eux qui étaient à court de mots,...

commentaires (8)

c'est avec consternation,et un peu de retard, que j'ai lu les échanges entre la SG et MHG. le droit de réponse de la SG était surréaliste ! de la rethorique agressive, teintée de menaces -petites et grandes- en droite ligne d'un manuel qu'on croyait aux oubliettes depuis Mars-2005. mais voila, beaucoup de choses ont changé depuis et c'est avec dédain que ces sous-produits d'une culture Jamil-Sayyed ont été renvoyé dans leurs tranchés. Support Total a MHG.

Lebinlon

04 h 57, le 13 août 2012

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Commentaires (8)

  • c'est avec consternation,et un peu de retard, que j'ai lu les échanges entre la SG et MHG. le droit de réponse de la SG était surréaliste ! de la rethorique agressive, teintée de menaces -petites et grandes- en droite ligne d'un manuel qu'on croyait aux oubliettes depuis Mars-2005. mais voila, beaucoup de choses ont changé depuis et c'est avec dédain que ces sous-produits d'une culture Jamil-Sayyed ont été renvoyé dans leurs tranchés. Support Total a MHG.

    Lebinlon

    04 h 57, le 13 août 2012

  • Il est triste de voir que certains, voyant leurs idoles mordre la poussière, cherchent a noyer le poisson dans l'eau en dissolvant la responsabilité des uns et des autres dans les antiennes de la guerre civile. Il n'est de responsables, de tueurs et de criminels que ceux quoi s'en sont pris a l’état et au Liban a l’époque. Et cela s'applique uniquement aux forces dites Palestino-progressistes point barre! Les forces Kataeb, PNL, Tanzim et Gardiens des Cèdres n'ont fait que se défendre et rendre les coups pour sauver le Liban au nom de tous les Libanais, point barre! De plus, en 1990, le gouvernement de l’époque avait établi que la guerre était finie et que tous les actes qui y avait eu lieu étaient oubliés. Ce qui se passe aujourd'hui est donc pour aujourd'hui. Samaha est un traître point barre! Les autres suivront non pas pour les actes du passé mais pour ceux d’après 1990.

    Pierre Hadjigeorgiou

    04 h 26, le 13 août 2012

  • Si les services de sécurité font leur travail, tous ces hommes politiques libanais criant victoire ou criant à la manipulation seraient sous les verrous et ce, pour leur(s) rôle(s) pendant et après la guerre du Liban. Qui d'entre eux n'a pas massacré et/ou mis des bombes et/ou comploté. Tous ont été (sont toujours) les sbires du régime de Damas ou de Téhéran ou de Riad ou de Washington ou de Moscou et j'en passe... En d'autres termes tous sont des traîtres qui méritent d'avoir leur porte martyrisée. Mais on a tendance à oublier cette partie de l'histoire, volontairement ou pas et on suit à l'aveuglette un politicien ou un autre en cherchant à s'attirer ses faveurs juste pour avoir juste la sensation de faire (partie) de l'histoire.

    Daniel Lange

    03 h 17, le 13 août 2012

  • En ces temps "d’épidémies de libertés de cette fertile contrée!?" qui se déchirent et s'entremêlent, et qu’à cause de ce pragmatisme froid Collaborationniste, toutes les indignations moralisatrices ont vocation d’être tournées en dérision. Et bien qu’à cela ne tienne ; il ne faut céder ni à la moquerie, ni à la fourberie de ces "exégètes minorisés" ! En effet, ces jours-ci, la situation dans ce petit Grand pays résume parfaitement le débat qui s’y déroule, évidement par-dessus la tête de ces Petits indigènes "distanciés". Ils ressemblent à ce combattant qui ne craint pas seulement de se servir de ses propres armes, mais se croit également tenu de conserver intactes les armes de son sanguinaire voisin d’à côté Anti-libanais ! Et c'est bien là l’aveu, ils ne sont enthousiasmés que par leurs postes et deniers. Donc, comment s’étonner "que ceux d’en Bas commencent à danser, quand ceux d’en Haut se mettent à chanter." : "c’est pas pour les Va(e)nter, mais qu’est-ce qu’ils ont Chauds." ! On avait coutume de les "Ve(a)nter" en disant d’eux : ce sont les "rois des Hâbleurs" ! On aurait raison dans une situation pareille, dans la situation actuelle et avec des puinés pareils, de rappeler que dans ce pays on a déjà connu par le passé un nombre innombrable d’énergumènes pareils bluffant ou entretenant leurs dévoués larbins, mais jamais encore de parvenus et dévoués larbins bluffés et entretenus pareils....

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    03 h 11, le 13 août 2012

  • La plus courte distance entre deux points est une ligne droite mais surtout pas en politique et encore moins au proche et moyen orient ! Ces zig et zag m'exaspèrent , jusqu'à me plonger dans une léthargie dégoûtée . Mais heureusement , cher Michel , que tes articles viennent me donner un petit coup de remontant ! merci encore . Je te renouvelle mon soutien et mon admiration .

    Hamed Adel

    02 h 50, le 13 août 2012

  • Article qui dit TOUT, Monsieur Michel Hajji Georgiou. A ajouter : le baiser de Judas que Samaha a donné au Patriarche RaÏ à la TV, il y a quelque temps, avant l'encaissement du prix du crime...

    SAKR LEBNAN

    02 h 03, le 13 août 2012

  • Là M Hajji Georgiou, permettez-moi de n'être pas d'accord avec vous quant à la 'banalisation' de "l'exécution sauvage de la porte du domicile metniote de Michel Samaha". Cette "exécution" ne pouvait pas se faire sans une procession solennelle à la tête de laquelle, si possible, le patriarche Laham, ami particulier du président Assad et qui s'est tant indigné justement de ladite exécution ainsi exécutée. Cela dit, tout ce qu'on spécule ces jours-ci sur la "dé-assadisation du Liban", "l'expulsion de l'ambassadeur de Syrie", patron de notre ministre des Affaires du régime de Damas, "le renvoi" -oh combien nécessaire- de M l'Anachronique, c'est à dire M Nasri Khoury, secrétaire général du néfaste Conseil supérieur libano-syrien etc.. etc.. toute cela fait encore partie du "il fait bon rêver". La fin du régime Assad en effet n'est pas pour demain. Pour le malheur de la Syrie qu'il détruit systématiquement et du peuple syrien qu'il massacre. Pour le malheur du Liban et du peuple libanais aussi. Il faut encore beaucoup d'attente, de patience, de prudence et de vigilance.

    Halim Abou Chacra

    21 h 51, le 12 août 2012

  • J'ai bien aimé l'allusion à Pnce Pilate...tant il est vrai qu'en ce moment,à part un choeur réduit de pleureuses patentées,c'est plutôt le style trois singes qui prévaut...voire même pour certainsle style sauve qui peut...étonnant,non?

    GEDEON Christian

    20 h 51, le 12 août 2012

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